« Certaines blessures ne peuvent pas être traitées uniquement par la chirurgie »

Côtes, sternum et clavicule cassés pour Wout van Aert : « Il doit utiliser l’objectif olympique pour sa rééducation »

Le champion campinois aura besoin de plusieurs semaines pour retrouver la santé, mais ses objectifs estivaux et la suite de sa carrière ne sont pas compromis. « Ces champions ont une résilience exceptionnelle, résume le Dr Bellemans.

Nous ne reverrons Wout van Aert en compétition que cet été. -BELGA




Par Éric Clovio

Publié le 28/03/2024 à 15h00

Après le crash, celui des corps martyrisés et des vélos emmêlés, une forme d’hébétude. Quelques instants de silence, bientôt déchirés par les râles de douleur des hommes jetés à 80 km/heure sur le bitume rugueux. Abasourdis, sous le choc, à l’image des premiers secouristes, équipiers ou motards arrivés sur les lieux juste après l’accident. Dans la tourmente, les larmes de Wout van Aert ont transpercé les cœurs et les écrans, difficile de rester insensible à cette souffrance, celle d’un athlète qui voit le travail de plusieurs mois réduit à néant en une fraction de seconde.

Pour le Campinois, qui approchait de sa Semaine Sainte (Tour des Flandres et Paris-Roubaix), tout s’est effondré, le printemps des classiques s’est drapé de noir. Combien de temps risque-t-il de rester sur la touche ? Le Giro ou même les JO sont-ils en danger ? Cette chute très sévère peut-elle avoir des conséquences à long terme sur le corps d’un coureur qui approche la trentaine ? On fait le point avec le Dr Johan Bellemans, médecin-chef du COIB.

1 Quelle est l’évaluation médicale?

Outre la clavicule droite, sept côtes et le sternum ont également été brisés, ce qui illustre suffisamment la violence du choc. Wout van Aert a été opéré par le Dr Claes à l’hôpital universitaire de Herentals, il entre dans une période de convalescence de plusieurs semaines. «En fonction des blessures, je dirais qu’il lui faudra 7 à 10 semaines avant de reprendre progressivement l’entraînement», résume le professeur Johan Bellemans, qui connaît bien la WVA pour avoir travaillé avec lui dans le mouvement olympique.

« Mais je tiens avant tout à souligner un point, essentiel pour la suite de la carrière et de la vie d’homme de Wout : aucune de ces blessures n’est irréversible, elles sont toutes « récupérables » à 100 %. rien pour la suite de son parcours, une fois que le temps de la rééducation aura fait son œuvre. »

2 Pourquoi une si longue période d’indisponibilité ?

Une fracture de la clavicule est presque « mineure » pour ces sportifs pas comme les autres, qui reprennent les rollers quelques jours seulement après l’opération. Ou encore revenir à la compétition, comme Amaury Capiot, aligné ce mercredi par son équipe Arkéa alors qu’il s’était fracturé la clavicule onze jours plus tôt !

En revanche, les blessures au sternum sont plus rares (typiques des accidents de voiture), liées à la gravité de l’accident. Le point positif pour Wout van Aert, c’est qu’aucun organe n’est touché (poumons indemnes).

Les plus douloureuses sont les côtes, qui sont inopérables et compliquent également considérablement la qualité du sommeil et la récupération physique. « Ce sont ceux qui demanderont le plus de prudence, de vigilance et de patience », explique le Dr Bellemans. «Ils doivent être consolidés et redevenir stables avant que l’athlète puisse utiliser une respiration forte et les muscles intercostaux. Il faut aussi éviter tout contact direct, même si cela est rare, mais le cyclisme est par nature un sport traumatisant. »

Même dans un scénario optimiste, le leader de l’équipe Visma ne pourra pas être au départ du Giro, qui s’élancera le samedi 4 mai de Turin. Un autre de ses objectifs majeurs 2024 s’est évaporé dans le ciel de Renaix.

3 Les JO sont-ils en danger ?

Wout van Aert en forme au début des épreuves des Jeux, c’était la quasi-assurance d’une médaille pour la Belgique, comme à Tokyo en 2021 (argent en ligne, derrière Richard Carapaz). Sa présence à Paris est-elle fragilisée ? «Je ne vois pas pourquoi», déclare le Dr Bellemans. « Il a effectivement suffisamment de temps pour se remettre sur pied et être performant lors des épreuves olympiques (27/07 pour la CLM, 3 août pour l’épreuve en ligne). « Les blessures dont il souffre sont alors entièrement récupérables, il pourrait même profiter des malheurs qu’il traverse en ce moment pour être frais et encore plus compétitif à ce moment-là, si aucune complication ne gêne sa rééducation bien sûr. Psychologiquement, je dirais même qu’il doit utiliser l’objectif olympique pour donner du sens à ce qu’il va vivre dans les semaines à venir. C’est un objectif concret qui peut lui faire du bien. »

Aux JO de Tokyo, un an après son grave accident du Tour de Lombardie (chute dans la descente du Mur Sormano et fracture du bassin), Remco Evenepoel n’apparaissait pas au meilleur de sa forme. « Les blessures et les contextes ne sont pas du tout comparables » estime Johan Bellemans. « On ne peut pas comparer un jeune athlète qui se découvrait à peine, comme Remco, et un coureur de presque 30 ans, qui connaît bien son corps même dans la douleur, comme Wout. »

4 Un 2e grave accident en 5 ans, inquiétant ?

Renaix, près de cinq ans après le drame de Pau : on se souvient que Wout van Aert avait déjà été victime d’un grave accident en compétition lors du contre-la-montre individuel du Tour de France 2019. En accrochant une barrière Nadar le long du parcours, il s’était déchiré la cuisse de la jambe droite de 14 centimètres, une blessure profonde qui aurait pu compromettre la suite de sa carrière. “Mais cela ne s’est pas produit, il est même revenu encore plus fort”, résume le Dr Bellemans. « Ces champions ne sont pas faits du même bois que les mortels ordinaires, ils fabriquent généralement des coups violents avec une force supplémentaire. Leur capacité de résilience est impressionnante ! »

 
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