Dans la nuit d’Avignon, des réactions timides au premier tour des législatives – .

Dans la nuit d’Avignon, des réactions timides au premier tour des législatives – .
Dans la nuit d’Avignon, des réactions timides au premier tour des législatives – .

Alors que le Festival d’Avignon débute, les résultats du premier tour ont été peu accueillis, malgré la mobilisation de plusieurs artistes de premier plan.

« Hécube, pas Hécube », la pièce de Tiago Rodrigues jouée dimanche 30 juin lors de la soirée du premier tour des élections législatives. CLÉMENT MAHOUDEAU / AFP

By Emmanuelle Bouchez

Publié le 1 juillet 2024 à 06:56

Mis à jour le 1er juillet 2024 à 6h58

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A l’avant-première de “Hécuba”, la flamme de Thiago Rodrigues

Le spectacle attendu cette nuit électorale est Hécube, pas Hécube, la pièce du patron du festival Tiago Rodrigues. Dans la très belle carrière Boulbon, à quelques kilomètres d’Avignon, il le met également en scène avec la troupe de la Comédie Française. La représentation est fixée à 22 heures, comme tous les spectacles en plein air du festival, il faudra attendre que la nuit tombe.

Les spectateurs gravissent lentement le long chemin caillouteux pour accéder au site. On aimerait ressentir une atmosphère différente, alors que les résultats du premier tour viennent d’être annoncés et jettent le doute sur l’avenir de notre démocratie. Mais non. Peut-être juste un peu plus de silence, moins de rires ou de conversations bruyantes. Comme si les amateurs de théâtre présents, un peu hébétés, abasourdis, craignaient presque d’aborder le sujet.

En arrivant sur place, on retrouve la foule dense des soirées d’ouverture, l’impatience curieuse, l’attente fébrile. Visages pâles d’artistes, spectateurs aux traits soudain tirés, comme fatigués. Bizarrement, il faut aborder le sujet soi-même pour que les gens en parlent.

Installés sur le stand avec les chaises coques en plastique bleu si inconfortables de la carrière de Boulbon, on regarde Denis Podalydès, puis Elsa Lepoivre, Eric Génovès, Loïc Corbery s’installer autour d’une longue table avant le début du spectacle, discutant entre eux sous les conversations feutrées du public. Ce sont les prémices de la mise en scène…

Quand cela se finira-t-il Hécube, pas Hécube, Tiago Rodrigues, après les saluts, s’essoufflera pour annoncer une nuit de résistance, jeudi 4 juillet, de minuit à 6 heures du matin dans la Cour d’honneur du Palais des Papes après le spectacle d’Angelica Liddell. Tous les artistes du festival, In et Off mêlés, s’y retrouveront pour nous inviter à défendre au second tour nos belles valeurs républicaines qui pourraient être menacées. Tous les spectateurs sont invités gratuitement. Le patron du festival est combatif, chaleureux, généreux. Mais il est déjà tard, les spectateurs veulent rentrer chez eux. – Fabienne Pascaud

At the Stade de Bagatelle, “ « Se taire ensemble, c’est encore plus fort »

18 heures, dimanche 30 juin, la foule se précipite pour pénétrer sur la pelouse verte et rafraîchissante du Stade de Bagatelle. 175 amateurs âgés de 16 à 76 ans attendent qu’une douzaine de danseurs professionnels de la compagnie de Boris Charmatz ainsi que du TanztheaterWuppertal-Pina Bausch, qu’il dirige depuis deux ans, se mêlent à eux. Bientôt ils seront embarqués ensemble dans Cercles« l’atelier de recherche chorégraphique à ciel ouvert » organisé par le chorégraphe, artiste complice du Festival. Le maître de cérémonie, casquette et tee-shirt rose, donne le ton : « VNous sommes comme la compagnie de danse du Festival d’Avignon et vous m’avez fait passer de merveilleuses journées en ces temps de violence politique et d’incertitude. « . Il donne le ton. Elodie, 38 ans, originaire du village d’Angles, de l’autre côté du Rhône, praticienne amateur et collaboratrice d’une collectivité locale, s’en souvient soudain : « ah oui… j’ai voté ce matin, à 8h ! J’ai l’impression que c’était il y a longtemps, car ici, on est dans une bulle de bonheur. Danser avec tous ces gens, en faire partie mais entrer et sortir du « Cercle » quand on le souhaite, c’est une belle façon de vivre la liberté. »

