Après des années de souffrances liées aux violences conjugales, Carole Swartvagher a transformé son combat personnel en une initiative d’espoir pour d’autres femmes à travers la création du T-shirt Resist. Le 15 novembre 2024, elle participera au gala de charité de l’association Elles Imagine, dix jours avant la Journée internationale pour l’élimination des violences à l’égard des femmes le 25 novembre 2024.
Carole Swartvagher nous explique le chemin qu’elle a parcouru vers sa reconstruction à travers l’élaboration de ce vêtement qui symbolise la résilience, mais aussi le soutien aux femmes qui souffrent et tentent de se reconstruire.
Culture Franceinfo : Pourquoi vous participez au gala de l’association le 15 novembre à la mairie de Paris ?
Carole Swartvagher : Je suis victime de violences conjugales depuis plus de trente ans. Fin 2020, l’association Ils imaginent il m’a aidée à sortir de cet enfer, à mettre des mots sur ce que j’avais vécu, à en comprendre le mécanisme… Il m’a soutenu et continue de le faire. Elle fait partie de celles qui m’ont permis d’envisager la vie d’après, d’apercevoir une lumière au bout du tunnel. Il était important d’être à leurs côtés, de témoigner et de leur rappeler qu’ils ne doivent pas baisser les bras.
Le gala est intitulé Les combattantscela me définit : je me bats pour ma liberté et celle de toutes les femmes qui vivent ce cauchemar. Acquérir sa liberté est un véritable parcours du combattant. Ce gala permettra de découvrir le travail de soutien mené par l’association, le chemin parcouru par les victimes de violences conjugales, et de sensibiliser davantage de personnes. Elle réunira des personnes d’horizons différents, démontrant que les violences conjugales touchent tous les milieux sociaux, sans distinction.
Quel est le rôle de l’association ?
L’association soutient les femmes victimes de violences conjugales et leurs enfants en leur proposant un accompagnement. Elle brise l’isolement de ces personnes en les accueillant, en les écoutant et en les soutenant psychologiquement, en les accompagnant dans leurs pratiques juridiques, administratives et sociales, en les aidant ainsi que leurs enfants à se reconstruire, en informant l’opinion publique et en luttant contre les idées reçues sur les violences conjugales. , en donnant aux professionnels les outils pour mieux agir et en organisant des actions de prévention dans les écoles et les entreprises.
Quel est le but de ce gala ?
C’est un gala d’anniversaire, l’association fête ses trente ans d’existence. Cet événement célébrera ses années d’engagement et rappellera l’importance de continuer à se mobiliser. Ce gala de charité permettra d’allouer davantage de ressources financières pour venir en aide aux victimes de violences. Les dons contribueront notamment à augmenter la capacité d’accueil de l’association, à renforcer l’accompagnement des femmes victimes, leur accompagnement psychologique et juridique et à continuer de développer l’accompagnement des covictimes mineures, même lorsqu’elles deviendront majeures.
Pourquoi Maïva Hamadouche, Bénédicte Haubold, Christelle Taraud, Axel Lattuada et Alissa Wenz sont-ils présents à l’événement ?
Ils sont tous impliqués dans ce combat : la boxeuse et policière Maïva Hamadouche s’engage à venir en aide aux femmes victimes de violences conjugales en leur donnant des cours de boxe, car le sport l’a aidée dans sa vie à garder la tête haute, à ne jamais baisser les bras. L’auteure et interprète Bénédicte Haubold, elle-même victime de violences conjugales, raconte dans Mes illusions perdues l’histoire d’une reconstruction.
L’historienne Christelle Taraud, à travers son œuvre Féminicides – Une histoire mondialeretrace la suprématie du mâle sur la femelle à travers les siècles. Elle dit : « Nommer les choses, c’est faire leur histoire, c’est aussi leur donner une existence ». L’auteur Alissa Wenz a écrit dans son roman « Trop aimer » sur l’influence de l’amour.
L’acteur, auteur, monteur et réalisateur Axel Lattuada, derrière la chaîne YouTube Et personne ne s’en soucieaborde les questions d’actualité qui font l’objet de débats. Elle parle du féminisme, soulignant l’importance de s’unir autour de cette cause : «Alors évidemment, c’est aux femmes d’abord de promouvoir le féminisme, mais si vous êtes un homme, cela ne vous empêche pas d’être une alliée.»
