Le président chinois Xi Jinping a accordé mercredi un entretien exceptionnel à plusieurs hauts dirigeants d’entreprises américaines. Une initiative qui intervient dans un contexte de tensions géopolitiques, de ralentissement économique, mais surtout de baisse des investissements étrangers.
Frileux, voire effrayés, les investisseurs boudent la Chine. Certains quittent le pays, d’autres suspendent ou réduisent leurs activités. En 2023, le total des investissements directs étrangers (IDE) a atteint 33 milliards de dollars, son niveau le plus bas depuis 30 ans.
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Un choc électrique et un effondrement qui se confirme déjà cette année. Au cours des deux premiers mois de 2024, les investissements ont connu une baisse de 20% par rapport à la même période de 2023.
Imprévisibilité et insécurité
Cette chute vertigineuse s’explique en partie par un sentiment d’insécurité accru chez les investisseurs. Le pouvoir communiste s’est récemment distingué par son imprévisibilité et ses décisions souvent brusques et autoritaires. Pour beaucoup, la politique draconienne du zéro Covid a été un réveil brutal.
Sous Xi Jinping, le pays a également adopté un virage sécuritaire qui s’avère difficile à négocier pour les entreprises étrangères. La révision de la loi anti-espionnage, entrée en vigueur l’été dernier, renforce par exemple considérablement les marges de manœuvre du pouvoir face à tout ce qui peut être considéré comme une menace pour la sécurité nationale. Un texte aux contours flous qui reste sujet à interprétation.
Mais de nombreux groupes basés en Chine en ont déjà fait les frais. Des sociétés de conseil et d’audit ont notamment été perquisitionnées ces derniers mois et certains salariés ont été interrogés ou arrêtés, soupçonnés d’avoir collecté des informations économiques sensibles. Un phénomène qui s’inscrit dans la montée des tensions géopolitiques entre Pékin et l’Occident.
Xi Jinping, l’acteur incontournable
Cette rencontre avec Xi Jinping doit donc montrer aux dirigeants d’entreprises étrangères l’importance qui leur est accordée. Car rencontrer le secrétaire général du Parti communiste chinois n’est pas une mince affaire. L’invitation exclusive adressée à cette douzaine de grands patrons avait des airs d’audience impériale. Parmi ceux reçus, de grands noms comme Stephen Schwarzman, PDG de Blackstone, et Raj Subramaniam, directeur général de FedEx.
Lors de ce grand forum annuel organisé à Pékin, c’est traditionnellement le Premier ministre, officiellement en charge de l’économie, qui s’entretient longuement avec les hommes d’affaires à huis clos. Une occasion rare pour les PDG de sonder les plus hautes sphères du parti.
Mais cette année, le dialogue a été avorté. Li Qiang a annulé ou a été contraint d’annuler ce rendez-vous. Un signe qui confirme encore un peu l’effacement du rôle de numéro deux. En Chine, il n’y a désormais qu’un seul interlocuteur central : Xi Jinping, le noyau dur du Parti communiste.
Des paroles aux actes ?
Lors de cet entretien, le président de la République populaire de Chine a promis des réformes et notamment une plus grande ouverture des marchés. « Les investisseurs étrangers sont les bienvenus et constituent un élément essentiel de la modernisation de la Chine », a-t-il déclaré.
Ce discours d’ouverture n’est cependant pas nouveau pour le dirigeant chinois. Mais passer des paroles aux actes semble difficile pour Pékin. A l’heure où le pays parle d’ouverture, il accentue son repli. Une contradiction qui témoigne des tensions au sein du pouvoir.
Pékin oscille entre, d’une part, la volonté d’assainir son économie et, d’autre part, un réflexe sécuritaire visant à parer aux menaces extérieures perçues comme dangereuses. Deux tendances difficiles, voire impossibles, à concilier.
Selon le rapport officiel du ministère chinois des Affaires étrangères, les participants à la réunion ont été séduits, saluant notamment « le leadership extraordinaire de Xi Jinping ». En réalité, il est cependant difficile de croire qu’un simple discours de Xi Jinping puisse les convaincre, surtout compte tenu de l’ampleur des problèmes auxquels est actuellement confrontée l’économie chinoise.
Michael Peuker