Roger Toulouse à Orléans : vaste palette kaléidoscopique

Roger Toulouse à Orléans : vaste palette kaléidoscopique
Roger Toulouse à Orléans : vaste palette kaléidoscopique

Dans le cadre magnifique de la collégiale Saint-Pierre le Puellier d’Orléans, rien n’est laissé au hasard et l’art fait les choses à merveille. Depuis ce vendredi 22 juin et jusqu’au 1er septembre, se tient dans le bâtiment une exposition exceptionnelle, une rétrospective composée de deux cent trente pièces du peintre, poète et sculpteur orléanais Roger Toulouse (1918_1994). « Présence et questions » est le titre de cette magnifique rencontre

By Jean-Dominique Burtin
Photos Valérie Thévenot

Une spatialité impressionnante sur les rails

Roger Toulouse Period 45-50 cl Valérie Thévenot

Cette rétrospective commémore de manière admirable le trentième anniversaire de la mort de l’artiste orléanais (1918-1994). Cent trente-trois tableaux, cinquante-six dessins, vingt et une sculptures proviennent du musée des Beaux-Arts d’Orléans, de la médiathèque départementale du Loiret, du Cercil et de trente-sept collections privées. Sous-titré « Présence et questionnement », c’est une reconnaissance et une somme de pièces essentielles à la compréhension de l’artiste qui est exposée et commentée. Il s’agit d’une proposition de la ville placée sous la curatelle de l’association des Amis de Roger Toulouse présidée par Abel Moittié. Spatial et défiant le temps, il permet de découvrir l’œuvre immense, intime, peinte, dessinée et sculptée d’un artiste qui a laissé une empreinte poétique et spirituelle sur la ville d’Orléans.

Chaque évocation est une galerie d’art

Bel itinéraire. Prendre un discours. Rétrospective captivante. Ici, le visiteur, qui connaît entre autres, de l’artiste, le groupe « La volonté humaine » sanctifiant le parvis du Théâtre d’Orléans, ou les mascarons ornant le fronton du Musée des Beaux-Arts de la ville, est invité pour découvrir, chronologiquement, toutes les facettes du travail de l’artiste dans un voyage aux fascinants embellissements de lignes et de formes. S’ensuit un minimalisme pudique, une langueur amoureuse, parfois pure et brute, et la beauté vertigineuse de regards hypnotiques flamboyants d’audace. Tout cela naît des gestes d’un artiste sensible, à l’expression émerveillée recevant ce que le siècle lui insuffle, avec ses grâces et ses horreurs, au cœur et à l’âme. Cela laisse place au doute d’un marin terrestre dont le corps est en lambeaux, saisi par les horreurs de la guerre.

Roger Toulouse Period 33-43 cl Valérie Thévenot

Ce vendredi, jour de l’ouverture, on ne peut que succomber au charme de découvrir des œuvres simplement colorées comme ce Portrait inachevé sur papier, des déclarations d’amour à Marguerite Toulouse, son épouse, dont une très jolie gouache, « Peggy » (1937) située à l’entrée de la collégiale. Place encore pour une œuvre remplie de plénitude, cette poésie murale sur un texte de Pierre Reverdy, « Shooting Star » (1983).

Hommage aux étudiants et compagnons de voyage

En hommage, l’exposition célèbre, à travers leurs œuvres et leurs paroles, ceux qui furent les élèves de Roger Toulouse à l’École des Beaux-Arts d’Orléans, à savoir Daniel Leclercq, Yann Hervis, Claude Bourdin, Gérard Audax. Tout cela se retrouve dans un précieux catalogue, témoin d’une longue histoire de l’art mis précieusement à la disposition du public. Dans ces dernières sont également évoquées les œuvres d’âmes frères, celles de Bernard Foucher et Jacquiy Leloup, également présentes sur le site.

Il est impossible ici de citer tous les auteurs qui ont accompagné le travail de l’artiste au fil du temps. Mais citons simplement l’écrit (1991) de Thierry Guérin, écrivain, journaliste à La République du Centre : « Les peintures de Roger Toulouse sont les œuvres d’un visionnaire, d’un artiste accompli. Ils sont le chemin et le recours, le chant et la prière ».

Une allégorie de l’humanité sur un fil

Lors de l’inauguration de cette exposition, sur le parvis de la collégiale, Abel Moittié évoque « l’homme-passion » et sa lucidité, son œuvre résolument inscrite dans la réalité de son temps, sa quête de sens, et cette recherche de l’équilibre signifié par l’affiche de cet accrochage, « Le funambule ». Abel Moittié : « C’est une allégorie de l’humanité sur un fil « . Puis Serge Grouard, maire de la ville, a fait écho au travail de l’artiste : « Cette exposition est un hommage profond et un moment enchanté qui fera date. C’est un témoignage de l’histoire d’Orléans. Voici les évocations d’une dimension d’artiste accompli, spirituel et puissant. Politique jusqu’à ses dernières œuvres témoignant de la guerre du Golfe. L’œuvre de quelqu’un qui n’a jamais recherché les honneurs et qui a toujours montré son attachement à la ville. Que serions-nous, que ferions-nous ou où irions-nous sans la présence des artistes ? Chaque commune est éphémère dans cette histoire multi-séculaire de l’art, mais elle se doit de rendre hommage à la création artistique. Certes modestement, mais volontairement. »

