Un pionnier pas mordu par les vers

Odette Ménard a appris la nouvelle de manière « un peu coquine ». La dame a été invitée par Jocelyn Michon, un producteur agricole de La Présentation, à participer à une discussion sur la santé des sols. Une situation inattendue, mais tout à fait normale à première vue, puisqu’elle se déplace souvent pour prodiguer ses conseils en la matière.

« Je suis donc arrivé là-bas un mercredi soir. Rien qui laisse présager l’inattendu.

— Odette Ménard, ingénieure et agronome

Elle était tellement surprise, au point de ne plus trouver les mots pour décrire ses sentiments. Odette Ménard a été intronisée au Temple de la renommée agricole du Québec en octobre dernier, lors d’un gala tenu au Centre des congrès de Lévis. Elle faisait partie d’une cohorte de quatre personnes honorées. Ann Louise Carson, Serge Lefebvre et Marcel Groleau l’accompagnaient sur scène.

De plus, Odette Ménard est l’une des rares femmes à voir son travail reconnu et immortalisé au Temple de la renommée agricole. Cet honneur est pour elle un « cadeau de la vie ».

« Mais je ne travaille pas pour les honneurs. Vous savez, je suis très heureux dans mon travail. C’est tout ce qui compte !

— Odette Ménard

Un début inattendu

Sa carrière a pris un tournant inattendu en l’espace de dix minutes. Odette Ménard a complété des études en génie agricole et en structure du bâtiment. Son parcours universitaire l’a conduite au ministère de l’Agriculture, dans un poste qui devait concerner les infrastructures, sa prédilection.

Elle entre donc dans les bureaux du ministère à Saint-Hyacinthe le 18 juillet 1988. La jeune professionnelle est assise dans son box et rencontre son patron le matin. En toute honnêteté, ce dernier lui a alors avoué qu’il n’avait pas besoin d’un expert en infrastructures du bâtiment au sein de son équipe. Une nouvelle surprenante compte tenu de l’embauche.

Odette Ménard (en robe noire au centre) entourée de ses proches lors de la cérémonie. (TRAQ)

« Paul Sauvé était un grand visionnaire, sensible aux enjeux de conservation des sols. Il voulait compter sur une personne dans son équipe qui travaille en ce sens, en soutien aux producteurs agricoles. Le tout dans l’optique d’adopter de meilleures pratiques », rappelle-t-elle.

Odette Ménard a accepté le défi, mais il faut dire qu’elle était la seule à l’époque à travailler sur le sujet. Autre petit détail : la dame devait donner une conférence quelques jours après son embauche. Sa présentation portait sur l’érosion hydrique et les stratégies de correction.

« Internet n’existait pas en 1988. Seulement une bibliothèque avec des livres au bout du couloir. Pas de PowerPoint ni de canons, juste des transparents ! J’ai donc concocté une conférence d’une vingtaine de minutes sur le sujet en l’espace de deux jours ! J’en ai tiré le plus d’informations possible. Mon patron m’a ensuite présenté à une foule de producteurs comme spécialiste de la conservation des sols au Québec », nous raconte-t-elle.

Paul Sauvé fonde alors le club HerSol pour favoriser les échanges entre agriculteurs sur la gestion des sols. Odette Ménard tombe alors dans la potion magique. Une opportunité totalement inattendue a donné naissance à une carrière plus que prolifique. D’une passion humaine avant tout.

Odette Ménard a été conseillère municipale à Ange-Gardien de 2005 à 2009, puis mairesse de la municipalité de 2009 à 2013. En 2012, elle a reçu le prix Marcelle B. Trépanier, récompensant son travail comme élue municipale de la région de la Montérégie. . (Archives La Voix de l’Est)

L’agriculture est partout

Son cursus est trop chargé pour en fournir un résumé complet dans cet article. Cependant, on peut dire que son parcours a été guidé par la santé des sols. Une passion toujours présente après 36 ans.

Elle a organisé de nombreux voyages pour les producteurs agricoles et s’est rendue directement sur le terrain pour partager sa vaste expertise, évaluer la santé des sols et proposer diverses solutions. Le point culminant de sa carrière ? Les rencontres humaines et le partage qui en découle.

« Parler avec le sol dans les mains… c’est ce qui me motive !

— Odette Ménard

Elle donne l’exemple de visites effectuées ici ou à l’étranger. Notamment lors d’une conférence sur les vers de terre en Australie. Puis, plus récemment, une visite en Guinée pour évoquer un sujet dont elle ne se lasse pas. Ses visites sur le terrain prouvent une chose : l’agriculture est au centre de toutes les sociétés, quels que soient le continent, la langue et l’histoire.

Odette Ménard parle de la place de son domaine, qui devrait être au cœur de l’action politique au Québec. Elle plaide pour une vision gouvernementale avant-gardiste. Selon sa grande vision, les trois principaux ministères seraient ceux de la santé, de l’éducation et de l’agriculture.

« La santé et la vie passent par l’agriculture ! J’ai donné des conférences partout et visité la Guinée en novembre dernier. La terre, la nourriture, les plantes et la photosynthèse sont la base de toutes les nations. C’est ce qui devrait être au cœur des préoccupations», juge-t-elle.

Elle est également bien placée pour parler de la place des femmes dans le monde agricole.

« Dans notre domaine, nous constatons un grand développement professionnel au fil des décennies. Les femmes ont pris leur place au niveau des conseils agricoles. La grande majorité sont des femmes, notamment dans les clubs. Mais le chemin à parcourir est encore long en termes d’entreprises agricoles. Le patriarcat y est encore très présent, sans généraliser. Nous devons prendre notre place. L’agriculture est un métier extraordinaire.

Les intronisés 2024 : Ann Louise Carson, première femme à la direction générale de Holstein Canada, Marcel Groleau, ancien président du Syndicat des producteurs agricoles, Serge Lefebvre, reconnu notamment pour avoir introduit à grande échelle le modèle des poules élevées en liberté. en Amérique du Nord et Odette Ménard. (TRAQ)

Une vie bien remplie !

À l’aube de la soixantaine, Odette Ménard se dit à mi-carrière, citant deux femmes qui l’inspirent, Janette Bertrand et Denise Filiatrault. Elle compte bien les imiter et rester active avec ses mille et un projets à son actif.

« Je m’entraîne encore, beaucoup ! J’ai un projet qui vise à créer un réseau de producteurs agricoles sur une base locale. Comme une école qui rassemble des élèves de différents niveaux. La solidarité et la résilience sont au cœur de l’idée », nous confie-t-elle.

L’expert a également la possibilité de mettre la main à la pâte et de travailler à l’étranger. Elle a quatre merveilleux enfants et trois petits-enfants extraordinaires. Sans oublier le vitrail, un nouveau passe-temps !

« Je suis ouvert à tout ! J’ai récemment reçu une invitation à organiser une conférence aux Açores. Je pense que je dirais oui ! », conclut-elle, un rire sympathique dans la voix.

 
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