le tournoi suisse de Zuchwil est la Coupe anti-Spengler

Le Tournoi des Cinq Nations s’est déroulé fin décembre à Zuchwil dans le canton de Soleure.image: Klaus Zaugg

Organisé dans le canton de Soleure entre Noël et le Nouvel An, le tournoi des Cinq Nations, suivi de très près par les franchises NHL, et donc particulièrement intéressant d’un point de vue sportif, ne ressemble en rien à la Coupe Spengler devenue presque obscène. C’est là, à Zuchwil, que se déroule le « vrai » hockey pendant les vacances.

Klaus Zaugg

Le parking devant l’arène est non seulement gratuit, mais il n’est pas non plus bondé. Il n’y a presque personne, à tel point que le croassement des corbeaux perchés sur les arbres voisins serait presque inquiétant en cette nuit brumeuse de décembre. On dirait un film d’horreur.

Mais ne vous inquiétez pas : la vie reste paisible sur le Plateau. Le journaliste est en route pour l’événement « hockey » le plus important de la dernière semaine de l’année. Et non, il ne s’agit pas du légendaire concours de Davos. Nous parlons ici du tournoi U18 des cinq nations à la Regiobank Arena de Zuchwil dans le canton de Soleure. Une Coupe Spengler alternative, ou pour le dire d’une manière beaucoup plus controversée : une Coupe Spengler anti-Spengler.

Pourtant, même les meilleurs jeunes talents de Suisse, de Slovaquie, de République tchèque, de Finlande et d’Allemagne ne sont pas présents. Ils sont déjà intégrés aux équipes qui disputent actuellement le Championnat du monde des moins de 20 ans. C’est le cas de Jonah Neuenschwander de Bienne, certes assez âgé pour être ici, mais qui est en voyage au Canada. Il ne joue donc pas devant les 50 recruteurs de NHL venus en Suisse observer la nouvelle génération. Pour l’occasion, la buvette de la patinoire a été transformée en salle de travail avec accès Internet pour les dénicheurs de talents.

Notez qu’il n’y a pas de chasseurs de talents.

Pourquoi une telle armada ? Le tournoi international de Soleure regorge de pépites à découvrir, contrairement aux Mondiaux Juniors qui accueillent des joueurs que les recruteurs connaissent déjà parfaitement. De très grands talents dans certains cas, susceptibles d’être cités prochainement au premier voire au deuxième tour du repêchage de la LNH.

Cependant, pour qu’une équipe réussisse sur le long terme, elle ne doit pas seulement faire les bons choix lors des premiers tours, ceux où elle trouve de futures stars. Elle doit également sélectionner les bons joueurs au quatrième, cinquième, sixième ou septième tour du repêchage. Si une franchise parvient à recruter de bons joueurs de hockey à ces niveaux, elle acquiert alors un statut complètement différent. C’est pourquoi il est si important de connaître les seconds couteaux. Un tournoi comme celui de Zuchwil est donc très important pour les jeunes talents désireux de montrer leur potentiel. Même ceux non sélectionnés pour les Coupes du monde U18 ou U20 peuvent figurer dans les carnets des recruteurs.

Spécialiste du marché européen, Thomas Roost travaille comme scout pour le bureau central de la LNH, dont le rôle est d’établir la liste des joueurs les plus talentueux et de fournir aux clubs des rapports sur les pépites. Il est donc logique de le voir préférer la brume de Soleure au soleil de Davos.

Thomas Roost devant l’entrée de la buvette devenue pour quelques jours le « Scouts Room ».image: Klaus Zaugg

«Zuchwil est plus important que le Championnat du monde U18 ou U20 pour tous les dépisteurs de la LNH. Il est probable que plus de 50 d’entre eux soient venus ici », explique Roost. Les recruteurs ne paient que 40 francs pour utiliser l’espace de travail et le fait qu’ils envahissent la buvette ne suscite aucune querelle. Un stand de saucisses a été installé juste à côté de la salle. Ce sont peut-être les meilleurs que vous puissiez déguster dans une patinoire.

Thomas Roost, reconnu pour son travail international, occupe également le poste de directeur sportif au HC Olten. L’occasion d’échanger un peu sur la politique sportive du club. Le journaliste est persuadé que le problème vient des deux gardiens. Roost ne l’a pas contredit, mais il n’a pas non plus révélé ce qu’il envisageait de faire à ce sujet. C’est juste une parenthèse.

Le voyage à Zuchwil est aussi un voyage aux origines de notre sport. C’est un retour aux sources, bref, on retrouve la base sans laquelle le hockey professionnel n’existerait pas. Ici, tout tourne autour du jeu. De nombreux bénévoles veillent à ce que l’organisation soit parfaite. Il n’y a pas de vente malgré la présence des recruteurs, pas de marketing.

Le billet pour un match coûte dix francs. C’est 20 fois moins qu’une place à la Coupe Spengler. Les spectateurs sont également moins nombreux. Ils étaient un peu plus de 400 dimanche soir pour le match entre la Suisse et la Finlande. Parmi eux, certains possèdent un abonnement à une patinoire de la Ligue nationale. Ils se rendaient autrefois à Davos pour la traditionnelle Coupe Spengler, mais viennent aujourd’hui profiter de l’alternative proposée à Zuchwil. Ils y mènent un pèlerinage en faveur du « vrai » hockey et contre le capitalisme devenu presque obscène à Davos. C’est comme faire du shopping à la ferme plutôt que dans un supermarché.

Le budget y est bien sûr pour beaucoup. Une nuit dans un hôtel près de Zuchwil coûtait moins de 150 francs lors de la soirée Suisse-Finlande, alors que la même nuit à Davos était en vente à 700 francs, et cela pour une chambre minable.

La patinoire de Zuchwil lors du tournoi des Cinq Nations.image: Klaus Zaugg

Le concours de Soleure existe depuis près de 20 ans. Une curiosité aussi agaçante qu’émouvante montre à quel point il n’y a ici que du hockey, et pas la moindre place accordée à l’argent. La réunion se termine. Les Suisses, qui avaient longtemps résisté, s’inclinent sèchement 11-2 face aux Finlandais, après un effondrement complet dans le dernier tiers. C’est un match rapide, divertissant et sauvage, sans véritable plan tactique.

Du hockey « champenois » comme la Coupe Spengler.

Un débriefing entre amis, agrémenté d’anecdotes en tout genre, n’est pourtant pas possible comme dans l’immense restaurant « Timeout » de la patinoire de Davos. Immédiatement après le match, une jeune femme ferme l’enceinte et nous sommes dehors dans la froide nuit de Zuchwil. Pourtant, il n’est que 21 heures. Mais à cette heure tardive, tout est fermé, tournoi international ou pas. Bref, l’ordre doit être respecté.

C’est alors qu’on se rend compte qu’il n’y a que du hockey au Tournoi des Cinq Nations, et pas de gastronomie, ou pire encore, de services VIP. L’argent ne joue aucun rôle. Après tout, le financement de la jeune équipe U18 est assuré par la fédération aux poches déjà bien remplies.

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