l’Opéra de Limoges présente une série d’adaptations musicales pour la saison 2024-2025

Cette série de performances musicales n’inclut pas Carmen par Bizet rapporté intégralement.

Ces œuvres réinventent cette œuvre de manière à dénoncer les codes du patriarcat qu’elle contient. Il est resté invisible jusqu’à présent…

Applaudir la mort d’une femme : plus de questions !

L’histoire et les mélodies de Carmen ils sont connus dans le monde entier. Créé il y a 150 ans, en 1875, l’opéra de Georges Bizet est l’un des plus joués au monde, avec 220 représentations programmées pour la saison 2024-2025. L’Opéra de Limoges ne fait pas exception avec ses cinq spectacles inspirés de cet opéra.

A Séville, Carmen, femme fière et libre, tombe amoureuse du brigadier Don José. Très vite, elle le quitte. Don José lui ordonne de choisir entre lui et son rival, le torero Escamillo. Il préfère cette dernière. Don José la poignarde…

Compte tenu des définitions actuelles on parlerait de féminicide (tuer une femme parce qu’elle est une femme). Le mot « fémicide » n’est apparu dans les dictionnaires qu’en 2019, mais la réalité est bien plus ancienne.

Au XIXe siècle, les journaux parlaient davantage de crimes passionnels (il y avait du conjugacide pendant la Révolution française, mais le Code civil de 1804 ne prévoit pas cette notion). La justice prévoit une circonstance atténuante, en cas de « faute » de l’épouse : si elle est surprise en flagrant délit d’adultère au domicile conjugal. Le meurtre est considéré comme un crime d’amour blessé, de jalousie et d’honneur.

Si l’on revient à l’histoire de Carmen Mais cela ne marche pas : Carmen et Don José ne sont pas mariés. En réalité, c’est Don José lui-même qui est coupable de tromperie, car il a une petite amie. Cependant, c’est lui qui a du mal à soutenir la liberté de Carmen. « Elle le quitte. Ça la tue», déclare Jeanne Desoubeaux, directrice de Carmen, opéra-paysage.

Réinterpréter Carmen dans l’actualité

Selon une observation actuelle de l’Organisation mondiale de la santé, c’est souvent au moment de la séparation que survient le féminicide.

Au 23 novembre 2024, 122 féminicides ont eu lieu en . Selon les Nations Unies, une femme est tuée intentionnellement toutes les 10 minutes. Dans un tel contexte il n’est plus question d’applaudir la mort d’une femme.

Certaines productions revisitent la fin, avec Carmen ôtant la vie à Don José (Leo Muscato) ou se relevant après le coup prétendument fatal (Olivier Py). A Limoges, il ne s’agit pourtant pas de réécrire l’opéra, mais de le réinterpréter à l’époque actuelle, de placer la réalité sociale au centre de l’œuvre de Bizet.

Les cinq adaptations musicales de Carmen à Limoges

Carmen, la fille et Amor
Avec Vassilena Serafimova. Concert symphonique. A l’Opéra le 6 décembre, à 20h.

Carmen, un piano à la montagne
Par Sandrine Anglade. Théâtre musical. Figure de la femme libre dans un monde d’hommes, Carmen raconte le désir et la violence où l’amour mène à la mort. Grâce à une transcription pour quatre pianos sur scène, l’œuvre se concentre sur le drame des personnages Carmen, Don José, Escamillo et Micaëla. Il porte les exigences lyriques de Carmen au plus haut niveau sous une forme renouvelée. A l’Opéra, jeudi 19 décembre, 20h

Carmen, je chante pour moi
Par Myriam Jarmache. Spectacle solo de chant et de danse. À l’École Nationale Supérieure d’Art et de Design de Limoges, mardi 18 février, à 19h.

Carmen, tribunal correctionnel
Par Alexandra Lacroix. Travaillez avec des extraits de l’œuvre. Cette version est interprétée avec 13 instrumentistes de l’Ensemble Ars Nova. Avec ce point de vue : et si la justice avait statué sur le meurtre de Carmen, qu’aurait-elle fait ?
devenir Don José ? Un bourreau ? Une victime ? Ou irresponsable ? Jeudi 3 avril à 20h à l’Opéra.

Carmen, paysage d’opéra
Par Jeanne Desoubeaux. Opéra en version étanche et extérieure. Ici, l’humour omniprésent ne dilue en rien le propos, que le réalisateur résume ainsi : « Elle le quitte, il la tue. Carmen cela commence par le harcèlement de rue et se termine par le fémicide. Jardin de l’Évêché, samedi 28 juin à 19h, le festival Urbaka.


Sources :

https://www.radioclassique.fr/classique/carmen-est-evidemment-victime-dun-feminicide-selon-marie-nicole-lemieux/

https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/le-pourquoi-du-comment-histoire/comment-disait-on-feminicide-au-19eme-siecle-2904330

https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/07/06/lydie-bodiou-et-frederic-chauvaud-le-passe-regorge-de-meurtres-de-femmes_5486100_3232.html

Julie Duhaut et Muriel Mingau

 
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