Détecter et mieux sevrer. C’est l’objectif du programme pilote ciblant certains fumeurs et anciens fumeurs, qui sera déployé d’ici la fin de l’année, a annoncé jeudi 23 janvier l’Institut national du cancer (INCa). Causé dans environ huit cas sur dix par le tabac, ce cancer marqué par une croissance anormale et incontrôlée des cellules des poumons reste la tumeur la plus mortelle en France, avec 30 400 décès chaque année. Le programme pilote comprendra 20 000 participants, âgés de 50 à 74 ans, fumeurs ou ex-fumeurs sevrés depuis moins de 15 ans et ayant une consommation cumulée de tabac d’au moins 20 paquets par an. Ils seront appelés à réaliser deux scanners thoraciques à faible dose – c’est-à-dire avec un rayonnement modéré, équivalent à une radiographie standard – à un an d’intervalle, puis tous les deux ans, et se verront également proposer un sevrage tabagique.
L’objectif ici de ce projet pilote est de déterminer les méthodes les plus efficaces et les plus sûres de dépistage par scanner thoracique. Notamment en évaluant la durée, la fréquence, le rôle de l’intelligence artificielle, l’impact économique, ou encore l’impact sur l’offre de soins, selon le président de l’Inca, Norbert Ifrah. En France, trois cancers (sein, colorectal, col de l’utérus) font l’objet d’un dépistage organisé, systématiquement proposé à une population cible. Mais pour le cancer du poumon, le principal obstacle des autorités sanitaires a longtemps été le risque de «surdiagnostic» des tumeurs qui n’évolueraient pas en cancer.
Scanner thoracique chez les personnes à risque
Plusieurs études ont montré les bénéfices du dépistage organisé du cancer du poumon. Un scanner à faible dose chez les personnes à risque peut détecter précocement les petites tumeurs débutantes et réduire le risque de décès d’environ 20 à 25 %. En 2022, la Haute Autorité de Santé avait donc recommandé « La mise en œuvre d’expérimentations réelles avant d’envisager le déploiement d’un programme de dépistage à grande échelle ». En effet, les résultats de l’étude pilote « Conditionnera la généralisation du dépistage organisé »a déclaré le président de l’Inca, selon lequel « On peut raisonnablement espérer une généralisation avant 2030 ».
« Nous espérons que les premiers scanners seront fabriqués au début du second semestre 2025 »a déclaré le professeur Norbert Ifrah. Convaincu que« Un certain nombre de personnes souhaitant se faire tester sont dans les starter blocs »le président de l’Inca a ajouté que les médecins généralistes, sages-femmes, infirmières en pratique avancée, pharmaciens, pneumologues, tabacologues, addictologues ou oncologues peuvent orienter les patients vers les centres associés au système. Région par région, l’organisation sera déclinée avec les agences régionales de santé.
-Un cancer diagnostiqué aujourd’hui à un stade trop tardif
« L’intérêt du dépistage est majeur pour la santé publique »a souligné le professeur Norbert Ifrah. En effet, la majorité des diagnostics sont posés trop tard, ce qui complique les traitements et diminue les chances de survie, car les symptômes du cancer du poumon tardent à apparaître. Par ailleurs, le nombre de nouveaux cas se stabilise chez les hommes, où il progresse fortement chez les femmes qui ont commencé à fumer plus tard. Pour ces derniers, le nombre de décès par cancer du poumon pourrait dépasser cette année celui des décès par cancer du sein, 12 600 Décès en 2021 (chiffres les plus récents de l’Institut national du cancer). En revanche, le tabac n’est pas “L’ennemi absolu” prévient le président inca, du moins ce n’est pas le seul. D’autres expositions sont reconnues cancérigènes pour les poumons (amiante, gaz d’échappement des moteurs diesel, radon, certains hydrocarbures, certains rayonnements ionisants, etc.).
« Chaque année, on laisse mourir un certain nombre de personnes en ne mettant pas en place ce dépistage » national, avait jugé mercredi le directeur général de l’Institut Gustave Roussy, Fabrice Barlesi, lors d’une conférence de presse, tout en reconnaissant que« Il faut l’organiser ». Nommé impulsion, le projet pilote retenu est réalisé par un consortium coordonné par les enseignants Marie-Pierre Revel de l’Assistance publique – Hôpitaux de Paris et Sébastien Couraud (Hospices civils de Lyon). L’Inca le financera à hauteur de 6 millions d’euros, un montant “colossal” Selon son président. De son côté, l’assurance maladie prendra notamment en charge les scanners à 100 %.
A l’étranger, seuls les Etats-Unis ont déjà généralisé le dépistage du cancer du poumon “En tête” Mais il est “Payant”ce qui restreint la participation, selon le président de l’Inca. D’autres pays y travaillent, comme l’Australie, qui doit démarrer en juillet, ou des États d’Europe centrale et orientale.