Dans de nombreuses villes de France, les marchés de Noël ont atteint de nouveaux records de fréquentation. Un succès qui ne va pas sans poser des défis de plus en plus importants aux municipalités.
L’heure n’est pas encore au bilan de la saison et de nombreux marchés de Noël resteront encore ouverts quelques jours (celui de Strasbourg ne fermera ses portes qu’à 21 heures vendredi 27 décembre au soir), mais déjà, fréquentation des marchés de Noël en France semble avoir atteint des records. Celui de Colmar a vu sa fréquentation augmenter de 10 % par rapport à l’année dernière, selon le maire Éric Straumann ; celui d’Arras a battu un record en franchissant la barre du million de visiteurs ; celui de Strasbourg semble en passe de battre le précédent record de 2023 (3,3 millions) ; celle de Ribeauvillé accueillait 30 000 personnes chaque week-end… soit six fois plus de visiteurs que le village ne compte d’habitants.
En Alsace ou ailleurs donc, les marchés de Noël semblent afficher complet depuis un an encore. Si le marché de Noël de Strasbourg est le plus mythique (et le plus ancien : son origine remonte à 1570 !), le pays tout entier y participe, et même en Provence on croise désormais plus de 300 000 visiteurs devant les étals des chalets guirlandes, à Nice, Toulon ou Aix-en-Provence. Un succès grandissant dont se vantent les maires, certains d’y voir une preuve de l’attractivité de leur commune à l’heure des vacances, mais qui n’est pas sans poser des défis de plus en plus considérables aux communes.
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La sécurité avant tout, et cela est resté dans les mémoires comme une exigence essentielle à la suite de l’attentat tragique de Magdebourg en Allemagne, où 5 personnes sont mortes et 200 autres ont été blessées par un réfugié saoudien qui s’est précipité dans la foule au volant d’une voiture. un SUV puissant. Si en Allemagne, le débat sur la suffisance ou non des mesures de sécurité du marché de Noël de la ville fait désormais rage, ce débat a également eu lieu en France où plusieurs mesures visant à renforcer la sécurité des marchés de Noël ont été décidées en urgence – même si ils étaient déjà sous haute surveillance, depuis l’attentat en 2018 sur le marché de Noël de Strasbourg.
La préfecture alsacienne avait même adopté cette année un dispositif exceptionnel de surveillance individuelle, prolongeant jusqu’à fin décembre les mesures adoptées cet été pour la sécurité des JO : ainsi un réfugié tchétchène étroitement surveillé par les services a appris que son interdiction de quitter la ville exprimée par un Micas (mesure individuelle de contrôle administratif et de surveillance) se poursuivrait jusqu’à la fin du marché de Noël, rapporte Défis.
Inaccessible aux personnes à mobilité réduite
Ces mesures particulières adoptées par un préfet particulièrement zélé s’ajoutent à celles, désormais habituelles, qui s’appliquent partout ailleurs aux abords des marchés de Noël : périmètre de sécurité gardé par la police autour des chalets, fouilles individuelles des piétons à l’entrée, et accès interdit aux véhicules avec des barrières installées pour arrêter une éventuelle attaque à la voiture-bélier.
Mais la sécurité n’est plus la seule préoccupation des organisateurs des marchés de Noël : leur surpopulation crée de nouveaux défis, pour que l’expérience reste agréable pour les visiteurs… et n’exaspère pas les riverains. Ainsi le maire de Ribeauvillé réfléchit à haute voix à l’idée d’introduire une limitation du nombre de visiteurs, face à la saturation des chemins parcourus par une foule compacte, mais aussi face à l’envahissement des parkings en périphérie de Ribeauvillé. la ville qui ne suffit plus à accueillir tous les véhicules.
Pour Strasbourg, le journal 20 minutes est même allé jusqu’à imaginer l’instauration d’un péage à l’entrée, comme le fait la ville de Venise, qui fait désormais payer l’accès au centre-ville plusieurs jours par an pour tenter de réguler les flux touristiques. Une idée évidemment très mal accueillie par les internautes.
De plus, cette saturation s’ajoute à un problème plus ancien, celui de l’accès aux marchés de Noël pour les personnes handicapées, notamment celles à mobilité réduite. « Ici, il n’y a pas de place pour nous, les personnes handicapées » déplore ainsi dans un entretien avec France 3 un Strasbourgeois en fauteuil roulant. « Il faut slalomer. Il pourrait y avoir des circuits spécifiques. Là, c’est vraiment compliqué quand on est en fauteuil roulant, comme moi… » La foule compacte rend quasiment impossible la circulation des fauteuils roulants, et encore plus l’accès aux chalets ; mais quand on y arrive enfin, impossible en fauteuil roulant de monter assez haut pour voir les étals et parler au commerçant… sans même parler de l’accès aux toilettes publiques qui reste encore un parcours du combattant.
“Ça ne sera pas bon marché”
À ces difficultés d’accès s’en ajoutent d’autres : comme la question du contrôle exercé par les communes sur les prix et le choix des biens vendus sur les étals. BFM Alsace avait ainsi constaté l’agacement de nombreux visiteurs face à la flambée des prix chez certains commerçants, qui profitent de l’afflux de visiteurs pour augmenter leurs prix au-delà de l’inflation constatée ailleurs sur des produits similaires. A 9€ le « baguiflette »Fanny a ainsi témoigné dans ce reportage avoir l’impression d’une dépense “un peu abusé” – tout en reconnaissant que “Quand nous venons, nous savons dans quoi nous nous embarquons et nous nous attendons à ce que ce ne soit pas bon marché” : les prix ne sont pas encore dissuasifs, et l’envie de participer à l’ambiance de Noël qui flotte au-dessus des chalets prend le dessus.
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Aux prix élevés s’ajoutent parfois l’impression qu’on ne peut acheter que les mêmes bibelots d’un chalet à l’autre, ou que la part laissée aux artisans diminue au profit de produits industriels de moindre qualité qui prennent le relais – alors qu’on ne trouve pas que de la nourriture, ou presque. rien. C’est pour lutter contre ce risque d’uniformisation des marchandises ou de dégradation de l’esprit du marché de Noël que les communes sont parfois tentées de faire le tri parmi les commerçants. Ainsi, a noté le correspondant de Figaro en Alsace, à Strasbourg un décret fixe une liste d’articles que les commerçants peuvent proposer, liste qui a vocation à être “volontairement restrictif, afin de correspondre au plus près aux traditions de Noël en Alsace”. L’adjoint au maire Guillaume Lisbig précise même que le contrôle qualité repose désormais sur l’arbitrage des visiteurs eux-mêmes, à qui il est proposé d’évaluer sur 100 leur expérience avec chacun des chalets !
Reste à savoir si le subterfuge suffira à convaincre certains Strasbourgeois exaspérés, qui ont exprimé au média Pokaa leur sentiment que l’esprit traditionnel du marché de Noël de leur ville s’est perdu. Comme Donna, qui n’en voit qu’un « Marché des produits chinois » et estime que l’installer au pied de la cathédrale de la ville “C’est comme installer un cirque dans les appartements de la reine d’Angleterre”.