20 heures, tout le monde danse, de plus en plus rouge, joyeux, abandonné au mouvement. D’autant plus galvanisé que la douzaine de pros leur ont fait le plaisir de se produire eux aussi seuls au début des replays. Les résultats ? Parmi le public, on les regarde discrètement. Isabelle montre son téléphone portable connecté à France Info : 34,1% pour le RN, 28,1% pour le Nouveau Front populaire, 20,1% pour Ensemble, la majorité présidentielle, selon Ipsos… » Ce n’est pas le redoutable raz-de-marée RN, elle respire, toujours soulagée. Après, il y aura une barrière contre l’extrême droite. » Trois charmants retraités avignonnais, fans à la fois du In et du Off, partagent ce sentiment : seulement 3 points de plus par rapport aux Européens.

Boris Charmatz, enfin assis sur un banc, avoue ne pas être capable d’analyser ce chiffre sur place : « JeIl y a quelques jours, il me semblait logique de monter ce projet comme une assemblée très horizontale et pas hermétique. Mais quand je vois la réalité du score du RN, je ne sais plus quoi penser. Je suis d’autant plus frappé qu’il monte partout en Europe. Comme si nous étions peu à peu gagnés, à notre tour, par le populisme du Brexit. Il faut continuer à tout faire : danser, parler, écrire. Surtout, sortir de la tête des gens cette idée que l’art est élitiste : preuve du contraire avec Cercles ! Les artistes doivent également proposer des contre-récits constructifs qui suggèrent des solutions. »

Patrick, 62 ans, médiateur en soins palliatifs de Nîmes, qui a retrouvé Boris Charmatz » très fin et jamais en surplomb » dans son discours aux amateurs, retrouvés bien plus tard dans les rues tranquilles d’Avignon, pense qu’avoir participé à cette aventure, un soir du premier tour, est riche de sens : « Au-delà du plaisir évident d’être ensemble, se taire ensemble est encore plus fort : cela nous évite de dire des bêtises comme celles qu’on a parfois entendues pendant la campagne. Car l’avantage de laisser les corps se parler, sans l’intervention de la parole, c’est qu’ils s’entendent. Et ce n’est pas rien, aujourd’hui, une telle expérience. » — Emmanuelle Bouchez

In the Off, quelques cris dans la nuit

Ce dimanche 30 juin, les rues d’Avignon étaient étrangement calmes pour cette journée d’élections législatives. Si le In Festival débutait ce samedi 29 juin avec démon d’Angelica Liddell, le off, ne débutera officiellement que le 3 juillet. Les festivaliers attendent toujours, et ça se voit. Quelques minutes avant la publication des premiers résultats, peu de restaurants affichaient complet. Place des Carmes, les terrasses clairsemées accueillaient des clients concentrés sur leur discussion, téléphone sur la table. Quand 20 heures sonnent, rares sont ceux qui consultent les résultats. A quelques pas, devant le Palais des Papes, un spectacle de rue a lieu. Tandis que non loin de là, sur la place de l’Horloge, les terrasses diffusent le match de football Angleterre-Slovaquie. Les élections semblent loin des esprits d’Avignon, en quête de légèreté en ce début de festival. Il faut passer devant plusieurs établissements avant d’apercevoir un visage politique : celui de Marine Le Pen, alors en plein discours. La députée RN annonce sa réélection dans sa circonscription du Pas-de-Calais. 20h21 Les spectateurs quittent le Théâtre des Halles où deux pièces viennent de se terminer. ” Tu as entendu ? Le RN a fait 33% »glisse une dame à son mari. “C’était bien, voyons maintenant les mauvaises nouvelles…”, raconte un autre spectateur. Philippe Durand, auteur de Larzac !quitte la salle, rapidement rejoint par les membres du public. La discussion tourne autour du spectacle, pas des élections. Pendant ce temps, des musiciens jouent le long de la rue de la République, l’une des artères les plus importantes de la ville. L’ambiance est légère. A 21 heures, quelques cris viennent troubler le calme ambiant. Ils viennent de la place de l’Horloge, où un attroupement vient de se former. Quelques dizaines de personnes sont présentes. Des drapeaux CGT-spectacles flottent au-dessus de leurs têtes. « Pas de fascistes dans nos quartiers ! » Pas de quartier pour les fascistes ! » ; « La jeunesse agace le Front national », scandent les manifestants. Quelques passants les rejoignent, puis repartent précipitamment. A minuit, Avignon est presque déjà endormi. – Kilian maintenant

 
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