la trajectoire de décarbonation du groupe « n’est pas crédible », selon Yannick Jadot

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– Yannick Jadot lors de la conférence de presse sur le rapport de la commission d’enquête sénatoriale sur TotalEnergies.

On serait tenté de dire : « Tout ça pour ça ? ». Lorsque le groupe écologiste du Sénat a réussi à ouvrir une commission d’enquête sur la stratégie énergétique de TotalEnergies au début de l’année, on s’attendait à un rapport qui choquerait et égratignerait l’énergéticien. Mais les recommandations finales dévoilées aujourd’hui en conférence de presse apparaissent finalement très consensuelles. Sur les 33 propositions avancées, seules trois concernent spécifiquement TotalEnergies. Et même, dans des termes on ne peut plus diplomatiques. Il s’agit principalement“accompagner” la major de sa transition énergétique et“encourager” investir davantage dans les énergies renouvelables. Le communiqué salue même “les efforts” déjà fait,«supérieures à celles réalisées par les autres majors pétrolières».

Cette timidité est-elle surprenante ? Non. Il a fallu trouver un terrain d’entente entre le rapporteur Yannick Jadot (groupe écologiste) et le président de la commission d’enquête Roger Karoutchi (groupe Les Républicains), pas tout à fait sur la même longueur d’onde. Deux styles, deux ambiances. On se sent chez Roger Karoutchi la peur de stigmatiser un champion français ayant réalisé 237 milliards de dollars de chiffre d’affaires en 2023, soit seulement “que” 1,5% de la production mondiale de pétrole, et qui compte plus de 100 000 salariés dans le monde. Yannick Jadot n’a pas ces réserves et un certain historique personnel avec la major. Ancien directeur de campagne de Greenpeace France, il fait l’objet deune plainte en diffamation depuis 2022 chez TotalEnergies. Il avait accusé l’entreprise de complicité dans des crimes de guerre parce qu’elle continue d’importer légalement du gaz liquéfié russe en Europe et il estime que cela finance la guerre de la Russie contre l’Ukraine.

Malgré ces divergences, le rapport a été validé par 18 membres de la commission sur 19, avec une seule abstention.

Entrée de l’Etat au capital de Total et interdiction du GNL russe

Enfin, ce qui retient le plus l’attention, c’est l’idée selon laquelle l’État devrait acheter une action à 70 euros pour entrer au capital de TotalEnergies. Une action dite spécifique qui lui permettrait d’avoir un droit de regard sur ce que fait l’entreprise mais aussi un droit de veto dans le cas où elle souhaite déplacer sa cotation à New York et y déplacer son siège social, comme cela était possible. . être évoqué précédemment par son PDG Patrick Pouyanné. Un message envoyé aux actionnaires. “Nous craignons que Total reste un groupe français”, a déclaré Roger Karoutchi. Une autre recommandation qui ressort est de demander à la Commission européenne d’inclure dans les sanctions contre la Russie une interdiction d’importer son gaz naturel liquéfié.

Mais au-delà de ces recommandations très générales, le rapport reste très critique à l’égard de TotalEnergies. Il rappelle que la major est liée, en tant qu’opérateur ou actionnaire, à 23 projets pétroliers ou gaziers susceptibles d’émettre plus d’un milliard de tonnes équivalent CO2 sur l’ensemble de leur cycle de vie. De la bombes à carbone, c’est-à-dire des projets particulièrement émetteurs de carbone. L’entreprise a également été accusée par les scientifiques interrogés de ne pas chercher à réduire ses émissions indirectes de gaz à effet de serre. Et de s’engager davantage dans une stratégie de diversification de ses activités plutôt que dans une véritable transition énergétique.

« Avant, nous faisions face à des critiques qui venaient principalement des ONG. Là, toutes les institutions, comme l’Ademe ou les scientifiques du GIEC, sont entrées dans le jeu pour dire que la trajectoire de décarbonation de Total n’est pas crédible, pas sérieuse. Et ce n’est pas rien. a conclu Yannick Jadot en marge de la conférence de presse.