Attention, si vous avez peur, votre poney le ressentira ! Cet avertissement qu’elle entendait régulièrement lorsqu’elle était jeune cavalière dans un centre équestre de la métropole de Tours, Léa Lansade a décidé de le vérifier. Devenue éthologue au sein de l’équipe « Cognition, éthologie, bien-être animal » à l’INRAE de Nouzilly, elle lance une vaste étude de quatre ans pour déterminer si les chevaux peuvent réellement ressentir nos émotions. Les premiers résultats de ce projet, intitulé « Emoudour », tendent déjà à montrer qu’ils perçoivent des odeurs de peur, de joie et peut-être même de tristesse.
Expressions faciales et cœur qui s’emballe
Il y a un an, l’équipe lançait un premier appel à volontaires pour recueillir l’odeur de nos émotions. Rendez-vous dans un cinéma du centre-ville de Tours, avec un t-shirt dédié et des compresses sous les bras, pour des séquences de 20 minutes provoquant joie, tristesse, peur ou dégoût, ainsi qu’une séquence « neutre » pour contrôler des échantillons.
Conservés à -80°C, les échantillons ont ensuite été présentés à 60 poneys gallois de l’élevage INRAE. « A tour de rôle, on leur fait ressentir la même émotion trois fois de suite, ce qui provoque une certaine lassitude, et la quatrième fois un échantillon neutre. Si le cheval distingue l’émotion du témoin, il se remettra à renifler, faisant preuve de curiosité.”décrit Léa Lansade.
Fraîchement analysés, les résultats de cette première phase tendent à confirmer que les chevaux sentent bien l’odeur de la peur, qu’ils préféreraient les odeurs de la joie et qu’ils parviendraient à distinguer celle de la tristesse. Reste à savoir ce que provoquent chez eux ces émotions humaines.
On se reverra au cinéma. Pour un nouveau groupe de bénévoles… Mais aussi pour les chevaux. Un coffret avec écran a été spécialement conçu pour eux au centre de recherche de Nouzilly. “D’après des études précédentes, nous savons déjà que lorsque nous montrons des scènes avec des acteurs qui jouent différentes émotions, les chevaux y sont sensibles”note l’éthologue. Leurs réactions ont été captées par des caméras et des capteurs cardiaques. « Face à la peur par exemple, on voit les expressions du visage, très fines chez les chevaux, changer et le rythme cardiaque s’accélérer »illustre le chercheur.
L’objectif cette fois sera d’ajouter l’odeur correspondant à l’émotion exprimée à l’écran, pour voir si cela amplifie les réactions. « Cette fois, nous inclurons également les moutons dans le processus »ajoute Léa Lansade. Qui pourra bientôt dire à la jeune cavalière qu’elle était – et à bien d’autres – si les chevaux « sentent » ou non notre peur. Entre autres émotions.
Appel à volontaires pour le projet Emoudour
Pour mener cette nouvelle phase du projet, l’équipe a besoin de bénévoles pour prêter leurs émotions. Quatre séances de collecte sont organisées les mercredis matins, de 9h30 à 11h30, les 27 novembre, 4, 11 et 18 décembre, dans un cinéma de Tours.
Renseignements et inscriptions sur [email protected]