Les élèves d’une école secondaire de Montréal en ont assez d’échouer ou de devoir payer des cours particuliers à cause d’un professeur de mathématiques et de sciences désordonné et créationniste qui est en poste depuis quatre ans.
« La moitié de la classe pense qu’elle ne réussira pas ses mathématiques ou n’obtiendra pas son diplôme d’études secondaires cette année », a déclaré Doryan Pansanel, 16 ans.
Il fait partie des jeunes qui ont récemment créé un « syndicat étudiant » à Robert-Gravel, une école spécialisée en théâtre et située dans le quartier du Mile-End.
Depuis quatre ans, les étudiants se plaignent d’un professeur qualifié qui enseigne si mal la matière qu’ils doivent se débrouiller seuls.
Marqueur en mille morceaux
Tout a culminé le 10 octobre, lorsque l’enseignant a perdu patience, traitant les jeunes d’« imbéciles », puis a lancé un marqueur qui s’est brisé en morceaux, racontent les élèves.
Vendredi, une vingtaine de jeunes de quatrième et cinquième secondaire se sont rassemblés devant l’école pour exprimer leurs doléances.
En soirée, une lettre collective a été envoyée à la direction, au Protecteur de l’élève ainsi qu’au Centre de services scolaire de Montréal (CSSDM), incluant La Revue j’en ai reçu une copie.
Pas avant le mariage
Depuis trois semaines, l’incompétence de certains enseignants ne cesse de faire la Une des journaux, dans la foulée de l’affaire Bedford.
Chez Robert-Gravel, l’enseignant problématique a suscité des plaintes dès son arrivée en 2021.
En cours de sciences, par exemple, il aurait dit que Dieu avait créé la Terre. « En matière de reproduction, il nous disait qu’on ne pouvait pas avoir d’enfants avant le mariage », illustre Shaïma Mouhli, 16 ans.
En mathématiques, les élèves disent ne rien comprendre par manque de structure et de pédagogie.
L’an dernier, Mika Dupuis avait obtenu une note de 49 % à sa première étape. Après avoir consulté un professeur particulier, elle réussit l’examen ministériel à 80 %.
Incohérences
L’enseignant aurait aussi tendance à attribuer une note différente à deux élèves pour une même réponse ou à choisir au hasard des élèves pour les faire sortir de la salle et signifier son autorité, illustrent les jeunes interrogés.
«Je suis allée voir la direction une cinquantaine de fois depuis le secondaire 2», à propos de cette enseignante, estime Shaïma.
Ce qui rend les jeunes particulièrement cyniques, c’est le fait qu’année après année, ils sont affectés à des classes ordinaires et non enrichies.
De nombreux jeunes trouvent dommage de devoir cibler un enseignant en particulier, rappelant au passage le manque flagrant de personnel dans les écoles.
« Nous ne sommes pas en colère contre lui [l’enseignant]», dit Mika, précisant qu’il n’est pas une mauvaise personne.
« Il n’est tout simplement pas compétent », soupire Shaima.
De son côté, le CSSDM indique que le comportement dénoncé par les étudiants est inacceptable et qu’un suivi a déjà été effectué auprès du salarié concerné.
Des mesures d’accompagnement, comme le tutorat, « sont déjà en place […] et continuera d’être offert», explique Alain Perron par courriel. Tous les groupes concernés seront rencontrés d’ici la fin de la semaine pour être informés de ces mesures, précise-t-il.
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QUELQUES EXTRAITS DE LA LETTRE
- «[L’enseignant*]lors d’un cours de mathématiques un lundi matin, a crié à plusieurs reprises à toute la classe « vous êtes de parfaits idiots » et « merde, merde… », devant quelques élèves bavards.
- « Les cours n’ont pas de structure, le professeur n’a pas de pédagogie et les explications données n’ont aucun sens. Nous vivons dans une classe anxiogène, sans soutien.
- « Nous avons peur de ne pas réussir les examens et de ne pas obtenir notre diplôme de secondaire 5. »
- « Les étudiants sont épuisés de devoir apprendre eux-mêmes la matière. »
- « Cela fait plus de quatre ans que nous faisons des démarches pour obtenir de l’aide, pour nous comme pour lui. [l’enseignant]mais rien ne semble changer.
- “Nous proposons d’accélérer le processus pour avoir des tuteurs et qu’ils soient gratuits, évidemment, parce que l’éducation est gratuite et que nous ne devrions pas avoir à payer quelqu’un pour un droit fondamental.”
*Les étudiants ont demandé que le nom de l’enseignant ne soit pas publié. Le comportement qui lui est reproché n’a fait l’objet d’aucune procédure judiciaire ni d’une enquête indépendante.