Dans plusieurs pays, l’âge du dépistage universel de deux des principaux cancers a été abaissé à la quarantaine. Au Québec, dans la plupart des cas, il faut attendre d’avoir 50 ans.
Publié à 1h12
Mis à jour à 5h00
A quel âge peut-on faire un dépistage du cancer ?
Pour le moment, les tests de dépistage des principaux cancers (sein, colorectal) pour les personnes asymptomatiques sans antécédents familiaux ne sont offerts qu’à partir de 50 ans au Québec. Mais dès qu’un membre de la famille élargie est touché par un cancer, le dépistage est souvent disponible dès 40 ans, voire avant. Dans le cas d’un parent au premier degré (père, mère, enfant, frère ou sœur), le dépistage est souvent recommandé 10 ans avant le plus jeune âge du diagnostic dans la famille – par exemple, l’enfant d’un parent chez qui un cancer a été diagnostiqué au Les personnes âgées de 45 ans devraient subir leur premier dépistage à 35 ans.
Dans plusieurs provinces canadiennes, dont l’Ontario et la Colombie-Britannique, l’âge du dépistage du cancer du sein a été abaissé à 40 ans. En septembre, le ministre de la Santé du Québec, Christian Dubé, a mandaté l’Institut national d’excellence en santé et en services sociaux (INESSS) pour évaluer l’élargissement potentiel du dépistage du cancer du sein dès l’âge de 40 ans. Une décision doit être prise d’ici la fin de l’année.
Faut-il encourager les femmes à passer une mammographie dans la trentaine ou la quarantaine ?
Oui, mais avec quelques réserves, dit le Dconcernant Saima Hassan, du CHUM. Chez les patientes plus jeunes, dont les seins sont plus denses, la mammographie détecte moins bien la présence d’un cancer. « Nous devons développer d’autres moyens de détecter le cancer du sein », dit-elle. Prises de sang ou tests génétiques, des outils qui permettraient de sélectionner plus finement les patients à risque.
Si nous avions un moyen de déterminer lesquels présentent un risque élevé, nous pourrions les détecter avant que le cancer ne se développe.
Le Dconcernant Saima Hassan, chirurgien oncologue et spécialiste du cancer du sein au CHUM
Mais jusqu’à ce que ces outils soient disponibles, le Dconcernant Hassan estime que le dépistage devrait commencer à partir de 40 ans.
Dans le cas du cancer colorectal, faut-il relever l’âge du dépistage ?
Le cancer colorectal est actuellement la deuxième cause de mortalité par cancer au Québec, après le cancer du poumon. Aux États-Unis, ainsi que dans plusieurs pays européens, l’âge pour commencer le dépistage a été abaissé à 45 ans. Au Canada, de nombreuses voix s’élèvent pour suivre la tendance.
Il faudrait définitivement le fixer à 40, surtout avec la disponibilité de l’analyse sanguine des selles.
Le Dr François Letarte, spécialiste en chirurgie gastro-intestinale au CHU de Québec
Le « test immunochimique de sang occulte dans les selles » – le test iFOBT, également appelé test FIT – est désormais accessible aux personnes âgées de 50 à 74 ans sans même avoir besoin de consulter un médecin. Procurez-vous simplement une trousse gratuite auprès d’un professionnel de la santé (ou via Clic Santé). En cas de résultat positif, le patient sera invité à subir une coloscopie, cet examen qui consiste à insérer une caméra par l’anus pour voir l’intérieur des intestins. Les polypes – excroissances qui se développent dans l’intestin et provoquent des saignements – peuvent ensuite être retirés avant qu’ils ne deviennent cancéreux.
“Un homme de 40 ou 30 ans qui a du sang dans les selles est envoyé passer une coloscopie même s’il n’a pas d’antécédents familiaux”, précise le Dr.r François Letarte. Il s’agit le plus souvent d’hémorroïdes ou d’une fissure. Mais une des erreurs que l’on constate souvent dans le cas des jeunes, c’est qu’on leur dit depuis deux ou trois ans qu’ils ont des hémorroïdes, alors qu’il n’y a pas de remède. »
Outre les facteurs de risque connus, comme l’obésité et l’alcool, quelles sont les autres pistes de recherche pour expliquer l’augmentation des cas de cancer chez les moins de 50 ans ?
Trois éléments retiennent particulièrement l’attention des chercheurs.
Microbiote : De plus en plus de chercheurs s’intéressent au microbiote, cette soupe de bonnes bactéries qui colonise le système digestif et constitue un bouclier important pour le système immunitaire. L’alimentation a une influence sur la qualité du microbiote, tout comme la prise d’antibiotiques. La consommation de produits transformés depuis l’enfance a-t-elle par exemple altéré le microbiote des générations X et des millennials ? Les chercheurs suggèrent qu’un microbiote faible permet la prolifération de bactéries pathogènes qui modifient la structure des cellules et favorisent le développement du cancer.
Dormir : Entre 1905 et 2008, la durée moyenne du sommeil des enfants et des adolescents a été réduite d’une heure, selon une étude australienne publiée en 2011. C’est un élément auquel les chercheurs ne prêtent pas suffisamment attention, estime Shuji Ogino, professeur à Université Harvard, a déclaré le mois dernier. “Nous sommes exposés à beaucoup de lumière artificielle la nuit, même à l’âge des bébés”, a-t-il expliqué dans une interview à la BBC. Une étude britannique réalisée en 2021 auprès de personnes de plus de 50 ans a associé une mauvaise qualité de sommeil à un risque plus élevé de cancer.
Pollution : L’exposition aux « produits chimiques environnementaux au début de la vie et à l’âge adulte » fait partie des facteurs de risque putatifs dont l’effet est « mal compris », selon les chercheurs de l’ACS. En juin 2023, un chercheur néo-zélandais a exhorté ses collègues à se pencher sur un éventuel lien entre l’ingestion de microplastiques et le cancer de l’intestin. Cet automne, la France a accepté d’indemniser la mère d’une petite fille décédée d’un cancer causé par une exposition à des pesticides avant sa naissance.