Pour heureux souvenir, la Ville d’Orléans, à la suite de cette exposition et à la demande d’Abel Moittié, la ville installera dans le Jardin Hélène Cadou, en septembre, la dernière œuvre monumentale de Roger Toulouse, aujourd’hui conservée dans l’église Saint-Euverte. . Elle est dédiée au poète René Guy Cadou. Ce dernier écrivait en 1948 : « Roger Toulouse est un long patient, un long mal qui n’espère qu’une lente amélioration dans les siècles à venir. ».

Une esthétique, une éthique, une unité dans la diversité

Roger Toulouse Period 60-71 cl Valérie Thévenot

Pour révéler une esthétique, une éthique, une unité dans sa diversité, un catalogue revient sur la biographie de l’artiste (1918-1994), sur les réussites de sa jeunesse, le retrait à Orléans, la période qualifiée de symboliste, les expositions au succès, aux triangles, aux sculptures. Parallèlement, le commissariat vous propose de suivre un parcours permettant de découvrir le peintre dans six espaces, dans six galeries appelés : le monde terre-à-terre ; de la vie d’un artiste à la guerre ; vers quelque chose au-delà de la réalité, le règne du triangle ; vers l’art’ap art en apesanteur ; un art des fractures et des lambeaux. Ici sont évoqués les liens avec Max Jacob, Picasso, le poète René Guy Cadou, Pierre Reverdy, etc. Au fil de plus de quatre-vingts publications, Roger Toulouse aura pratiqué toutes les techniques du genre, gravure au burin, lithographie, aquarelle gouache, collage, empreinte. Ami des poètes de l’Ecole de Rochefort, n’oublions pas qu’il fut lui-même l’auteur de trois recueils de poésie.

« À l’écoute du bruit du monde »

« Roger Toulouse est chez lui à Orléans où, depuis son atelier de la rue de L’abreuvoir, il a écouté sa vie au gré du bourdonnement du monde. » écrit Olivia Voisin, directrice du Musée des Beaux-Arts, dont la conservation de nombreuses œuvres, collection essentielle, constitue un fonds d’atelier. Et Olivia Voisin salue, à la lumière de la collégiale, la présence d’œuvres « emblématiques ».

En déambulant au cœur de cette exposition pleine de couleurs vives ou claires, aux traits nets ou souples, on tombera entre autres sous le charme d’un Paysage éthéré de 1934, se laissera surprendre par ce Nu couché jamais présenté au public, tout comme avec ce bouquet de fleurs de la collection Colette. Voici encore l’homme à l’oiseau d’une beauté bleue diaphane, le portrait doré de Suzy Solidor, la célèbre funambule qui constitue l’affiche de l’exposition. Mais voici encore ce dessin préparatoire de L’Homme en fuite de 1968, ce vitrail au plomb des ateliers de Limoges, les figures délicates des plats en porcelaine de la manufacture Haviland. A voir également, à travers seize vitrines, les outils de l’artiste, des plaques de cuivre et de zinc, des collages, des écrits, des photos mais aussi les maquettes du médaillon représentant le profil de Roger Toulouse, médaillon créé par Daniel Leclercq, œuvre qui vient de été installé rue Roger Toulouse dans la ville. Très réussi est également un mur d’affiches réalisé par Roger Toulouse pour des événements culturels à Orléans ou destinés au monde de l’entreprise. A noter que tout cela est à retrouver dans un diaporama, réalisé par Les Amis de Roger Toulouse et réalisé par Didier Laurenceau. C’est une pièce maîtresse de cette exposition tout comme la grande page de couverture de cette exposition écrite par Mac Baconnet. Derniers mots à Roger Toulouse : « Le tableau est un long silence coloré qui prend le cœur, le soulève et le tue. Le bonheur n’existe pas. L’art existe : C’est peut-être le seul bonheur ! »

Exposition Roger Toulouse, rétrospective
« Présence et questions ».

Collégiale Saint-Pierre le Puellier, 13, cloître Saint-Pierre le Puellier, Orléans. Jusqu’au 1er septembre. Ouvert du mardi au dimanche, de 14h à 18h
Fermé le lundi et les jours fériés.

Visites guidées : dimanches 7 et 21 juillet, 4 et 18 août et 1er septembre à 15h30

Renseignements du mardi au samedi de 14h à 18h : 02 .38.79.24.85.

Conférence de Marc Baconnet : la commémoration du 30e anniversaire de la mort de l’artiste s’accompagne d’une conférence donnée par Marc Baconnet, vice-président de la Amis de Roger Toulouse. Son titre : Les voyages de Roger Toulouse. Rendez-vous : jeudi 27 juin à 17h30, auditorium du Musée des Beaux-Arts d’Orléans. ENTRÉE LIBRE.

 
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