Madame Jardemalie avait des craintes. Ce qu’elle apprend renforce son idée qu’elle est bel et bien suivie et espionnée par un ou plusieurs individus. Par qui ? Pour quoi ?
« En mettant la main sur les informations détenues par les autorités belges, le Kazakhstan montre qu’il peut faire ce qu’il veut »
Constamment sur ses gardes
Botgoz Jardemalie a travaillé au Kazakhstan, avant de défendre de nombreux opposants politiques en exil et de devenir elle-même militante. Un combat qui lui vaut forcément l’inimitié des autorités kazakhes.
Mme Jardemalie travaillait pour une banque liée aux autorités kazakhes, poste qu’elle a quitté une fois les liens avec le régime établis par l’avocat et activiste. Ce fut pour elle le début d’une saga judiciaire qui Le Libre signalé à plusieurs reprises et notamment en janvier 2024.
Déjà à l’époque, l’avocate déclarait qu’elle était harcelée et espionnée par des individus qui n’auraient pas hésité à louer l’appartement en face de chez elle pour l’espionner jour et nuit. Madame Jardemalie a également expliqué avoir été victime d’un piratage informatique.
Lorsque son professeur de sport lui a annoncé, en juillet 2017, que des individus s’intéressaient à elle en posant de nombreuses questions à son sujet, Botgoz Jardemalie – qui est constamment sur ses gardes – a commencé à surveiller encore plus tout véhicule qu’elle le juge suspect pour tenter de récupérer preuve de ce qu’il dit.
Ainsi, à de multiples reprises, elle aura la sensation d’être suivie par plusieurs véhicules. Elle prendra en photo certaines voitures dont les conducteurs sont, à ses yeux, méfiants. Puis déposera une plainte pour harcèlement.
Le parquet fédéral se chargera du dossier. Une enquête sera ouverte et en novembre 2017, un individu sera interpellé. L’audition de ce dernier et surtout les éléments qui se trouveront en sa possession viendront étayer la thèse soutenue par Botgoz Jardemalie.
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Plus de 181 000 photos trouvées
L’individu arrêté expliquera aux enquêteurs qu’il a travaillé pendant deux ans comme agent de surveillance pour une firme spécialisée dans les enquêtes et les recherches.
Ancien militaire, l’homme est chargé depuis « quatre ou cinq mois » d’une mission consistant à surveiller un avocat d’origine kazakhe. Il parle d’elle comme étant la sienne cible (ou « cible » en français) qu’il ne connaît pas personnellement. Seule information : ses initiales, à savoir BJ.
L’agent a expliqué avoir travaillé avec au moins cinq autres personnes, sans jamais rien révéler à leur sujet.
Lorsque les enquêteurs lui expliquent que les activités décrites sont illégales et que, pour exercer légalement une activité de détective privé sur le sol belge, il est nécessaire d’obtenir une accréditation fournie par le ministère de l’Intérieur, l’individu affirme ne pas être au courant. de ces obligations.
L’homme sera libéré, mais son téléphone sera saisi. On y retrouvera plus de 181 000 photos concernant Botgoz Jardemalie. D’autres éléments démontreront que cette dernière était effectivement surveillée depuis un domicile situé en face de son domicile à Bruxelles.
C’est pour cette histoire que Botgoz Jardemalie était, ce mardi matin, devant la 43ème chambre du tribunal de première instance de Bruxelles.
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Le procureur fédéral a souligné la gravité de la situation, dans le cas d’un soi-disant « professionnel », insistant sur le fait que la durée du délit est sans doute plus longue que celle mise en évidence lors des investigations. Il a requis la peine maximale de deux ans de prison, invoquant une circonstance aggravante, à savoir le fait que Madame Jardemalie était surveillée et harcelée en raison de ses opinions politiques.
Jugement du 30 janvier 2025.