Dans quelles circonstances avez-vous découvert cette association ?
En 2020, mon ex-mari a été signalé anonymement aux services sociaux pour violences verbales, psychologiques et physiques envers ses enfants. On nous a écouté et on nous a dit que ce que nous vivions (banalisé par mon ex-mari) était inacceptable, même si je n’avais osé exprimer qu’une petite partie de ce qui se passait par peur des représailles. Les services sociaux m’ont fortement conseillé de contacter une association. Je l’ai choisi parce qu’il était proche de chez moi et j’ai aimé son nom pour l’espoir qu’il évoque.
Quel message vous permet d’affronter le quotidien aujourd’hui ?
« Résister » est le mot que je me répète chaque jour pour survivre avec ce mantra : « Surmonter la peur, croire en soi, avancer malgré tout, résister. »
Votre renaissance s’est faite grâce à la mode, qui a toujours été présente dans votre parcours professionnel…
Après avoir étudié à la Chambre syndicale de la couture Parisienne, dans les années 90, j’ai travaillé dans les ateliers de haute couture d’Olivier Lapidus et Christian Lacroix, puis dans le prêt-à-porter de Lolita Lempicka et Elisabeth de Senneville, mais aussi dans un style bureau du Sentier et également costumes de scène. Ensuite, j’ai dû arrêter pour cause de maladie.
Vous avez été auteur, illustrateur et président de Minimonde, maison d’édition de livres pour enfants.
Minimonde fait partie de mes années de contrôle total, puisque mon ex-mari dirigeait la partie administrative de ma maison d’édition et contrôlait ma vie depuis mes 17 ans. Cette maison d’édition est née de mon envie de jeune de posséder un livre sur l’histoire du costume que je n’avais pas trouvé. J’ai créé Minimonde en 2009 pour publier mes ouvrages sur l’évolution des coutumes à travers l’histoire, et j’en suis toujours en charge. Mes œuvres continuent de se vendre, notamment au musée Yves Saint Laurent.
Comment passe-t-on de l’édition à la création Habits à la française, votre marque de slow fashion ?
J’ai toujours été passionnée par la mode et ce qu’elle dit de nous, les hommes. Je crée des vêtements depuis mon enfance. J’ai ressenti le besoin de réaliser un rêve “interdit” lorsque mes enfants et moi en avons dit assez avec la violence. Les tribunaux ont mis en place des mesures pour nous protéger de mon ex-mari. Après avoir tout déconstruit, j’ai dû me reconstruire… Moitié, ce sont les initiales d’Habits à la française, un hommage à l’histoire de la mode française.
Pour créer ce modèle vous avez lancé une campagne de financement participatif Ulule.
D’un point de vue financier, c’est très compliqué. Mon ex-mari m’avait rendue totalement dépendante. Le coût des procédures judiciaires est exorbitant. J’ai découvert cette opportunité de financement grâce à mes enfants. Ce fut un succès, nous avons dépassé notre objectif en mars/avril 2024 avec 82 participations.
100% coton certifié, ce t-shirt est conçu à Paris et confectionné dans un atelier marseillais qui promeut une économie solidaire et sociale.
Oui, pour moi, il est très important de promouvoir une économie solidaire et sociale, car je ne peux pas imaginer une mode qui ne respecte pas l’environnement et les droits des travailleurs. La mode est à repenser tout comme notre façon de consommer.
Que représente ce t-shirt dont vous avez dessiné le slogan ?
Un premier modèle engagé, porteur d’un message. Il symbolise le combat pour la liberté et la défense des femmes, la solidarité, l’entraide, la générosité… Croire en soi, en l’avenir, ne pas avoir honte, prendre du recul pour mieux avancer, résister, résister… Se transformer en négatif situation en quelque chose de positif et voir une lumière en enfer.
Est-ce plus qu’un vêtement, est-ce un symbole de solidarité ?
Oui, tout a commencé depuis l’événement Twitch : “Nous sommes Furax”, en février 2023, organisée pour récolter des fonds pour Elles imaginent. Je n’avais pas les moyens de contribuer financièrement alors j’ai eu l’idée de confectionner un t-shirt. Une partie des bénéfices des ventes est reversée à l’association. Mon combat se transforme en un combat plus grand, pour apporter un message de liberté et de courage.