trois films préférés qu’on a hâte de voir sortir

La 46e édition du Cinemed (Festival International du Film Méditerranéen) s’est achevée samedi 26 octobre à Montpellier, au terme d’une importante compétition de longs métrages. On vous dit tout sur nos trois coups de cœur.

Confus dans la haine, le héros du film géorgien « Panopticon », lauréat du prix de la critique, a des difficultés avec les femmes libres… Photo Cinemed.

Par Hélène Marzolf

Publié le 27 octobre 2024 à 12h28

Mis à jour le 27 octobre 2024 à 12h34

Lire dans l’application

jeLe 46ème Cinemed (Festival International du Film Méditerranéen de Montpellier) s’est terminé samedi 26 octobre sous des applaudissements et une pluie continue. Pour les réalisateurs de toute la Méditerranée, l’heure n’était pas seulement à la fête. Lors de la cérémonie de clôture nous avons parlé de la magie du cinéma, de la création, mais aussi des conflits en Israël et au Liban, plusieurs lauréats émus ont demandé, avec des discours très politiques, la fin des massacres de populations civiles et de la folie de la guerre en le Moyen et le Proche-Orient. Au terme d’une édition extraordinaire, où la compétition des longs métrages a été dominée par le drame réaliste et le thriller social, voici notre triplé gagnant.

Un peu de douceur dans la tête d'une brute, un instant suspendu dans

Un peu de douceur dans la tête d’une brute, un instant suspendu dans “Panocticon”. Cinématographique photographique.

Panoptiquepar Georges Sikharulidze

C’est peu dire que ce premier film, venu de Géorgie, a conquis le jury de la presse (dont télérama en faisait partie). Récompensée par le Prix de la Critique, cette œuvre audacieuse se démarque tant par sa concision (1h20) que par l’originalité de son regard sur les tourments indicibles de l’adolescence. Le beau Sandro (Malkhaz Abuladze), 18 ans, vit dans la culpabilité. Abandonné par sa mère partie travailler à l’étranger et par un père strict, il est sur le point de devenir moine mais peine à concilier ses devoirs religieux et une sexualité impérative, à laquelle il ne veut pas céder. Au lieu de faire l’amour avec sa copine, Sandro lorgne les décolletés des filles dans le métro, met ses mains sur leurs fesses, se masturbe devant des films porno ou s’exhibe à la fenêtre.

Haine de son propre corps, haine des femmes libres, haine même des Arabes, lui qui se gave de discours rances trouvés sur Internet : le garçon pourrait sombrer dans la délinquance sexuelle et le nationalisme de bas niveau. A travers le portrait de cette jeunesse réprimée, dont les émotions et les pulsions s’épanouissent sur un terrain imperméable, le réalisateur décrit avec délicatesse l’oppression d’une société géorgienne post-soviétique paralysée par les tabous, la xénophobie et la violence. Autour de Sandro évoluent également des adultes gênés : des mères enfermées dans une vie domestique décevante, des hommes absents, rigides, guidés par des préceptes archaïques…

Mais rien n’est gravé dans le marbre dans ce beau film où le réalisme le plus dur et les références à la Nouvelle Vague se heurtent avec une grâce surprenante. Notre héros, déjà une longue liane à la moue maussade et au regard noir, évoque la grâce acrobatique d’un Jean-Pierre Léaud. Et la belle coiffeuse et mère célibataire, qui l’aide à entamer un voyage de renaissance et d’acceptation de soi, pourrait être une cousine éloignée de Fabienne Tabard de Bisous volés. Les shampoings qu’elle donne à Sandro apparaissent comme des instants suspendus, ambigus, qui évoquent à la fois la sensualité et l’amour maternel. Lorsque des images en noir et blanc apparaissent au coin d’une scène 400 coupsde François Truffaut, invite à la comparaison avec Antoine Doinel, autre mauvaise graine au mauvais départ dans la vie, qui sait pourtant se libérer d’une enfance blessée. Avis aux distributeurs : nous espérons que le film arrivera dans les salles françaises.

Aucune date de sortie.

« Vers un pays inconnu », du Palestinien Mahdi Fleifel, a reçu l'Antigone d'Or. Cinématographique photographique.

« Vers un pays inconnu », du Palestinien Mahdi Fleifel, a reçu l'Antigone d'Or. Cinématographique photographique.

« Vers un pays inconnu », du Palestinien Mahdi Fleifel, a reçu l’Antigone d’Or. Cinématographique photographique.

Dans un pays inconnule Mahdi Fleifel

C’est l’autre révélation de cette sélection, récompensée à juste titre par le prix Antigone (présidé cette année par Katell Quillévéré). Premier film du Palestinien Mahdi Fleifel, Dans un pays inconnu s’ouvre sur cette citation de l’intellectuel Edward Saïd : « Le sort des Palestiniens n’est pas de finir là d’où ils viennent, mais dans un endroit inattendu et lointain ».

Pour le moment, deux cousins, Chatila et Reda, vivent à Athènes, des Palestiniens sans papiers qui attendent une vie meilleure en Allemagne. Pour atteindre cette terre promise, et trouver l’argent nécessaire aux faux passeports, les stratagèmes et petites arnaques se multiplient. Les difficultés de la vie quotidienne mettent constamment leurs efforts à rude épreuve : Reda se drogue, se remet régulièrement à creuser et dilapide les maigres économies du couple. Jusqu’au jour où Chatila, pragmatique, imagine une arnaque plus dangereuse, qui poussera ses complices à dépasser les limites non seulement légales mais morales.

