Des Internet plus proches d’« Intervilles » que d’Olympia

Des Internet plus proches d’« Intervilles » que d’Olympia
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Samedi 27 avril, le site de Télévisions a diffusé tout l’après-midi une Olympiade 3.0 entre sportifs professionnels, streamers et influenceurs. Un échec complet, prix de l’opportunisme ?

Image promotionnelle de l’événement « Aux jeux Streamers » France Télévisions

Par Joseph Boinay

Publié le 28 avril 2024 à 17h54

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Dd’abord un faux départ. La promesse du service public semblait pourtant sincère : amener les moins de trente ans, qui ne regardent presque plus la télévision, à une programmation sportive, première étape avant de les intéresser aux Jeux olympiques, qui se tiendront cet été à Paris. Un autre pari, ” créer un événement pont qui rapproche les deux mondes », selon les mots de Samuel Etienne, co-animateur de l’émission.

La technique, assez astucieuse, a consisté à recruter, aux côtés d’anciens médaillés (Stéphane Diagana, Marie- Pérec, etc.), des streamers et influenceurs (Domingo, Shayvise, etc.), bien plus appréciés de la cible. Avec, en plus d’une diffusion sur la plateforme publique, un stream sur la chaîne d’Adrien Nougaret, alias ZeratoR, basculé (au grand désarroi des téléspectateurs) sur la chaîne France.tv Slash Twitch lors des phases finales.

Mais bien avant le début des jeux, une ombre plane sur le tableau : les candidats Tibo InShape et Ophénya. Le premier, pas le couteau le plus tranchant du tiroir et volontairement misogyne, ne cache pas son amour de l’ordre et des uniformes. La seconde fait la promotion d’une application de rencontres destinée aux… 10-21 ans. La streameuse suisse Baghera Jones, qui a découvert le casting, en a été émue et a immédiatement quitté la séance. France Télévisions s’est insurgée et a dévoilé la bande-annonce de l’événement – ​​on a même cru un temps qu’il serait annulé. Il est finalement entretenu avec des remplacements. Mais c’est une première alerte, et surtout la démonstration de l’aveuglement du service public, nettement moins curieux de pedigree de ses recrues ainsi que de leur public…

Le deuxième avertissement vient de la billetterie : les places ne sont pas vendues. Selon nos confrères de L’Informé, dix jours après la mise en vente des billets, seules sept cents places avaient trouvé preneur sur… 22 000 ! Décision est prise de fermer les tribunes supérieures et de vendre au maximum les places restantes.

Tribunes vides

C’est ainsi que ces JO ont débuté hier à 14 heures : dans un stade exsangue où les voix de chacun ne rencontraient presque que leur écho, Samuel Etienne et ZeratoR tentaient tant bien que mal de simuler un semblant de foule. Nous avons surtout eu de l’empathie pour les cameramen, obligés de cadrer bas pour cacher les tribunes vides. Le souvenir du GP Explorer et de ses 60 000 places vendues en trente minutes devait être amer…

Côté sportif, c’est désastreux. Il faut d’abord attendre près de quarante minutes de présentations d’équipes (et de règles extrêmement confuses) pour apercevoir un semblant de divertissement. Malheureusement, les participants sont tellement médiocres (sauf bien sûr les professionnels) queInterurbain cela ressemble à la NBA en comparaison. Le tennis de table nous plonge dans une douce torpeur, et on se prend à rêver aux soirées beer pong de l’année dernière, tandis que le saut en longueur nous ramène aux jours bénis des bacs à sable de notre enfance.

Ainsi, entre deux mille paniers manqués, on essaie de créer des « moments télé », notamment lorsque l’équipe des Juju Fitcats (la fiancée de Tibo InShape) n’a pas entendu le « prêt » du « attention-ready-go » pour le départ des soixante mètres. . A cet instant, l’intensité dramatique rappelle les apparitions les plus sensationnelles de l’inspecteur Derrick. Côté animation, Cécile Grès, journaliste sportive de France Télévisions, ainsi que Sami El Gueddari, Raphäl Yem et le Joueur du Grenier tentent de pimenter cette soupe tiède en déambulant dans le stade, sans succès.

Animation bancale

Samuel Etienne profite d’un millième temps d’arrêt pour se féliciter : « Ce qui est très intéressant, c’est que cet événement représente deux mondes, celui des médias traditionnels et celui des nouvelles plateformes. » ZeratoR s’en empare à la volée : « De nouvelles plateformes, Samuel, en tout cas… » Le présentateur de Question à un champion ne démonte pas et tente à plusieurs reprises de vanter les mérites d’associer ces deux « univers », notamment en rappelant qu’il s’agit du plus grand événement commun à la télévision et au stream. Ce qui ne semble absolument pas intéresser Adrien Nougaret, qui plaisante et s’étonne que les internautes passent leur samedi après-midi devant un écran. Atmosphère…

On sent clairement que cette animation à deux têtes ne fonctionne pas. Samuel Etienne, sans doute tiraillé entre son désir d’ouverture et un formatage télé plus prononcé, a souvent l’air perdu, tel un lapin pris dans les phares d’une voiture. ZeratoR, plus spontané, semble pourtant se cacher. Il faut dire que l’opportunisme ne se limite pas à la petite fenêtre. Comme expliqué dans Figaro Bastien Louessard, maître de conférences en sciences de l’information et de la communication à l’Université Sorbonne Paris Nord : « eEn plus de gérer leurs abonnés, les YouTubeurs sont incités par les annonceurs à créer des contenus qui ressemblent de plus en plus à la télévision, car il est plus rassurant pour eux d’avoir une idée de ce sur quoi ils mettent leur empreinte. marque. »

Ça tombe bien, dans cet océan de vide, il faut meubler, et si possible de manière dure et rapide. Grâce au logo Samsung par exemple, présent dans le coin droit de l’écran pendant près de huit heures. Mais surtout avec les trois parenthèses « Toyota Wheel Park », où Samuel Etienne fait mine de découvrir le skateboard et le breakdance, comme si Jack Lang était encore ministre de la Culture – tout en prononçant le plus possible le nom de la marque japonaise. Moment de nostalgie, ndlr : dans ces moments de solitude, on repense avec un peu de tendresse à HIP HOP Ou 40° à l’ombre, sur FR3. Et pourquoi ne pas revenir à l’ORTF ?

Dans le chat de Zerator, les onomatopées de « ZzzZ » se multiplient lors des creux et même si Samuel Etienne semble se contenter d’un pic de 37 000 téléspectateurs, pas tout à fait spectaculaire, il reste encore sept longues heures à patiner – alors qu’aucun sport d’hiver n’est représenté. Opération de séduction réussie ? Peut être. Quoi qu’il en soit, les commentaires dans le chat du streamer français sont plutôt enthousiastes, souvent reconnaissants envers le service public. Difficile pour nous d’y voir autre chose qu’un gros coup de relations publiques maladroit, ringard et ennuyeux, nous faisant regretter la diffusion d’un championnat régional de lancer de malles sur Antenne 2.

 
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