le combat quotidien d’un village pour la reconstruction

Il y a trois mois, le calme qui régnait à Yaféra, petit village agricole niché à quelques kilomètres de Bakel, a été violemment perturbé par des inondations d’une ampleur sans précédent. Même si les habitants ont eu la chance de ne signaler aucune perte humaine, les conséquences matérielles ont été dévastatrices. Depuis, la vie de cette communauté s’est transformée en un combat quotidien, où chaque jour est un pas de plus vers la reconstruction.

A Yaféra, la terre est le fondement de tout. Les champs d’arachides et de riz nourrissent les familles et constituent leur principale source de revenus. Mais cette année, les récoltes ont disparu sous les eaux.

Adama Timéra, fils du chef du village et agriculteur, décrit la situation avec une profonde tristesse : « Nous n’avons rien pu sauver. Pas une seule cacahuète. Même le foin que les femmes ramassaient pour les animaux a été emporté. » Sans récoltes à sauver, les greniers restent désespérément vides et l’insécurité alimentaire s’installe. Pire encore, le prix de l’arachide, désormais fixé à 1 000 FCFA le kilo, rend l’accès à la nourriture encore plus difficile.

Malgré tout, certains habitants tentent de se remettre sur pied en se tournant vers les cultures de contre-saison, comme la patate douce ou le haricot. Mais ces efforts, bien que louables, sont loin de répondre aux besoins croissants de la communauté.

Les maisons, construites en terre crue, n’ont pas résisté à la violence des intempéries. Sur 74 maisons endommagées, 26 sont devenues inhabitables, tandis que les autres sont marquées de profondes fissures, menaçant de s’effondrer à tout moment. De nombreuses familles vivent aujourd’hui dans des tentes fournies par les associations locales et l’État du Sénégal. “Ces tentes ne sont pas faites pour durer”, déclare Khalilou Keita, sinistré. « La nuit, il fait un froid glacial, et le jour, c’est une véritable fournaise. »

Ces conditions de vie précaires exposent les habitants à des problèmes de santé croissants. Une seule toilette est disponible pour toutes les familles vivant dans les tentes, ce qui augmente le risque de maladies telles que la diarrhée et les infections cutanées. Cependant, la solidarité entre les villageois reste forte. Les familles partagent le peu qu’elles ont et, malgré les difficultés, les enfants continuent d’aller à l’école.

Préoccupations

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Mais à l’approche du Ramadan, les inquiétudes deviennent plus pressantes. « Nous n’avons aucun moyen de conserver la nourriture. Avoir un réfrigérateur changerait tout », confie Ibrahima Traoré qui, comme beaucoup d’autres, peine à entretenir une lueur d’espoir sous ces bâches de fortune.

Dans ce contexte difficile, la communauté s’organise. Amada Timéra, responsable de la commission des inondations, travaille sans relâche pour mobiliser les ressources et répondre aux besoins les plus urgents. « Nous faisons de notre mieux, mais nos moyens sont limités », explique-t-il. Des experts et fils du village, comme Mamadou Bouna Timéra, géographe à l’Université Cheikh Anta Diop, ont proposé des solutions durables : construction de bassins de rétention, amélioration des infrastructures et réaménagement des zones résidentielles. Cependant, ces projets nécessitent un financement important, qui se fait attendre depuis longtemps.

À l’approche de la prochaine saison des pluies, l’anxiété grandit. « Si rien n’est fait, on risque de revivre le même cauchemar », prévient Adama Timéra. Les priorités sont claires : reconstruire des maisons solides, améliorer les conditions sanitaires et sécuriser l’accès à l’eau potable. Mais pour cela, la communauté a besoin de soutien.

Malgré tout, les habitants de Yaféra gardent confiance en l’avenir. Ils puisent leur force dans leur solidarité et l’aide de leurs proches vivant à l’étranger. « L’État a apporté un début de solution, mais cela ne suffit pas », déclare Boubacar Babi, agriculteur sinistré. « Ce que nous voulons, ce n’est pas la charité, mais les moyens de nous relever. »

Dans ce village marqué par la misère, l’envie de se reconstruire est palpable. Khalilou Keita résume l’état d’esprit de ses voisins : « On ne demande pas grand-chose. Juste une chance de remettre nos vies sur les rails. »

Yafféra est aujourd’hui un symbole de résilience et d’espoir. Avec un soutien approprié et des actions concrètes, ce village pourrait redevenir le havre de paix qu’il était autrefois.

Papa Abdoulaye SY, envoyé spécial à Bakel

 
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