Après les bronzes et photomontages, une exposition d’ossements peints par Sanfourche à voir à Limoges

Sanfourche et Vincent Pécaud ne se quittent plus. Normal, le second ayant bien connu le premier, artiste majeur de l’art brut et de l’art singulier, décédé à Saint-Léonard-de-Noblat en 2010.

Le galeriste Limougeaud présente donc une troisième partie consacrée à Jean-Joseph Sanfourche, après les bronzes et les photomontages. Cette fois, ce sont… des os peints.

C’est dans une lettre qu’il adresse à Jean Dubuffet en 1975 que Sanfourche parle pour la première fois de sa peinture sur os : « Mes centaines de peintures et de sculptures, certaines très belles et originales, notamment sur des ossements humains et celles réalisées avec des silex taillés trouvés par moi en Dordogne, c’est pas mal. »

Effet surprise

Sanfourche utilise des os comme support (notamment des os préhistoriques et animaux). Il peint leur surface avec un certain respect, puis les assemble. L’artiste ne s’intéresse qu’aux ossements humains anciens, voire néolithiques. Sans doute un hommage aux peuples qui savent entretenir un lien avec leurs ancêtres, et leur paix dans l’au-delà, à travers une méditation ritualisée sur les reliques et l’art.

Bien évidemment, recourir à ce support ne serait plus possible aujourd’hui. Mais c’était dans les années 60. « L’artiste a pu se procurer des ossements humains dans des salles de ventes, ou auprès d’archéologues, ou encore dans un magasin parisien qui vendait des ossements pour étudiants en médecine, mais aussi à Solignac, où il vivait, par l’intermédiaire d’un ami religieux, lorsque des ossements émergeaient sur le terrain de tombes abandonnées », explique Vincent Pécaud. « Il sort ces éléments de l’oubli et de l’anonymat, leur redonnant vie. »

Jean-Luc Thuillier, légataire et expert du peintre, explique très bien les motivations artistiques de Sanfourche à cette époque de sa vie : « Très économe, il conserve les moindres éclats comme s’il s’agissait de pierres précieuses. Il les alourdit de plâtre et leur donne une expression, cherchant un effet de surprise. Sanfourche se montre à la fois chercheur et artisan, et utilise de manière ludique des crânes dont une composition surmodelée a même été reproduite dans le journal. Libération. En 1995, l’exposition « Fantôme et autres fantômes », organisée par l’office général de la culture de Dordogne, proposait une cohabitation entre crânes et pierres peints par Sanfourche (série initiée trente ans plus tôt) avec un tableau de Robert Combas.

“Très économique, il préserve les moindres éclats comme s’il s’agissait de pierres précieuses”

Certaines pièces exposées à Pécaud figuraient, en 2018, parmi les œuvres de Sanfourche présentées au Musée d’Art Brut de Montpellier.

La fascination de Sanfourche pour les os peints s’explique, selon Jean-Luc Thuillier, par l’esthétique liée au chamanisme antique et par l’humour noir, avec ce sens parodique du sacré que l’on retrouve dans la radicalité des performances de Michel Journiac (1943-1995). ). Sanfourche a également été en contact avec cet artiste conceptuel des années 70, qui plaçait la mort, le corps et la spiritualité au centre de performances exubérantes et provocatrices.

Peu populaire

Le spécialiste du peintre reconnaît cependant que « si la sculpture et la peinture sur os lui procurent de grandes satisfactions, comme s’il voulait ressusciter le secret de rituels magiques du fond des âges, elles restent très peu appréciées des amateurs d’art ».

A noter que d’autres magnifiques pièces tirées de l’imagination de Sanfourche, à base d’os, de plâtre et de pierres, sont visibles en permanence à la mairie d’Eymoutiers.

Galerie Vincent Pécaud, 21, rue Elie-Berthet, jusqu’au 28 février 2025, du mardi au samedi de 10h30 à 12h et de 14h30 à 19h. Tel. : 06.80.87.84.04 (exposition complétée de dessins, acryliques, bronzes, photomontages, émaux).

 
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