L’attentat contre Charlie Hebdo, le 7 janvier 2015, marquera ce mardi ses dix ans, et constitue un tournant. Ce jour-là, la quasi-totalité de la rédaction d’un journal satirique tombe sous les balles de deux terroristes fanatisés. Pour avoir publié des caricatures du prophète, en solidarité avec un journal danois, cette publication française, anarchiste et adoratrice de « manger le curé », a été dépassée par la mondialisation de la haine islamiste. Le choc a été immense dans un pays où la liberté d’expression semblait acquise et où le droit au blasphème suscite parfois un tollé, mais jamais de violence.
Depuis le 7 janvier, l’obscénité n’est plus symbolisée par un dessin « stupide et méchant », mais incarnée par des assassinats de sang-froid, des massacres et une intolérance élevée au rang de justification meurtrière. En ce qui concerne le terrorisme, ce n’était qu’un début. Les attentats du 13 novembre, la même année, prolongent le cauchemar, comme celui du 14 juillet à Nice ou la mort de Samuel Paty. Avec Charlie, la vie humaine a perdu sa valeur. Le droit de parole aussi. Depuis, le débat s’est déplacé vers les réseaux sociaux. La caricature, l’offense, l’humour et la dérision ne sont pas de mise. Nous sommes dans un monde où le mensonge est bien plus efficace que la vérité puisqu’il n’a pas besoin d’être prouvé. La brutalité des mots et des images se livre au visage à un rythme effréné, abolissant la réflexion au profit de l’émotion. Si loin de Charlie.
