La dernière campagne publicitaire du gouvernement Legault, « Devenez enseignant ! », visant à « réévaluer la profession enseignante », a suscité de nombreuses critiques la semaine dernière.
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Précision importante : l’une des capsules de cette offensive à 1,5 million de dollars a suscité de nombreuses critiques. Celui dans lequel on voit Chloée Deblois, une influenceuse “positive” (c’est comme ça qu’on me l’appelait), interroger une vraie enseignante, “Sandrine”, sur son quotidien. Avec une musique rythmée digne de Pass-Partoutles clichés sont tous là, y compris les transgressions vénielles : Sandrine avoue avoir des favoris, recevoir des tasses en cadeau, et avoue avoir triché dans le passé, à l’école. Chemin faisant, nous énumérons sans subtilité les éléments alléchants de la dernière convention collective.
Le résultat est affligeant. De nombreux professionnels ont été témoins d’idées fausses bien trop courantes, notamment selon lesquelles à l’école primaire, il s’agit de « jouer » et de « faire des tâches ménagères ». Toute personne raisonnable qui s’inflige ces 95 longues secondes d’inconfort sera d’accord avec ce constat.
“J’aime les enfants”
Le ton « infantilisant », le côté « nunuche », pour reprendre les mots d’un enseignant interrogé Le journalce ne sont pas seulement des défauts de forme et de manière.
Qui voulons-nous exactement attirer avec cette capsule ? Le gouvernement doit recruter rapidement des candidats pour un métier abandonné très tôt par les jeunes et abandonné en masse par les nouveaux retraités.
Un universitaire du domaine éducatif m’a confié que le principal problème de la capsule est qu’elle s’adresse avant tout à ceux qui, de toute façon, songent déjà à « devenir enseignants » : des gens certes pleins de bonne volonté, mais qui ont souvent ce choix professionnel parce qu’ils « aiment les enfants », ce qu’ils ont découvert par exemple après une expérience d’assistant dans un camp de jour. Bien sûr, nous en avons besoin, mais si nous voulons lutter contre la pénurie, il faudra attirer d’autres types de candidats.
Sans guili-guili
Il faut le dire : le premier message de cette campagne a été réussi. Une enseignante qui parle sans guili-guili à ses élèves leur demande de sortir leurs cahiers de mathématiques. Des enfants disparaissent derrière des pupitres qui se lèvent. À leur descente, les étudiants sont devenus adultes et portent les vêtements des métiers qu’ils exercent.
Selon l’académicien cité plus haut, les recherches indiquent que « renforcer l’utilité sociale de la profession », c’est-à-dire la capacité à jouer un rôle clé dans l’avenir des étudiants, est plus efficace que les « mesures d’attraction financière ».
Alors pourquoi ne pas s’appuyer, dans la publicité, sur les témoignages de parents admiratifs de l’institutrice de leurs enfants ? Les adultes rendent-ils hommage aux enseignants qui les ont marqués ? Pourquoi ne pas voir un professeur au musée, au théâtre, à l’Assemblée nationale, etc., avec ses élèves ? Pourquoi ne pas y voir des professeurs inspirants, transmettant avec passion les connaissances qu’ils possèdent ? Ne me dites pas que c’est un idéal dépassé. Si tel était le cas, tout effort de « renforcement » échouerait. Peut-être avons-nous besoin d’un Ordre des Maîtres, qui en ferait un véritable métier ?