«Dès que j’ai pu rendre à la France ce qu’elle m’avait donné, je l’ai fait»

Dans une première vie, Marc Ladreit de Lacharrière était un homme d’affaires avisé qui a fait fortune en prenant le contrôle de Fitch, l’agence de notation. Mais le fringant patron n’est pas du genre à compter ses millions. Il s’invente alors d’autres vies, notamment en développant une passion pour les arts premiers – une galerie du musée du quai Branly porte son nom – en créant Fimalac, une société qui investit dans le spectacle vivant, qui produit aujourd’hui la plupart des concerts de la scène française. .

Mais Marc Ladreit de la Charrière, 83 ans, veut aussi aider les jeunes. Il lance ainsi en 2006 sa Fondation Culture & Diversité, « pour donner accès aux arts et à la culture aux jeunes issus de milieux modestes », qui depuis 2020 est sous la bannière de la Fondation Marc Ladreit de Lacharrière et sur laquelle il ne s’était jamais prononcé. jusque là. L’octogénaire et ses quatre enfants ont financé l’entreprise, avec l’envie de monter des projets destinés à cette jeunesse souvent perdue. « Avec trois piliers essentiels », précise l’homme d’affaires : participer, dialoguer et créer. L’engagement est la contrepartie naturelle de la réussite professionnelle. Avoir des idées ne suffit pas, il faut agir.

Grand Corps Malade

Depuis son lancement, la fondation a aidé plus de 56 000 enfants, principalement issus des banlieues, grâce notamment à des programmes destinés à les préparer aux grandes écoles. « C’est une question de cohésion sociale, rappelle Ladreit de Lacharière. Pour faire avancer sa cause, Marc a par exemple lancé le Trophée Slam à l’école, sous le parrainage de Grand Corps Malade, ou encore le Trophée Improv Culture & Diversité avec Jamel Debbouze. « C’est un homme de cœur, dit Grand Corps Malade. Et des convictions. Avoir quelqu’un qui, dans ce type de projet, tient parole, c’est un miracle. »

Marc Ladreit de Lacharrière in his office.

Paris Match / © Alexandre Isard

Artistes, producteurs, ministres, personne ne conteste l’implication essentielle ces dernières années de Marc Ladreit de Lacharrière dans les projets les plus fous et les plus courageux. Il compte parmi ses soutiens Anne Hidalgo mais aussi Rachida Dati, Audrey Azoulay ou encore Jack Lang, ménageant susceptibilités et egos. Lui, qui fut proche de Chirac, refuse néanmoins de prendre toute position politique. « Je ne suis pas socialiste, c’est sûr. L’homme politique fait ce qu’il peut, souvent avec des moyens limités. Heureusement qu’il y a des gars comme moi pour aider, participer… »

François Pinault et Bernard Arnault ont créé des musées, j’investis autrement

Marc Ladreit de Lacharrière

Marc Ladreit serait donc un saint homme et un bienfaiteur des arts ? Difficile de lui trouver des ennemis, tant le monsieur profite de cette nouvelle évolution dans sa vie professionnelle. « C’est quand même quelqu’un qui a beaucoup d’ego », confie sous couvert d’anonymat un ancien collaborateur de Fimalac. Mais franchement, le monde de la culture a plus que jamais besoin de mécènes comme lui.

Le reste après cette annonce

Marc Ladreit de la Charrière réfute les comparaisons avec François Pinault et Bernard Arnault, « Ils ont fait des musées, moi j’investis différemment », mais le mécène ne rougit pas quand on lui parle de son utilité. « Je sais d’où je viens, je sais ce que je dois à la République. Alors oui, je ressens comme un véritable devoir de ne jamais l’oublier. »

Marc continuera donc tant qu’il le pourra à financer la rénovation du Louvre, à aider l’Académie des Beaux-Arts, à s’intéresser au prix de l’audace artistique et culturelle. En publiant « La revue des deux mondes » ou en rénovant la grotte Chauvet. Insatiable, il sera évidemment dans les tribunes du Stade de France en septembre prochain pour assister au concert de Mylène Farmer, produit par Fimalac. « C’est quand même fou, s’amuse-t-il, que Thomas Jolly, l’un des metteurs en scène les plus appréciés du théâtre public, soit venu nous voir pour créer « Starmania ». Et qu’il soit responsable des cérémonies des Jeux Olympiques. Inutile de demander au patron quelle partie de sa vie il préfère. C’est évidemment la prochaine.

Avec Jamel Debbouze au Jamel Comedy Club, à Paris, le 22 mai.

