Coupe du monde 2034 en Arabie Saoudite : déconstruire les hommes

Coupe du monde 2034 en Arabie Saoudite : déconstruire les hommes
Coupe du monde 2034 en Arabie Saoudite : déconstruire les hommes

Éditorial sur la Coupe du monde 2034

Il vaudrait mieux déconstruire les hommes que construire des stades

A écouter les visionnaires du sport, le salut passe par la bétonnière. Et s’il allait plutôt chez le psychologue ?

Éditorial Publié aujourd’hui à 11h37

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Partout, les gens veulent construire des stades. Dans la lointaine Arabie Saoudite comme très proche de nouson essaie de nous faire croire que la survie du sport dépend de projets immobiliers. A écouter les visionnaires de la construction, le salut passe par la bétonnière, et gare à ceux qui osent les contredire, ils risquent de se retrouver les pieds dans la dalle.

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A qui proposera le stade le plus technologique, le plus multifonctionnel, le plus durable – un dernier qualificatif qui rappelle qu’ils osent tout, et que c’est même ainsi qu’on les reconnaît. A l’ombre de ces montagnes connerie marketing, les promoteurs cachent à peine leur appétit vénal.

Notons ici qu’il est tout de même cocasse pour une industrie qui prône le mouvement de vouloir à tout prix faire de l’immobilier, sinon de la sédentarité – ici, on préférera toujours le charme suranné d’un gradin debout qui couine, à moins que l’essence de l’émotion sportive ne réside entre un hot-dog et une bière, confortablement assis dans une tribune chauffée.

Mais revenons à la construction. Rien ne décrit mieux les turpitudes de l’humanité à travers les siècles que la manière dont elle construit. Au milieu du Moyen Âge par exemple : à Bologne, les familles les plus riches gagnaient leur vie en construisant de fines tours carrées.

Droit, fier, au point de toucher le ciel, mais d’une utilité pratique discutable – de belles hauteurs sous plafond, bien que pas faciles à meubler. Le centre-ville aurait abrité plus d’une centaine de ces excroissances phalliques, aussi étroites que futiles, résultat du jeu entre le puissant qui avait le plus long – sûrement celui qui avait le plus court.

Aujourd’hui, certaines de ces tours disproportionnées existent encore. Plantés au milieu de la savante Bologne, ils sont le symbole d’une époque corrompue, où la folie des grandeurs n’avait d’égale que la soif de domination.

Pourtant, au vu des projets pharaoniques qui se multiplient aux quatre coins de la planète, on se dit que, même en mille ans, la fierté des hommes n’a pas pris une ride. Ici : au lieu de construire des stades, le sport pourrait envisager de déconstruire, à commencer par sa virilité toxique.

Florian Müller est journaliste et responsable de la rubrique sportive des 24 Heures, de la Tribune de Genève et du Matin Dimanche. Après des études de lettres à l’Université de Genève, il rejoint la rédaction du groupe Tamedia en 2010.Plus d’informations@FloMul

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