A partir du documentaire, le réalisateur, qui a vécu enfant dans un camp de réfugiés au Liban, explore le sentiment d’exil, de désespoir, de déracinement, avec une colère et une humanité formidables. Athènes est présentée ici comme une souricière, où des hommes de tous pays reconstituent des camps de transit dans des squats et des appartements en sous-sol, chacun important un peu de sa propre culture et de sa vie. Dans ce quartier misérable les rues se croisent, sans vraiment se rencontrer. Hormis le lien indissoluble qui lie les cousins, il n’y a pas de place pour la fraternité, encore moins pour l’entraide.

Jusqu’où la survie peut-elle mener les hommes ordinaires ? Sans juger ses personnages, Mahdi Fleifel les plonge dans une spirale qui mène à la déshumanisation. Nous nous exploitons aussi entre frères dans la pauvreté, même si cela signifie laisser derrière nous une partie fondamentale de nous-mêmes. ” Les masques sont tombés », cite un commerçant fan du poète Mahmoud Darwich. ” Tu n’as pas de frères, mon frère, pas d’amis, mon ami, pas de citadelle (…) Assiége ton assiégeant. Pas d’autre issue « . Une tension de thriller irrigue cette recherche désespérée d’ailleurs, menée par des acteurs (Mahmood Bakri, Aram Sabbagh) d’une précision bouleversante.

Sortie le 12 mars 2025

Entre mariage arrangé et aspirations légitimes des jeunes, « Hayat » construit un puzzle fascinant. Cinématographique photographique.

Entre mariage arrangé et aspirations légitimes des jeunes, « Hayat » construit un puzzle passionnant. Cinématographique photographique.

Entre mariage arrangé et aspirations légitimes des jeunes, « Hayat » construit un puzzle passionnant. Cinématographique photographique.

Hayat, par Zeki Demirkubuz

La durée du film (3h13) pourrait faire peur. Au contraire, c’est fructueux. Avec Hayat, nominé pour la sélection du meilleur long métrage étranger aux prochains Oscars, le réalisateur turc Zeki Demirkubbiz déroule une épopée sociologique et romantique extrêmement riche et surprenante. Nous suivons d’abord un jeune homme. Boulangerie dans la ville de Bouyabat, Riza devait épouser Hicran, suite à des fiançailles arrangées par leurs familles. Mais la jeune fille s’est enfuie. Consumée par cette disparition, Riza part à Istanbul, où se cache peut-être son ancien amant, pour obtenir des réponses.

En soi, on avait déjà une histoire, avec cette exploration d’un jeune psychisme masculin tiraillé entre les codes de la Turquie rurale et les aspirations de son époque. Sauf que, dans la seconde partie, le film bascule sur le point de vue de la jeune femme : c’est à la honte, au déshonneur qu’Hicran semble condamné, à moins qu’il n’accepte, au terme de son voyage, un autre mariage arrangé… La profondeur L’augmentation du film repose en grande partie sur la psychologie complexe de ses personnages, des ellipses et des changements de perspective qui transforment l’histoire en un puzzle mental. L’amour finira-t-il par triompher ou les jeunes seront-ils condamnés à répéter les mêmes schémas que leurs aînés ? Pas de réponses claires dans ce film romantique et inquiétant, qui interroge jusqu’au bout.

Aucune date de sortie.

Les gagnants absolus du 46ème Cinemed

FILM

Antigone dorée
Vers un pays inconnu, de Mahdi Fleifel (/Royaume-Uni/Grèce/Allemagne/Pays-Bas/Palestine, 2024)
Prix ​​de la critique
Panoptique, de George Sikharulidze (Géorgie/France/Italie 2023)
Prix ​​du public
La Vierge à l’Enfant, par Binevsa Berivan (Belgique/France)

Prix ​​du Jeune Public
La Vierge à l’Enfant, par Binevsa Berivan (Belgique/France)
Prix ​​JAM de la meilleure musique
Konstantinos Pistiolis par Carné di Dimitris Nakos (Grèce, 2024)
Prix ​​étudiant pour la première œuvre
Vers un pays inconnu, de Mahdi Fleifel (France/Royaume-Uni/Grèce/Allemagne/Pays-Bas/Palestine, 2024)

COURTS MÉTRAGES

Grand prix
Til tuteur, de Ali Cherri (Italie/France, 2024)
Mentionner à Après le soleil de Rayane Mcirdi (France/Belgique/Algérie, 2024)
Prix ​​du public
Vibrations de Gaza, de Rehab Nazzal (Canada/Palestine, 2023)
Prix ​​du Jeune Public
Vibrations de Gaza, de Rehab Nazzal (Canada/Palestine, 2023)
Mentionner à Mori de la technologie de l’eau (Turquie, 2024)
Tarif Canal+
Mayonnaise de Giulia Grandinetti (Italie, 2024)

DOCUMENTAIRES

Prix ​​Ulysse
Mio de Samira El Mouzghibati (Belgique/France, 2024)
Mentionner à 1489 di Shoghakat Vardanyan (Arménie, 2023)

Prix ​​Film des 2 Rives
Signes de vie de Leandro Picarella (Italie, 2023)

 
For Latest Updates Follow us on Google News
 

PREV Karell (L’amour est dans le pré 2024) évoque le comportement insistant de son prétendant
NEXT Mariana Mazza parlera de gentrification et d’Alexandre Barrette dans son prochain spectacle, « Foie gras »