Dix jours | Marie Laberge face à la vie

Dix joursle nouveau roman de Marie Laberge, est le journal d’une femme qui a demandé l’aide médicale à mourir. Mais c’est avant tout un livre sur “l’âpre envie de vivre qui ne meurt pas facilement”, dit la romancière et dramaturge, qui fêtera ses 50 ans de carrière en 2025.


Publié à 00h57

Mis à jour à 6h00

« La chose la plus étonnante qui m’est arrivée avec ce livre, et j’espère qu’il en sera de même pour les gens qui le liront, c’est le sentiment intense d’être en vie que j’ai ressenti en le lisant. écrire», nous raconte Marie Laberge dans un café de l’avenue Laurier où elle est une habituée depuis très longtemps.

Ce n’était pas déprimant un instant ! Je n’ai jamais été aussi léger et convaincu d’être en vie.

Marie Laberge

Être dans l’instant présent, dispenser l’amour sans compter, ne pas perdre de temps avec des reproches, investir dans sa vie : autant de choses essentielles sont dites dans ce petit livre qui parle aussi, avec la lucidité qui amène la fin de la vie, de l’amour maternel. l’amour, de l’amour en général et du désir.

Pour écrire ce roman qui est tout sauf un recueil de conseils, mais qui suscite la réflexion, Marie Laberge a senti qu’elle devait laisser parler son protagoniste, sans se projeter. « Ce n’est pas Marie face à sa mort. Je n’ai jamais voulu sortir d’elle. Je voulais qu’elle se révèle. » Pour y parvenir, l’auteur a décidé d’écrire ce journal qui compte les jours jusqu’au dernier moment, sans jamais revenir en arrière.

« Je m’interdisais de retoucher des passages, ou de déplacer des sections, ou d’augmenter des chapitres. Je me suis dit : fais comme elle, elle n’aura pas le temps de corriger ça. » Sauf les fautes de frappe, bien sûr ! Mais c’était de loin la façon la plus « honnête » de procéder.

« Quand on parle d’aide médicale à mourir, la plupart des gens imaginent leur propre mort. Mais ce n’est pas eux qui choisiront cela. C’est ce qui me hantait : comment savoir si j’ai lavé ma tasse le mercredi dernier ? Est-ce une pensée qui vient ? »

Ne te sauve pas

Marie Laberge a beaucoup à dire sur l’aide médicale à mourir. Mais Dix jours n’est pas un plaidoyer pour ou contre le procédé, qu’elle considère avant tout comme un fascinant point de départ pour un roman. “Parce que c’est la mort pure.” » Avec du sable qui coule dans un sablier et un dénouement connu. Et ce n’est certainement pas un livre sur la mort, ajoute-t-elle.

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PHOTO SARAH MONGEAU-BIRKETT, LA PRESSE

Marie Laberge

C’est un livre qui passionne la vie parce que la mort est présente. La mort nous fait simplement comprendre que nous sommes vivants.

Marie Laberge

En tout cas, elle espère que chaque personne qui « entrera » en ressortira avec l’envie de vivre et d’y aller « courageusement ». “Ça ne sert à rien d’économiser de l’argent !” Cela ne nous donne même pas deux mois de vie supplémentaires, où est le bénéfice ? »

Elle dit en souriant que, de son côté, elle se « préserve depuis longtemps de la perte de temps et de la paresse ». « Je suis très déterminé à vivre. Quand j’étais petite, j’étais déjà la même. J’ai toujours été fatigué ! »

Cinquante ans de carrière

Marie Laberge fêtera ses 50 ans de vie artistique en 2025 : elle avait 25 ans lorsqu’elle quitta le Conservatoire d’art dramatique de Québec, en 1975. « Je jouais au théâtre, j’écrivais déjà, mais je ne l’ai jamais dit à personne. Cinquante ans, c’est plus qu’un chiffre, c’est une vie. » L’auteur, qui aura 74 ans fin novembre, n’en revient pas de la rapidité avec laquelle tout s’est passé.

C’est fou. Tout le monde le dit, mais on a du mal à se rendre compte que les choses se terminent et qu’on avance. Mais je regarde ça, et je vois que je n’ai pas traîné les pieds.

Marie Laberge

Cela vaut la peine de le dire ! Et elle ne pense pas du tout à la retraite. “Ce n’est pas un métier de retraite, on est censé empirer avec l’âge !” Eh bien, il y a évidemment un risque de divagation. C’est très difficile de durer. J’ai passé les 20 premières années de ma carrière à essayer de percer, et les 20 dernières à essayer de durer ! »

Durant toutes ces décennies, une personne a toujours été à ses côtés : l’actrice Denise Gagnon, sa meilleure amie, décédée en août et qu’elle a soutenue pendant un an pendant la maladie. « J’ai du mal à en parler au passé. » Non seulement Denise Gagnon a joué dans ses pièces, mais elle a été sa première lectrice, pour tous ses livres.

« Elle a eu le temps de lire celui-ci car cela fait un an qu’il n’était pas terminé. Elle l’avait classé parmi les bons. » Et en est-elle contente ? « Ne serait-ce que pour la joie que cela m’a apporté, oui. Mais je ne le montrerais pas si je n’étais pas sûr que le résultat soit exactement ce que je voulais. »

Marie Laberge s’apprête à retourner aux salons du livre, dont elle est la reine incontestée, heureuse de retrouver le public après les heures de solitude imposées par l’écriture. Quand on lui dit qu’avec un tel sujet, elle risque d’accueillir de nombreuses larmes – ce fut le cas même lors de cet entretien franc et intense, qui oscillait entre rire et émotion –, elle sourit gentiment.

«C’est bon, mes bras sont gros. J’en suis capable, »dit-elle… en ouvrant les bras. Pour elle, c’est même une bonne nouvelle.

« Cela veut dire que je suis toujours dans l’essentiel. »

Dix jours

Marie Laberge

Boréal

168 pages

 
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