Aux Bastions, les femmes arborent leurs crinières blanches

Aux Bastions, les femmes exhibent leurs crinières blanches

Publié aujourd’hui à 17h00

“Quand mes premiers cheveux gris sont apparus, vers la trentaine, je n’ai même pas pensé à les teindre. Si je les avais teints, je me serais senti vieux, je pense, et dans un sens négatif.” La pirouette revient à l’essayiste genevois Mona Cholet (« Sorcières… », « Réinventer l’amour… »), dans un court texte qui sert à la fois d’exergue et de garantie à la série photographique de Ghislaine Héger, « Silver Power, des femmes francophones fières de leurs cheveux gris »à voir jusqu’à la fin du mois au Parc des Bastions.

Si les quinquas et les sexes, filles des féministes des années 70, se reconnaîtront sans doute dans cette exigence d’apparence naturelle, il n’est pas certain que les jeunes générations partagent le point de vue. En effet, le marché des soins capillaires – comme les procédures esthétiques en général – n’a cessé de croître au fil des décennies, y compris chez les garçons. Les codes et canons ont certes évolué, marqués entre autres par les luttes contre le sexisme et l’âgisme, mais n’ont pas encore disparu.

A Genève, où l'exposition ne présente que des nationaux, certains visages sont connus quelle que soit la couleur de leurs cheveux.

Pour autant, l’exposition de Ghislaine Heger ne nous renseigne pas sur l’année de naissance de ses modèles. Capturés le sourire aux lèvres – ou à défaut le regard tête de mort – ils accompagnent leur portrait d’une bio personnalisée ainsi que de quelques lignes retraçant la relation plus ou moins torturée qu’ils entretiennent avec leurs cheveux. Sans fioritures formelles hormis l’éclairage bienveillant, les photographies se contentent de mettre en valeur les visages, diversement auréolés de leurs nuances de gris.

La fermeture des salons de coiffure pendant le Covid a incité de nombreuses femmes à se prendre en charge, à l’instar de l’actrice Fanny Brunet.

A Genève, l’exposition extérieure n’expose que des femmes genevoises – tout comme elle n’exhibait que des femmes des cinq cantons (huit villes) où « Silver Power » s’est arrêté pendant près d’un an, avant son terminus aux Bastions. Les visiteurs identifient plusieurs personnalités locales qui brillent pour d’autres raisons que le choix de laisser leur crinière se dépigmenter à vue. Parmi eux, on soulignera l’éthicienne Samia Hurst-Majno ou encore la comédienne et marionnettiste Fanny Brunet. D’autres optent pour le semi-anonymat en se cachant derrière une initiale.

Dans le cadre boisé du Parc des Bastions, les cheveux qui changent naturellement de couleur prennent tout leur sens.

Pour les Genevois ordinaires, Ghislaine Heger, diplômée de la HEAD en 2006, section cinéma, a également prévu un défi festif pour conclure la tournée francophone de son projet. Le samedi 20 avril, à 14 heures, toujours aux Bastions, elle invite toute femme fière de son scalp d’argent à se retrouver pour une photo collective. Quels que soient les millésimes, les fonctions sociales et les motivations pour boycotter les teintures, les têtes grises pourront alors admirer le résultat sur le site de l’Association. TokyoLune.

Les combattantes du cuir chevelu cendré, ici l'éthicienne Samia Hurst-Majno, expriment chacune leur fierté à leur manière.

Parallèlement, les personnes intéressées pourront obtenir le catalogue d’exposition, qui compile les 101 tirages réalisés dans toute la Suisse romande. On y retrouve des célébrités nationales comme la conseillère fédérale Elisabeth Baume-Schneider, la conseillère d’Etat vaudoise Nuria Gorrite ou encore la journaliste et présentatrice de la RTS Claire Burgy, également marraine de l’opération.

En tournant ses pages, nous explorerons une thématique intemporelle à travers des témoignages. Et nous formerons à travers des exemples l’opinion qui guidera notre propre décision. Ou non. Car, comme l’écrit Mona Chollet, grâce aux différentes expériences auxquelles elles sont confrontées, les femmes ont « la possibilité de choisir en toute lucidité l’option qui leur convient le moins, et d’en changer aussi souvent qu’elles le souhaitent. ressens le besoin.”

« Silver Power, des femmes francophones fières de leurs cheveux gris »exposition jusqu’au 30 avril au Parc des Bastions, catalogue disponible auprès de l’association TokyoMoon, www.tokyomoon.ch. Jeudi 18 avril : 17h visite de l’exposition du photographe, 18h discussion avec Amanda Castillo et Charlotte Dumartheray au Palais Eynard.

Katia Berger est journaliste à la section culturelle depuis 2012. Elle couvre l’actualité du spectacle vivant, notamment à travers des critiques de théâtre ou de danse, mais traite aussi parfois de la photographie, des arts visuels ou de la littérature.Plus d’informations

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