Paris Match / © Alexandre Isard

Paris Match. D’où vient votre besoin en transmission ?
Marc Ladreit de Lacharrière.
De par mon éducation, cela n’a rien d’original, mais je fais partie d’une lignée qui a toujours eu des valeurs fortes. Notre volonté a toujours été de les préserver et de les transmettre. J’ai réussi à m’évader d’un monde provincial, mon Ardèche natale, sans moyens financiers mais avec un milieu familial extrêmement solide et donc la possibilité d’intégrer de grandes écoles. Cela a été pour moi un vivier privilégié, j’ai pu accéder tout de suite au jeu professionnel grâce à mes études universitaires. Et à partir de là, j’ai pu démontrer qu’avec simplement de l’huile de coude, des bras et un bon intellect, on pouvait réussir. Dans ma jeunesse, j’ai vu aussi que les gens de banlieue n’avaient pas les mêmes opportunités que moi. Or si ma réussite professionnelle est peut-être due à mes talents, elle vient aussi du fait que je suis née en France où il existe une véritable méritocratie républicaine. Alors dès que j’ai pu rendre à ma manière ce que la France m’avait donné, je l’ai fait.

Avec Jamel Debbouze au Jamel Comedy Club, à Paris, le 22 mai.

Paris Match / © Alexandre Isard

Par la Fondation Culture & Diversité ?
Oui, notamment. Il est fait pour montrer que tout est possible. Depuis que des jeunes issus des milieux les plus modestes ont réussi à entrer dans le secteur culturel grâce à ce que nous leur proposions, alors qu’ils pensaient que ces activités n’étaient pas pour eux ! Nous avons formé des sculpteurs, des conservateurs, des cinéastes… Nous leur avons donné une ouverture sur le monde, nécessaire pour rêver grand. Et pour cela, il faut avoir les yeux ouverts et anticiper les métiers de demain. Regardez ces jeunes qui ont lancé des start-up il y a vingt ans et qui ont fait fortune depuis !

J’ai toujours pensé qu’il fallait avoir une conscience sociale

Marc Ladreit de Lacharrière

Que vous a apporté la culture ?
Je vais vous répondre dans l’autre sens : je ne me suis jamais reconnu dans une société où le profit était l’objectif des entreprises et où la consommation des citoyens était la finalité de l’entreprise. J’ai toujours pensé qu’il fallait avoir une conscience sociale. Et donc, quelque part, un entrepreneur doit mener une double vie ! L’une au service de son entreprise, l’autre au service de la ville. Et à partir de cette idée, j’ai fait des choix, en investissant dans le domaine de la culture et celui de la santé. La culture donne avant tout une immense confiance en soi car elle nous met face à la créativité humaine. Et c’est ce qui permet de s’épanouir encore plus. Et sur le plan personnel, la culture m’a toujours apporté beaucoup de plaisir.

Avec le conseiller politique et homme d'affaires, Alain Minc, partenaire tennis chez Polo, à Paris.

Avec le conseiller politique et homme d’affaires, Alain Minc, partenaire tennis chez Polo, à Paris.

©DR

Si vous deviez choisir une œuvre, un livre ou un film qui vous a réellement marqué profondément, lequel serait-ce ?
Ah, je n’aime pas répondre à ce genre de questions ! Mais un film comme « Les Chariots de Feu » m’a profondément marqué car il montre comment on peut connaître une réussite exceptionnelle tout en respectant les autres. C’est presque un film qui a conditionné ma vie professionnelle, car il porte le message qu’on peut réussir, avoir une ambition presque démesurée tout en respectant un certain nombre de valeurs…

Et avec son épouse Véronique Morali, originaire de Victoria Peak à Honkong.

©DR

Vous avez toujours refusé de reverser les sommes allouées aux projets que vous soutenez. Pour quoi ?
Parce que tout est relatif. Un milliardaire qui donne 200 000 euros ne peut pas être mis sur le même plan que quelqu’un qui gagne 100 000 euros par an et donne 1 500 euros… La mise en avant des sommes données par chacun n’est jamais mise en avant. parallèlement à ce qui est gagné. Je trouve qu’il est plus important de savoir si, avec l’argent que vous donnez, vous pouvez garantir que moins de femmes meurent de maladies cardiaques. Fimalac représente 4,5 milliards d’actifs et la famille Ladreit de Lacharrière en a reversé 10 % à la Fondation Marc Ladreit de Lacharrière.

Que voudriez-vous que les gens retiennent de votre action ?
Que j’ai apporté ma petite contribution à une société plus humaniste, plus philanthropique et plus humaine.

 
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