« Zine Bettiche aurait pu être sauvé »

« Zine Bettiche aurait pu être sauvé »
« Zine Bettiche aurait pu être sauvé »

Ce samedi-là, le frère de Zine Bettiche épousait sa fille à Agen. «Je me réveille heureux. Je ne pouvais pas attendre. Cela a dû être une journée merveilleuse… Puis, j’ai appris l’assassinat de mon frère. J’ai dû tout annuler. » Un à un, les proches du quadragénaire, tué par arme blanche dans la nuit du samedi 21 au dimanche 22 mai, se présentent à la barre. Des témoignages d’une « dignité exemplaire » et « poignants », décrit Claude Derens, l’avocat général.

Ils mettent tous en scène un bon vivant, un homme atypique, qui a toujours eu le sens de la formule. « La dernière phrase qu’il m’a dite, après une conversation téléphonique, a été “Je t’aime plus que moi”, a déclaré son frère devant le tribunal. Ses sept enfants, qu’il a toujours vu par intermittence, parlent d’un père « engagé », qui a servi au Kosovo et en Bosnie-Herzégovine. Il s’intéressait à la vie politique de son pays. Il se définissait comme Diogène, de la mythologie grecque », raconte à son tour son fils. Les parties civiles, nombreuses et réunies dans la salle d’audience, ne manquent pas un instant des débats. Et ils font le nez quand on évoque les problèmes d’alcool de Zine Bettiche.

Un coup porté « comme une poussée »

Dans le centre-ville d’Agen, le cuisinier saisonnier était régulièrement vu ivre et chancelant, selon plusieurs témoignages. Le soir des faits, lorsqu’il a rencontré Francis Save, son meurtrier présumé, il avait près de 3,5 grammes d’alcool par litre de sang. Au moment de la bagarre, « cet état d’alcoolisme très important jouait un rôle dans le mécanisme de vigilance. Il avait forcément des problèmes d’équilibre et n’avait pas la capacité de se défendre”, soutient le médecin légiste, qui exclut l’hypothèse d’une agression acharnée contre le quadragénaire. Un coup de couteau au ventre, « porté, comme un coup de poignard en tauromachie », lui fut fatal. « La mort n’est pas survenue immédiatement. Il est mort d’une hémorragie interne. » La victime, après avoir été poignardée, « aurait pu être sauvée », assure l’expert.

«Je ne sais pas pourquoi il a fait ça. Et je ne lui ai rien demandé, parce que je ne veux pas savoir.

Tremblant, souffrant de spasmes réguliers, Francis Save se déplace dans le box. Il semble plus apaisé lorsque ses amis et sa famille apparaissent à la barre. « Francis est un bon garçon. Je ne l’ai jamais vu violent. Quand il m’a parlé d’une attaque au couteau, j’ai cru que c’était une blague», révèle un de ses amis, chez qui il s’est rendu le lendemain de l’incident. « Il a blessé beaucoup de gens. Mais j’aime Cici [le surnom de Francis Save, NDLR]. Je l’aime. C’est ma famille. On peut aimer quelqu’un et être en désaccord avec ce qu’il a fait», explique avec modestie sa tante par alliance, épouse de Lisiate Fa’aoso, un ancien joueur du SUA avec qui l’accusé vivait, à Brax.

Les larmes aux yeux, elle évoque son comportement de grande adolescente à la maison, sa consommation d’alcool qui a suivi son licenciement du club toulonnais. « Il était déprimé. » Elle décrit aussi le gouffre culturel qui sépare les îles Tonga de la France. « Il est arrivé seul, à 16 ans… C’était trop compliqué. »

Schizophrénie

Selon son oncle, Lisiate Fa’aoso, « Francis a changé après le décès de son grand-père en 2019. Il était très proche de lui. Il était tout le temps triste… » Le deuxième ligne, âgé de 40 ans, répond péniblement aux questions de la cour d’assises et des avocats de la partie civile. « Oui », « non », « je ne sais pas ». « Vous le verrez en détention. Vous a-t-il expliqué pourquoi il a fait cela ? », interroge Me Eric Barateau, du barreau de Périgueux. « Non. Et je ne lui ai rien demandé, parce que je ne veux pas savoir », lâche laconiquement le rugbyman. Il évoque le « comportement coquin » de Francis à la maison, sans plus de détails. Il raconte cette journée du 22 mai 2021, lors de laquelle François l’a mis très en colère. « La voiture n’était plus là. Il l’avait pris sans ma permission. Quand il est revenu, je l’ai frappé avec un bâton. » Le Tongien ne savait toujours pas que son neveu était impliqué dans une affaire de meurtre… « Nous étions en Dordogne. La police a appelé et nous a demandé de rentrer à la maison. »

Ensuite, Francis Save lui a tout raconté. « Nous sommes allés directement au commissariat. » Depuis mai 2021, Lisiate Fa’aoso lui rend régulièrement visite en détention. «Je pense qu’il a changé. Je sais qu’il ne se sent pas bien dans sa tête. Son état de santé s’est subitement détérioré en prison. » Lundi, le tribunal s’attardera longuement sur l’état psychiatrique et psychologique de l’accusé, récemment diagnostiqué schizophrène…

Les réquisitions, les plaidoiries et le verdict seront rendus lundi soir

 
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