Gravement blessé par balle alors qu’il n’était pas le suspect recherché, il accuse la BRI de Dijon de « tentative d’assassinat »

Gravement blessé par balle alors qu’il n’était pas le suspect recherché, il accuse la BRI de Dijon de « tentative d’assassinat »
Gravement blessé par balle alors qu’il n’était pas le suspect recherché, il accuse la BRI de Dijon de « tentative d’assassinat »

Un Besançon d’une trentaine d’années a été grièvement blessé à la poitrine en juin 2023, lors d’une intervention policière. Un an plus tard, son avocat se plaint de la lenteur de la procédure judiciaire. Toutefois, l’enquête de l’IGPN va dans le sens de la victime.

23 juin 2023, quartier Planoise à Besançon. A l’aube, une colonne de 10 policiers de la BRI (brigade de recherche et d’intervention) de Dijon et de trois policiers de Besançon se sont positionnés derrière la porte d’un appartement. Ils recherchent un suspect, potentiellement armé et dangereux.

Avant qu’ils n’attaquent, un chien, qui a dû flairer la police, aboie à l’intérieur de la maison. L’occupant de l’appartement, alerté, se lève, torse nu, regarde par le judas et ne voit rien – la police a bouché le judas. Il ouvre alors la porte… Et reçoit une balle, tirée par un policier de la BRI.

Cette balle touche Emmerick D. à la sixième côte gauche. Elle passe “quelques centimètres en dessous de son cœur”, explique son avocat. Son pronostic vital est compromis, il est transporté en urgence à l’hôpital. Il se rétablira après avoir été opéré, se verra prescrire deux mois d’ITT et, aujourd’hui encore, porte un « impuissance fonctionnelle du bras gauche ». Cependant, Emmerick D. n’était pas armé et il n’était pas le suspect recherché par la BRI ce jour-là.

Cette affaire a été révélée il y a quelques semaines par plusieurs médias (RMC, Libé, Mediapart, Le Monde…). L’avocat d’Emmerick D., Maître Christophe Bernard, se plaint de délais de procédure qu’il juge excessivement longs.

En effet, presque un an jour pour jour après les faits, aucune poursuite n’a été engagée contre le policier ; aucune date de procès n’a été fixée ; aucune perspective envisagée à l’heure actuelle pour son client.

Comme dans toute affaire dite de « violences policières », une question domine cette affaire : le tireur de la police a-t-il agi en état de légitime défense, ou a-t-il tiré de manière abusive ? Si dans certains cas la réponse est floue, ce n’est pas le cas d’Emmerick D.

Immédiatement saisie du dossier, l’IGPN, la « police police », a rendu ses conclusions “accablant” envers le tireur, constate maître Christophe Bernard, interrogé le 6 juin par France 3.

L’IGPN a conclu que le policier n’était en aucun cas obligé de tirer sur mon client.

Christophe Bernard

avocat d’Emmerick D.

« Premièrement, mon client ne pouvait pas soupçonner qu’il s’agissait de la BRI, car son badge est dans le dos et non sur la poitrine. Ensuite, le judas a été bloqué. Finalement, il n’y a eu aucun avertissement. “ L’avocat réclame une vidéo, enregistrée par l’un des policiers de Besançon ayant participé à cette opération.

Sur la vidéo, on voit que lorsque la porte s’ouvre, à peine 10 secondes s’écoulent avant que le tournage n’ait lieu. Et il n’y a rien, pas de « s’allonger », pas de « rester immobile », pas de « police »… Rien.

Christophe Bernard

avocat d’Emmerick D.

Or, ce n’est pas ce qu’a dit le policier en question. Le Monde, qui a eu accès au procès-verbal de l’audience libre, rapporte ses propos : « J’ai utilisé mon arme pour protéger ma vie et celle de mes collègues, étant donné que j’avais ordonné à l’individu de ne pas bouger, qu’il ne pouvait ignorer que j’étais policier et que ses gestes me faisaient penser qu’il allait utiliser une arme à feu.

