La pénurie d’enseignants se fait sentir, notamment dans l’enseignement spécialisé. À Sorel-Tracy, deux groupes d’une école primaire ont vu différents enseignants défiler devant eux depuis un mois, faute d’enseignants disponibles. Cette instabilité pèse non seulement sur les étudiants, mais aussi sur les enseignants.
Au cours des dernières semaines, deux enseignants ont dû s’absenter de l’école primaire Maria-Goretti de Sorel-Tracy. Une situation qui peut se produire dans toutes les écoles du Québec, mais qui devient plus complexe avec la pénurie d’enseignants.
Parce que le centre de services scolaire de Sorel-Tracy (CSSST) a eu du mal à trouver des enseignants pour une classe de 2e année et une classe d’éducation spécialisée. Pendant plusieurs semaines, si aucun remplaçant n’est disponible, les enseignants de cette école enseignent à tour de rôle.
Les étudiants peuvent avoir cinq professeurs différents par jour. Ce n’est pas facile, ni pour les étudiants ni pour les professeurs.
Lisette Trépanier, president of the Bas-Richelieu Education Union (FSE-CSQ)
“Malheureusement, avec la pénurie, nous assistons à des choses comme celles-là que nous n’aurions pas vues il y a seulement quelques années”, ajoute-t-elle.
Chaque école choisit la manière dont se fait le dépannage, explique le président du syndicat. Dans cette école, s’il n’y a pas de volontaire pour remplacer pendant une période, on procède par tirage au sort.
« C’est sûr qu’il y a des bénévoles, mais il n’y en a pas tout le temps, parce que ça dure depuis longtemps », explique Lisette. Trépanier.
« Il y a des enseignants qui sont occupés à temps plein avec leurs cours et qui ont besoin de temps libre pour se préparer. Ce n’est pas qu’ils soient de moins bons professeurs, mais les capacités des uns et des autres ne sont pas les mêmes », poursuit-elle.
Le centre de services scolaire explique que le titulaire du groupe de 2e année a quitté sa classe il y a un mois et qu’elle sera remplacée ce lundi. En éducation spécialisée, nous recherchons depuis deux mois un enseignant pour les élèves. Le poste affiché précise qu’il s’agit d’étudiants ayant une déficience intellectuelle avec ou sans trouble du spectre autistique.
Une technicienne en éducation spécialisée a assuré une « stabilité » aux élèves, mais « le contexte actuel représente un défi » pour trouver un enseignant, écrit Joey Olivier, responsable des communications du CSSST.
Ces dernières années, la pénurie d’enseignants a été particulièrement criante dans l’enseignement spécialisé.
La directrice générale de la Fédération québécoise de l’autisme, Lili Plourde a cosigné l’année dernière une lettre ouverte pour dénoncer le fait que le manque de personnel touche particulièrement les étudiants handicapés ou en difficulté d’adaptation ou d’apprentissage (EHDAA).
“La situation n’est pas plus facile que l’année dernière”, déclare M nowmoi Plourde.
En avril dernier, il y avait 2 500 EHDAA en situation de rupture de service, souligne-t-elle.
« C’est énorme. La situation sur le terrain ne s’améliore pas vraiment », déplore-t-elle.
Un « système d’urgence » galvaudé
Selon les plus récentes données du ministère de l’Éducation, il reste encore 1 461 postes d’enseignants à pourvoir dans les écoles du Québec.
Le dépannage se veut un système d’urgence que l’on utilise désormais trop fréquemment, souligne Richard Bergevin, président de la Fédération des syndicats de l’éducation (FSE).
Ces dernières années, avec la pénurie, [le dépannage] a augmenté de façon spectaculaire. C’est parfois une manière de gérer les remplacements, car il y a très peu de remplaçants sur les listes.
Richard Bergevin, président de la Fédération des syndicats d’enseignants (FSE)
Si aucun remplaçant n’est disponible, les enseignants peuvent être obligés de faire du dépannage, un peu comme les heures supplémentaires obligatoires. Dans ce cas, le salaire d’un enseignant à temps plein est augmenté. Mais le salaire ne fait pas tout, indique le président de la FSE.
« Il est plutôt rare que des enseignants à temps plein déclarent se porter volontaires pour remplacer. La tâche est déjà lourde», affirme M. Bergevin.
L’année dernière, le Vérificateur général du Québec soulignait dans son rapport que « la diminution de la qualité de l’éducation est l’une des principales conséquences de la pénurie qui ont été identifiées par de nombreux acteurs de l’éducation. […]. »
À la Fédération des comités de parents du Québec (FCPQ), on indique que la pénurie d’enseignants ne semble pas frapper si fort cette année.
« Ce n’est pas tant pour les enseignants qu’on reçoit des appels, mais pour le personnel de soutien », note Mélanie Laviolette, présidente de cette fédération.
A la FSE, on affirme que la pénurie est « une situation permanente de pression indue sur les enseignants ». «Ça crée un problème au quotidien», estime M. Bergevin.