Léo Henry enchante nos âmes d'enfants

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Une illustration de Stéphane Berger pour « Le Réveil du Palazzo ». LE BÉLIAL

« Mille saisons. Le réveil du palais », de Léo Henry, Le Bélial', 368 p., 23,90 €, numérique 13 €.

Dans la cité-univers gigantesque de Pré-aux-Oies, drastiquement hiérarchisée, aux quartiers filtrés et isolés, Lazario est un moins que rien, un orphelin né dans la rue, un gosse de la guilde des ramoneurs qui a dû fuir la justice après un tragique accident. Alors que le ciel se déchaîne et que la crasse des enfers menace de déborder, c'est pourtant de lui que naîtra l'étincelle qui pourrait remettre en cause le pouvoir absolu de la Régentine et de ses six forces de police (à Pré-aux-Oies, tout fonctionne volontiers par six), chacune défendant une part de l'ordre teinté de magie puissante qui règne sur les lieux.

À la tête d'un équipage hétéroclite d'enfants démunis, d'adolescents perdus, de humbles dockers, d'artisans dévoyés, d'alchimistes en fuite et de trafiquants en quête de vengeance, Lazario entreprend de remonter le fleuve qui traverse la ville de haut en bas, entre torrents d'eau et inondations, à bord du Kit de bouillonune arche d'alliance, ô combien branlante, et décidément salutaire.

Malgré les succès, notamment cinématographiques, de Tolkien et de George RR Martin, la fantasy jouit toujours d'une réputation littéraire mitigée parmi les lecteurs d'autres genres. Aux côtés d'autres grands succès, Le réveil du palaisde Léo Henry, devrait désormais occuper une place de choix parmi les textes qui permettent de se convaincre qu'il y a quelque chose à voir dans ce domaine.

Volutes envoûtantes

On savait des constructions redoutables dont Léo Henry est capable lorsqu'il organise le choc minutieux entre un personnage historique et la fiction spéculative qui peut l'entourer, notamment dans Gueule de bois rouge (La Volte, 2011), autour de l'écrivain Fredric Brown et du réalisateur Roger Vadim, Hildegarde (La Volte, 2018), évocation de la musicologue, herboriste et mystique bénédictine Hildegarde de Bingen, ou Hector (Rivages, 2023), consacré au dessinateur de bande dessinée Héctor Oesterheld, disparu aux premiers jours de la dictature militaire en Argentine (1976-1983). Nous avons également pu admirer la manière dont il fait tourner les attentes de la fantasy au cœur du genre, avec Thecel (Gallimard, 2020).

Le réveil du palais Il déploie encore sa connaissance de la langue, en volutes captivantes, en dialogues émaillés d’argot réel et imaginaire, en combats chorégraphiés au millimètre, en revirements malicieux appliqués au sens même des mots (« captation » et « ruinelement » sont ici traités de façon particulièrement savoureuse), ou encore en références finement disséminées tout au long du récit – qui ne nuisent jamais à la narration sauvage de l’ensemble.

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