« Au Moyen Âge, les charpentiers, appelés aussi «petites cabanes à haches » [petite hache, ndlr] fabriquer des coffres et des tables en bois massif. Suite à la découverte de l’Amérique, les bois exotiques arrivent en Europe. Leur beauté et leur rareté expliquent la naissance du placage, qui consiste à recouvrir les meubles en chêne ou en peuplier et permet de créer des motifs. C’est au XVIIe siècle qu’apparaît le métier d’ébéniste, d’abord appelé « menuisier en ébène ». says Lucile Allinger, trainer in professional aptitude certificate (CAP) Cabinetmaking at the Compagnons du Devoir, in Rennes.
Menuisier ou ébéniste ?
Aujourd’hui, l’ébéniste se consacre principalement à la fabrication de meubles tandis que le menuisier fabrique des portes, fenêtres, parquets, escaliers, boiseries et même agencement de meubles. Même si les compétences requises sont essentiellement les mêmes, l’approche est différente. « Un menuisier réfléchit à l’assemblage le plus solide et s’assure de l’étanchéité de la porte ou de la fenêtre qu’il réalise, tandis que l’ébéniste réfléchit à l’esthétique puis aux techniques à mettre en œuvre », explique-t-elle.
Au cœur du chantier, cirage des boiseries nettoyées et restaurées. © Patrick Zachmann/Magnum Photos
En première année de CAP Menuiserie et Ébénisterie, les différentes essences de bois et l’utilisation de différentes machines sont abordées : pour la coupe, qui consiste à retirer l’écorce et l’aubier (partie molle située juste sous l’écorce) puis à couper la pièce selon une largeur et une longueur définies, et pour le travail, toutes les opérations (jointage et rabotage) visant à rendre le bois rugueux sur toutes ses faces. C’est en deuxième année de CAP que les enseignements diffèrent un peu : s’il apprend les différents types d’assemblages – l’assemblage tenon-mortaise étant le plus traditionnel – l’étudiant en menuiserie conçoit des ouvrages mixtes mêlant bois massif et panneaux de bois mélaminé tandis que l’étudiant en ébénisterie conçoit des ouvrages mixtes mêlant bois massif et panneaux de bois mélaminé. l’étudiant suit des cours d’histoire de l’art et apprend la technique du placage.
La restauration minutieuse des stalles du chœur, en mars 2024. © Patrick Zachmann/Magnum Photos
Moulage et sculpture
« Nous travaillons le bois sec qui arrive généralement en atelier en »facture», soit un tronc découpé en planches. Que ce soit pour un projet de création ou de restauration, nous créons un plan. Dans le cas d’une restauration, nous veillons à utiliser le même bois autant que possible », explique Julien Bénéteau, menuisier formé chez les Compagnons du Devoir. Chef de chantier aux Établissements Giffard (Val-de-Marne), il fait partie de l’équipe de Wilfrid Leray, qui coordonne tous les métiers associés : le vernisseur-teinteur, les sculpteurs et le doreur. Les menuisiers retirent les éléments endommagés et les réinstallent à la fin de la restauration. En cas de manque de pièces, ils conçoivent des greffes pour les moulures et les éléments ornés sont confiés à un sculpteur sur bois.
Ciseaux à bois, outils indispensables pour les menuisiers. © David Bordes/RNDP
Depuis près de trente ans, Marcel Guignard, sculpteur sur bois formé à l’école Boulle et à l’École nationale supérieure des beaux-arts de Paris, restaure des pièces en bois sculpté et crée des décors. Pour reproduire les têtes d’angelots ornant les stalles du chœur, il a d’abord réalisé un dessin et une étude de modélisation, en s’inspirant des têtes existantes – toutes différentes – et en prenant soin d’entretenir cette diversité. Pour d’autres pièces, comme la poignée de l’épée de Saint Paul et la clé de Saint Pierre, Alexandre, le fils de Marcel Guignard, a développé une technique de moulage afin de prendre une empreinte de leur contrepartie encore intacte pour restituer les éléments manquants. « Après avoir coupé un morceau de bois et l’avoir tordu [découpé selon des profils complexes, ndlr]nous découpons avec des gouges et des fermoirs dans le sens du grain du bois existant »il élabore.
Vernis ou dorure
Une fois le bois assemblé ou sculpté, vient l’étape de finition dont le rôle est de protéger ou de décorer. Menuisier et ébéniste de formation, Bernard Cuissard devient vernisseur-teinteur aux ateliers Saint-Jacques, basés à Saint-Rémy-lès-Chevreuse (Yvelines), avant de prendre la direction de l’atelier de finition des Établissements Giffard. « Il n’y avait pas de formation à l’époque. J’ai formé une quinzaine de compagnons chaque année. C’est un métier passionnant qui demande une bonne connaissance du bois et de ses réactions en fonction des finitions. » il explique. Il existe différents types de vernis : le vernis tampon à base de gomme-laque, généralement appliqué au pinceau, et le vernis polyuréthane ou cellulosique, appliqué au pistolet. « Alors que le premier, le plus ancien, donne forcément un résultat brillant ; ces derniers offrent une finition extra mate à très brillante », précise-t-il.
Détail des éléments resculptés d’un ange musicien lors de la restauration. © David Bordes/RNDP
C’est à l’âge de 16 ans que Maxime Seigneury découvre le métier de doreur sur bois lors d’un stage d’une semaine dans l’atelier de son parrain. Il y reste trois ans tout en suivant un CAP Doreur en feuille ornementale à La Bonne Graine, école de meuble parisienne. Le doreur maîtrise deux techniques : la dorure à l’eau ou à la détrempe, et la dorure au mélange à base d’huile siccative. La dorure peut être réalisée sur différents supports : bois, cuir, plâtre, métal ou pierre. Pour le projet réalisé à Notre-Dame, Maxime Seigneury a repris les détails des statues ainsi que des feuillages et pistils de fleurs décorant la chaire de prédication, selon la technique de dorure mixte utilisée à l’époque. Selon lui, les qualités requises pour exercer le métier de doreur sont la patience et le calme pour pouvoir retenir son souffle lors de l’application de la feuille d’or.
Luis, cabinetmaker – Jobs on the Notre-Dame de Paris construction site