A Hong Kong, la loi « sécurité » met les livres en danger

A Hong Kong, la loi « sécurité » met les livres en danger
A Hong Kong, la loi « sécurité » met les livres en danger

La fermeture de la célèbre librairie indépendante Mont Zéro de Hong Kong l’a rappelé à tous les amateurs de livres et de lecture, s’il le fallait. Ces derniers ne sont pas du tout à l’abri des régimes répressifs.

Créée en 2018, l’enseigne a su, en quelques années seulement, ouvrir et entretenir un espace de libre expression, en compagnie d’auteurs et de lecteurs, réunis lors de nombreux événements. Fin mars, Mont Zéro mais tire sa révérence, après un baroud d’honneur qui a rassemblé des centaines de personnes, le temps d’un week-end…

L’activité du magasin s’est arrêtée après une vague de contrôles incessants de la part des autorités, suite à des dénonciations anonymes tout aussi régulières. Mont Zéro n’est qu’un autre exemple de la façon dont les lois sur la sécurité nationale changent la vie quotidienne des résidents de Hong Kong, conduisant à une réduction incommensurable des libertés individuelles…

La première législation de ce type remonte à 2020, après les manifestations en faveur de la démocratie très fréquentées de 2019, et une seconde a vu le jour en mars dernier. Cela ajoute plusieurs catégories d’infractionspassibles de peines particulièrement lourdes : trahison, insurrection, espionnage, sabotage et ingérence étrangère.

Des notions qui restent elles aussi assez floues, et qui pourraient donc recouvrir des actes et des discours divers et variés. Ainsi, le simple fait de «inciter les membres de l’armée à la rébellion» peut conduire à la prison à vie… Dans ce contexte, il est difficile de jouir de son droit à la liberté d’expression.

Édition et vente de livresdécimé»

Volker Türk, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, a fermement condamné le 19 mars cette deuxième loi sur la sécurité nationale. l’imprécision du textece qui pourrait conduire à la criminalisation de comportements »protégé par les lois internationales sur les droits de l’homme« .

Ces ambiguïtés sont très préoccupantes, compte tenu du risque d’utilisation abusive et d’application arbitraire, notamment pour cibler les voix dissidentes, les journalistes, les chercheurs, les acteurs de la société civile et les défenseurs des droits de l’homme.

– Volker Türk, 19 mars 2024

L’autocensure deviendrait la norme, par crainte d’éventuelles représailles, dénonciations et, à terme, peine de prison.

L’Union internationale des éditeurs et la Fédération européenne et internationale des libraires, dans un communiqué commun, s’inquiètent des conséquences de cette loi sur «liberté de publier à Hong Kong« .

Au cours des dix dernières années, l’édition et la vente de livres ont été décimées à Hong Kong. De l’intimidation aux lois restrictives en matière de sécurité, nous devons reconnaître tous les outils de la censure et résiste-y fermement», souligne Kristenn Einarsson, qui dirige la commission Liberté de publier de l’IEU. Jean-Luc Treutenaere, co-président de la fédération des libraires, déplore une dégradation de la liberté d’expression »alarmant et déchirant« .

Les libraires et éditeurs de Hong Kong ont déjà payé un lourd tribut : en 2015, cinq employés de la librairie et maison d’édition Causeway Bay ont disparu, pour réapparaître sur le continent. L’un d’eux, Gui Minhai, est toujours emprisonné et purge une peine de dix ans… En mars 2023, trois libraires, Alan Keung Ka-wai, Cannis Chan Sheung-yan et Alex Lee Lung-yin ont été arrêtés pour avoir produit et vendu un livre. livre sur les manifestations de 2019.

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Les autorités les accusaient alors d’actes de «sédition», un délit introduit par la première loi sur la sécurité nationale de 2020…

Photographie : Police de Hong Kong, septembre 2019 (illustration, Tauno Tõhk, CC BY-SA 2.0)

 
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