A ce stade, le constat s’impose : la guerre en Ukraine fait office d’incubateur de nouvelles technologies militaires, parmi lesquelles le drone prend la tête. Largués par milliers (la production nationale d’un million a été annoncée par Volodymyr Zelensky pour l’année 2024) sur les positions russes par les troupes de Kiev, les drones n’en restent pas moins une arme appréciée côté russe.
Coupé des composants occidentaux, le pays s’appuie dans ce domaine sur les drones rôdeurs Shahed présentés pour la première fois par l’Iran en 2020. Leur utilisation sur le sol ukrainien remonte à septembre 2022. Ils sont désormais également fabriqués sous licence par Moscou. , et peut transporter une ogive d’environ 50 kg.
Nuages de Shahed
Environ 2 000 drones Shahed, principalement de types 131 et 136, ont été lancés par les Russes en octobre 2024, soit dix fois plus que l’année précédente, rappelle Euromaidan. Ces attaques font un nombre croissant de victimes civiles. Par exemple, une attaque en septembre 2024 dans la ville de Soumy a fait au moins neuf morts lors de frappes contre un hôpital et un quartier résidentiel.
Selon Forbes, qui a compilé les témoignages de divers acteurs ukrainiens sur le terrain, un nombre croissant de Shahed abattus ont été retrouvés avec une nouvelle ogive thermobarique produisant une explosion plus puissante que les explosifs traditionnels.
Le principe de la thermobarie est complexe : les ogives produisent un nuage de matière, souvent liquide, qui réagit avec l’oxygène de l’atmosphère pour générer une explosion plus puissante. L’onde de choc provoquée par cette boule de feu à expansion rapide a également une durée beaucoup plus longue que celle des autres explosifs. Les armes à charge thermobarique produisent également des températures élevées (le « thermo- » en thermobarique, « -barique » faisant référence à la pression).
L’ogive thermobarique, preuve de crimes contre les civils ?
L’utilisation de ce type de charges n’est pas nouvelle en Russie, qui les fixe fréquemment sur les lance-flammes-fusées TOS-1. Leur utilisation sur les drones Shahed semble toutefois récente. Il apparaît également, poursuit Forbes, que l’ogive du drone, baptisée TBBCh-50, comporterait une seule étape de réaction, contrairement aux autres ogives thermobariques qui libèrent un nuage puis s’enflamment.
Ce type de conception pourrait également projeter des éclats d’obus et contiendrait apparemment 2 306 « éléments d’éclats d’obus », des billes d’acier de 9 mm projetées à grande vitesse. L’utilisation de ces armes éclaire les experts sur la volonté russe au moment du lancement, ces armes étant appréciées pour leur utilisation contre des bâtiments. Selon eux, cet état de fait conforte la thèse de frappes délibérées contre des civils, à la base des accusations de crimes de guerre régulièrement formulées par les organisations de défense des droits de l’homme.