Un dernier conseil des ministres puis un nouveau chef du gouvernement en France : le président Emmanuel Macron a promis de nommer d’ici jeudi, et potentiellement dès ce mercredi, le prochain Premier ministre qui sera chargé de négocier un accord pour éviter une seconde censure de l’exécutif.
Au lendemain d’une réunion inédite des chefs des différents partis politiques, hors extrême droite et gauche radicale, autour de M. Macron, l’éphémère Premier ministre Michel Barnier et son gouvernement se sont retrouvés une dernière fois mercredi matin au Palais de l’Elysée.
Lors de ce conseil des ministres un projet de « loi spéciale » a été présenté pour assurer « la continuité des services publics et de la vie du pays » à partir de janvier.
La censure du gouvernement la semaine dernière, trois mois après sa nomination, a effectivement laissé en suspens le budget 2025, qui visait à assainir les finances publiques, avec pour objectif de réduire le déficit public à 5% du PIB.
Avec un déficit attendu cette année au-delà de 6% du PIB, la France affiche la pire performance des 27 Etats membres de l’Union européenne à l’exception de la Roumanie, loin du plafond de 3% autorisé par l’UE.
Cette « loi provisoire » sera examinée lundi à l’Assemblée nationale, puis le 18 décembre au Sénat. Le texte est réduit à sa plus simple expression pour autoriser le gouvernement à augmenter les impôts et à dépenser des crédits sur la base du budget 2024.
Accord de non-censure
Lors de ce conseil des ministres, M. Macron a déclaré que la « base » des partis rassemblant le camp présidentiel et la droite ne pouvait pas « en l’état » être élargie, a rapporté la porte-parole du gouvernement Maud Bregeon. .
Il a expliqué “qu’il restait désormais à voir si certains étaient prêts à élargir cette base ou à s’entendre sur un principe de non-censure”, a-t-elle expliqué.
“Le pays n’a ni le luxe de l’instabilité ni celui de l’inaction”, a-t-elle soutenu, sans préciser si cela signifiait que le président choisirait un Premier ministre dans cette coalition sortante.
Mardi, devant les dirigeants des communistes, des socialistes, des écologistes, du camp présidentiel et du parti de droite Les Républicains (LR), M. Macron a promis de nommer un chef du gouvernement « dans les 48 heures ». Plusieurs proches comptent sur un choix dès mercredi soir, M. Macron se rendant en Pologne jeudi.
Le nouveau locataire de Matignon est alors chargé de négocier avec ces partis une participation au gouvernement, ou leur soutien à certains textes, voire un accord de « non-censure ». Ce n’est qu’à ce moment-là qu’il constituera son équipe.
M. Macron a souligné “sa volonté de ne pas dissoudre” à nouveau l’Assemblée d’ici la fin de son mandat en 2027, selon son entourage. Il a également constaté « l’unanimité des forces politiques pour ne plus dépendre du Rassemblement national », le parti d’extrême droite.
La décision du Premier ministre
M. Macron, à la surprise générale, a dissous l’Assemblée en juin, après la défaite de son camp européen face à l’extrême droite. Les élections législatives anticipées ont abouti à une Assemblée fragmentée en trois blocs (alliance de la gauche, des macronistes et de la droite, extrême droite) sans majorité absolue.
La gauche a proposé, si l’un des siens était nommé à Matignon, de ne pas utiliser le 49.3, cet outil constitutionnel qui permet d’adopter des lois sans vote, si, en échange, les opposants s’engagent à ne pas censurer l’exécutif.
“Un engagement sidérant, un contournement de la Constitution”, a réagi la leader de l’extrême droite en France, Marine Le Pen, “pas mécontente” d’être mise à l’écart, alors qu’un Ifop/Fudicial lui donne plus de 35% des intentions de vote aux élections. premier tour de la prochaine élection présidentielle.
Qui sera nominé ?
Tous les responsables reçus mardi suspendent leur décision au nom du futur Premier ministre.
Le plus optimiste mardi soir était François Bayrou, président du parti centriste MoDem, allié de longue date du chef de l’Etat, qui semble conserver sa place parmi les favoris.
M. Bayrou, qui a déjeuné jeudi avec M. Macron et a été de nouveau reçu mardi matin à l’Élysée, s’est félicité d’une rencontre “positive d’une manière inattendue” qui pourrait déboucher sur un “accord de coopération démocratique”.
Mais le nouveau Premier ministre “ne peut pas être François Bayrou” qui incarnerait une “continuité” du macronisme, a déclaré mercredi matin le patron du Parti socialiste, Olivier Faure, qui souhaite un chef de gouvernement “de gauche”, celui-ci étant venu d’abord aux élections législatives.
M. Faure est toutefois resté évasif sur l’attitude de son parti si M. Macron le nommait malgré tout.
Dans le camp présidentiel, les noms des ministres démissionnaires de la Santé, Catherine Vautrin, et des Armées, Sébastien Lecornu, circulent également. L’actuel envoyé spécial français au Liban et ancien ministre des Affaires étrangères, issu du Parti socialiste, Jean-Yves Le Drian, a décliné, mais certains espéraient encore le convaincre, selon des sources macronistes.
Le chef du parti de gauche radicale, La France insoumise (LFI), Jean-Luc Mélenchon, a mis en garde mardi soir ses alliés socialistes, écologistes et communistes contre une éventuelle trahison. « Pas d’accord de coalition ! Pas de « non censuré ». Reprenez vos esprits et rentrez chez vous ! », a-t-il crié.