derrière les aides alléchantes de l’Etat, les Charentais mènent un parcours du combattant, « aujourd’hui je suis surendetté »

derrière les aides alléchantes de l’Etat, les Charentais mènent un parcours du combattant, « aujourd’hui je suis surendetté »
derrière les aides alléchantes de l’Etat, les Charentais mènent un parcours du combattant, « aujourd’hui je suis surendetté »

Plus de 5 000 euros d’aide promis

Son dossier dématérialisé MaPrimeRénov’ est constitué selon les règles de l’art : avis d’imposition, devis, facture des travaux… Tout y est. Sur la feuille, l’aide doit rapidement réduire sa facture de 5 000 € après une simulation. Une somme importante pour ce retraité aux revenus modestes. Depuis, plus rien. Sa vie dessine désormais les contours d’« un enfer quotidien », illustre-t-elle, impuissante.

Je suis endetté, je ne mange que des pâtes et du riz

«Quand on me demande de déposer un document complémentaire sur la plateforme, ça ne marche pas. Les conseillers téléphoniques ne répondent pas ou ne sont jamais les mêmes. Je suis sur le point de m’effondrer. » Depuis plusieurs mois, Caroline Bonnin est surendettée. « Je ne mange que des pâtes et du riz. Je ne peux même plus emmener mes petits-enfants à la mer. Ça me ronge à l’intérieur. »

Tenace, le retraité a alors jeté plusieurs bouteilles à la mer. « D’abord avec France Services. Ils m’ont aidé à entrer en contact avec l’ANAH (l’Agence nationale du logement qui coordonne ces aides, NDLR). À l’autre bout du fil, on m’a assuré que l’aide serait versée très prochainement. Ils m’ont même donné le nom de ma banque, preuve qu’ils avaient mon dossier sous les yeux. Ils m’ont dit que c’était accepté. » Mais jamais de manière écrite. Elle a ensuite frappé à la porte de René Pilato, député de la première circonscription de Charente. « Mais entre-temps, j’ai reçu une lettre m’informant que l’aide m’était retirée. Sans explication. » Elle a alors fait appel. C’est accepté.

Un parcours du combattant

« Mais maintenant, on me demandait de nouveaux papiers ! » De nouveau confrontée à un mur, elle a trouvé une oreille auprès de Françoise Marie, déléguée du Défenseur des droits, en Charente. Sur la table du défenseur des droits, environ 15% des dossiers charentais concernent des difficultés liées à MaPrimeRénov’. «C’est la complexité du système qui pose problème», assure Françoise Marie. « Cela évolue régulièrement. Initialement réservée aux revenus les plus modestes, sa portée s’est ensuite élargie. Il est parsemé de petites subtilités. Sources de refus réguliers de dossiers. »

Mais alors pourquoi tant de difficultés pour une subvention présentée comme « simplifiée » ? Caroline Bonnin n’est pas un cas isolé. « Un numéro de facture qui ne correspond pas, une date imprécise, une mention sur une facture… » Le délégué illustre avec un exemple récent. « J’ai une dame qui a déposé sa candidature après avoir commencé les travaux. Le projet doit être déclaré au préalable. Ce sera compliqué de soumettre votre dossier. » Une autre habitante de Valence témoigne également de son combat, qui vient d’être gagné. « J’ai opté pour le chauffage aux pellets, pour remplacer le chauffage au fioul. La prime est finalement arrivée fin avril 2024 alors que les travaux dataient de 2022. »

Le délégué charentais laisse cependant entrevoir une lumière au bout du tunnel. « L’ANAH a fait des efforts. Depuis janvier, elle s’est engagée à nous répondre systématiquement. Ce qu’elle ne faisait pas auparavant. Les dossiers sont en cours de finalisation, j’ai bon espoir pour Caroline Bonnin. Il s’agit d’un détail de facture. Sur la forme, il reste encore un grand manque d’informations. S’il y avait plus d’éducation, tout irait mieux. Avoir le silence devant soi, quand on est endetté, c’est très difficile », déplore Françoise Marie.

Vol d’identité

Hervé Servat, directeur de la DDT Charente (Direction Départementale des Territoires) et la délégation locale de l’ANAH, tempère le sentiment de réprimande. « En trois ans, 15 000 propriétaires ont été aidés en Charente. Globalement, on parle de 5% de dossiers datant de plus de 6 mois. Je ne sape pas. Il est vrai que des dizaines de dossiers sont en attente. Je suis conscient des difficultés auxquelles certains ménages sont confrontés. »

L’espace France Rénov est une porte d’entrée vers les questions liées à la rénovation. En Charente, GrandAngoulême habitat et GrandCognacRénov’ représentent ce service public sur ces deux territoires. Dans le reste du département, c’est la responsabilité de CAUE (Conseil d’Aménagement Architectural, d’Urbanisme et d’Environnement). «Quand on se lance seul, il y a de fortes chances de ne jamais atteindre ses objectifs», reconnaît le conseiller Michael Charruault. “Il y a eu beaucoup d’usurpations d’identité et des procédures de contrôle plus poussées.” D’autres personnes passent entre les mailles du filet des escroqueries. « En suivant de fausses entreprises. Ils ont déposé des avis d’imposition, etc. Lorsqu’ils demandent effectivement de l’aide, un compte existe déjà à leur nom. Et là, c’est une douche froide», explique-t-il. En Charente, plusieurs dossiers restent toujours en suspens. L’ANAH promet d’accélérer le rythme.

Un fort ralentissement des demandes

Face à la baisse des demandes au premier trimestre 2024, le gouvernement a annoncé de nombreuses dispositions pour relancer les actions uniques financées par MaPrimeRénov’. Depuis le 15 mai, il n’est plus obligatoire d’installer un système de chauffage ou de production d’eau chaude pour avoir accès au bonus. Un arrêt supprime jusqu’au 31 décembre 2024 l’obligation de fournir un DPE pour obtenir une aide financière pour ces actions uniques.

Côté bâtiment, ça va mieux !

Depuis la création de la prime en 2020, plusieurs sociétés mandataires ont elles-mêmes constitué des dossiers d’aide pour leurs clients. Ils avancent le montant de la prime, et certains n’ont jamais été remboursés ou très tardivement. Aujourd’hui, David Léobet, secrétaire général de la CAPEB Charente relativise. « Cela n’a plus rien à voir avec les problèmes du passé. On constate une montée en compétences des agents de l’ANAH, mais aussi des entreprises. Il suffisait de connaître le système et de le maîtriser. Ils restent forcément des moutons à cinq pattes. Nos entreprises veillent à recevoir les paiements à temps.

 
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