Dans notre numéro spécial consacré à l’élection présidentielle américaine, les conséquences de la victoire de Donald Trump sur l’image des Etats-Unis ont été analysées.
Il y a huit ans, l’arrivée au pouvoir de Donald Trump surprenait tout le monde. Aujourd’hui, son retour est qualifié d’historique, y compris par le principal concerné.
Après la victoire du républicain, l’image des États-Unis change-t-elle ? Le repli sur soi est-il la nouvelle donne ? Nicolas Baygert, docteur en sciences de l’information à l’ULB, a livré son analyse.
« Nous avons déjà parlé d’isolationnisme, qui est plutôt cyclique. Il s’agit ici en fait d’une nouvelle version du trumpisme, qui a également été remodelé d’une certaine manière par l’arrivée de nouveaux soutiens. Il y a effectivement aujourd’hui le récit que tente de s’imposer le camp républicain, c’est cette idée du phénix, du plus grand retour de tous les temps, comme le dit Trump lui-même. Et nous ne pouvons pas le nier. c’est effectivement une grosse surprise. On se souvient encore que quelques jours après l’attaque du Capitole, le 6 janvier 2021, Trump et le trumpisme étaient en quelque sorte une mort clinique. Il avait été totalement banni des réseaux sociaux. Cette idée d’annulation, cette idée d’éliminer enfin cette personnalité, cette personnalité publique du débat, avait été mise en œuvre. Mais aujourd’hui, la situation s’est inversée. Ce qu’il faut comprendre, c’est que Donald. Trump, lui, est en campagne permanente. Il est en campagne permanente depuis 2016. Il n’a jamais cessé d’exploiter tous les dérapages. On l’a revu avec son passage chez McDonald’s, son passage dans un camion poubelle. C’est un judoka. Alors, il prend l’attaque et la retourne contre son adversaire, en l’occurrence Kamala Harris et le camp démocrate. Donc, je pense que ses partisans le comprennent aujourd’hui. Et tous ces excès, parce qu’ici on est choqué par le style de Donald Trump, ça ne choque plus personne aux Etats-Unis.»
Malgré des affaires pénales, son passé et des bévues, Donald Trump a réussi à revenir au pouvoir aux États-Unis. Est-ce le nouveau modèle américain ? Nicolas Baygert répond :
« On l’a peut-être oublié, mais souvenez-vous d’un certain Silvio Berlusconi. Là aussi, c’est un homme d’affaires qui se lance en politique. Qui, d’une certaine manière, révolutionne et qui prend place dans le paysage politique italien avec les capitaines d’industrie, avec les médias, avec lui… Aujourd’hui, c’est plus les réseaux sociaux, avec Elon Musk et avec les affaires sans fin et cette immunité. , finalement, qu’il a conservé en politique avec le même type de scandale d’ailleurs.
Ce qui est intéressant en effet, c’est de voir que nous avons beaucoup parlé de joie. La campagne de Kamala Harris, c’est cette idée qu’elle va exciter le camp démocrate. Je le vois plutôt comme une forme de Prozac, un antidépresseur, à un moment donné, où tout le monde était à terre après le débat, notamment, de Biden contre Trump. Aujourd’hui, quand on voit les meetings de Donald Trump, c’est un show politique, c’est du stand-up. Il y a un mélange d’humour et de harangue politique. Et puis, on voit Elon Musk, sauter de joie sur scène. Donc là aussi, une sorte d’idée de révolution, peut-être conservatrice ou néoconservatrice, qui passionne le camp Trump, comme ce n’était pas le cas en 2020.»
Est-ce le nouveau profil du président américain dans les années à venir ?
« Je pense que Trump n’est pas la fin, mais le début de quelque chose. » estime l’économiste Bruno Colmant. «En fait, tout l’algorithme de Trump consiste à placer mentalement les États-Unis, comme dans les années 70, en pleine crise économique, alors qu’ils sont au plein emploi, et à la fin de la guerre du Vietnam, où tous les soldats sont complètement rentrés. dépareillés, ont été exclus de la vie civile. Il se considère comme le numéro deux de Ronald Reagan. Les Américains ne réagissent pas aux excès, car cela me frappe lorsque j’en discute avec mes amis américains. , ils ont honte et sont stupéfaits de ce qu’est devenu leur président. Ils n’ont plus la force individuelle pour s’y opposer. En fait, ils se cachent dans la honte. Le monde entier les surveille de près. Etats-Unis, pauvreté, précarité, regard sur l’inflation… Alors que les Etats-Unis, depuis des années, voulaient donner une image extrêmement positive du pays à travers le soft power, à travers Top Gun et autres films de ce genre. Il y a donc aujourd’hui une ouverture sur une réalité que les Américains voient avec une grande tristesse.
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