Des explications qui ne convainquent pas l’IGPN. Toujours selon Le Monde, qui a consulté une partie du rapport de police, le rapport conclut ainsi :

« Le contexte tendu, un recul ou une main cachée [celle d’Emmerick D., ndlr] ne semblent pas suffisants pour justifier ici ni la légitime défense (…) ni l’usage d’une arme à feu par la police.

conclusions de l’IGPN

cité par le journal Le Monde

► A LIRE AUSSI : Violences policières à Dijon : deux policiers nationaux condamnés, ils font appel (novembre 2023)

Ces conclusions de l’IGPN ont été renvoyées le 17 janvier 2024 au parquet de Besançon, chargé de l’enquête. Le 7 février, le procureur a informé les avocats des deux parties qu’il ouvrait une « fenêtre procédurale », “c’est-à-dire qu’il nous envoie la procédure et nous demande ce que nous voulons faire”explique Christophe Bernard.

L’avocat d’Emmerick D. dresse ses conclusions 15 jours plus tard et les renvoie au parquet fin février 2024. « Depuis, je n’ai ni son, ni image. »

Sans nouvelles du parquet, Emmerick D. et son avocat ont donc décidé de porter plainte fin avril 2024. Le mobile est grave : tentative de meurtre. “Pour des raisons simples”» argumente Maître Bernard. “Il n’y a pas eu d’avertissement, le tir a été concomitant à l’ouverture de la porte, il a touché mon client dans une zone létale, et l’IGPN a tiré des conclusions claires : il n’y avait pas lieu de tirer !”

Suite à cette plainte, une information judiciaire a été ouverte. Mais Christophe Bernard juge ce temps de réaction très long, trop long. “Le procureur de Besançon affirme qu’il s’agit d’un délai “classique”, mais en même temps pour une autre affaire de violences policières à Marseille, quelques jours seulement se sont écoulés entre les faits et la saisine du policier !”

► A LIRE AUSSI : Violences policières à Marseille : un policier de Bac placé en détention provisoire (juillet 2023)

Le parquet de Besançon a-t-il couvert la BRI de Dijon ? “Oui, je le dis”affirme Christophe Bernard. “Pourquoi? Parce que la BRI est composée de policiers spécialisés appelés sur des incidents « chauds » et spécifiques, parce qu’on n’en a pas beaucoup à Besançon, parce qu’il faut les faire venir de Dijon… » Volonté stratégique de préserver les troupes ? Contacté, le procureur de la République de Besançon Étienne Manteaux n’a pas encore répondu à nos sollicitations.

De son côté, le policier en question est défendu par Maître David Kahn, avocat au barreau de Sens spécialisé dans la défense des forces de l’ordre.

Je ne suis pas autorisé à parler car ce n’est pas encore une affaire publique. Certains avocats le font, mais pas moi.

David Kahn

avocat du policier BRI de Dijon

J’aimerais vous répondre, d’autant plus que je vois beaucoup de choses dans -, mais je ne veux pas être poursuivi pour violation du secret de l’enquête.», ajoute David Kahn, contacté par France 3.

Emmerick D. espère qu’une procédure sera engagée, “que son dossier ne soit pas laissé au placard”, transmet son avocat. Il attend aussi, plus prosaïquement, une compensation. « En cas d’accident de la route, les compagnies d’assurance ont quatre mois pour proposer une indemnisation. Or, dans notre cas, l’État ne se soucie pas de la santé de mon client.

Selon Christophe Bernard, son client, qui effectuait auparavant diverses missions d’intérim, n’a pas “Je n’ai pas pu travailler du tout depuis un an.” “Et quand on a une impuissance fonctionnelle, autant dire qu’il est impossible de trouver du travail.” Après avoir été un temps indemnisé au chômage, Emmerick D. bénéficie désormais du RSA. “Et il pourra être obligé d’entreprendre des démarches pour obtenir l’AAH, l’allocation aux adultes handicapés.” Emmerick D. et son avocat espèrent obtenir un retour du parquet, et l’ouverture des poursuites, d’ici août 2024.

 
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