Notre territoire est le cadre unique d’un avenir partagé : c’est donc ensemble, des citoyens aux ministres en passant par les architectes, que les décisions qui le concernent doivent être réfléchies et prises dans l’intérêt du plus grand nombre.
Dans ce collectif, chacun doit exprimer ses compétences, ses attentes et ses besoins tout en trouvant l’équilibre indispensable à la survie de l’ensemble.
En tant qu’architecte et urbaniste, je me suis forgé au fil des années des convictions qui se sont affinées avec l’évolution des modes de vie, des déplacements, de la production et de la consommation.
L’appétit croissant et la nécessité environnementale de favoriser les circuits courts de construction et de consommation doivent inciter à la conservation des territoires pour maintenir notre patrimoine commun sur le long terme. Cela permet également de redonner à la nature toute la place qui lui revient pour améliorer notre cadre de vie et abaisser les températures urbaines.
La ville est le seul organisme vivant capable de se ressourcer.
La ville périurbaine augmente le temps de transport, temps perdu qui impacte la qualité de vie. Cette ville étendue horizontalement constitue un défi pour les institutions qui la gèrent, notamment en termes d’équipements collectifs, de voirie et de transport, et d’entretien. Ce défi est d’autant plus difficile à relever que les finances publiques sont contraintes et que les citoyens se posent légitimement la question de l’efficacité des dépenses publiques.
Face à ces défis, nous avons une opportunité incroyable : la ville est le seul organisme vivant capable de se ressourcer. La solution à nos difficultés réside donc dans la superposition des usages et la densification de la ville sur elle-même. Les surfaces au sol en ville sont rares et le seront de plus en plus. Les quartiers du futur doivent être constitués d’une série de strates empilant habilement fonctions et usages personnels et professionnels, sans frictions ni nuisances. Avec ce principe, on peut reconquérir des bâtiments en perte de vitesse.
C’est le cas des friches commerciales, toujours très bien desservies par les transports. Ils sont construits à plat. On peut donc superposer des étages d’habitations, des espaces d’usines pour l’artisanat, des espaces de vie pour nos seniors et libérer des espaces naturels et des terres agricoles au sol au service de ce groupe humain en circuit court.
“L’architecture est aussi un art”
Nous devons produire la ville là où elle est nécessaire et veiller à ce que l’action publique fournisse des incitations positives aux acteurs de la construction. D’abord et avant tout en affirmant que la réponse aux défis environnementaux et de qualité de vie n’est pas d’arrêter de construire, mais de le faire mieux.
L’impératif réglementaire et économique nous fait parfois perdre de vue l’essentiel. L’architecture est aussi un art. Plus qu’une juxtaposition de gestes, l’histoire et le tissu de la ville sont un contexte dont il faut tenir compte. La beauté et la qualité technique et environnementale des bâtiments ne sont pas des modes superflues. Ils sont essentiels à la jouissance de la ville par ses usagers, et donc indispensables à sa réussite.
De même, tous les utilisateurs doivent trouver leur place. La pénurie de logements sociaux, qui déséquilibre l’échelle d’accès au logement, doit conduire à aider les bailleurs sociaux en réduisant les obstacles, pour certains assez récents, à la production de logements. Nous devons également produire des logements là où ils sont en demande.
La ville de demain sera ce que nous choisirons pour la faire
Pour cela, les mesures de régulation doivent être réorientées pour que l’avantage de l’optimisation fiscale soit une caractéristique de la production de logements plutôt que son objectif principal, en orientant ces mesures vers les zones en tension.
La ville de demain sera ce que nous choisirons d’en faire à travers nos décisions et nos usages. Gageons qu’avec réflexion et courage, elle sera plus durable pour tous, plus efficace pour son administration et plus agréable pour tous ses habitants.