Le Comité de langue française de la Ville de Montréal, présidé par l’ancienne ministre Louise Harel, a déposé son rapport final le 9 octobre. Présentant plusieurs recommandations ambitieuses, le document appelle l’administration de Valérie Plante à s’engager directement envers le français, tant sur le plan politique qu’institutionnel.
Trois ans après que Montréal a lancé son plan d’action pour promouvoir la langue française, une approche proactive s’impose désormais. La métropole doit adopter des mesures structurantes pour renforcer le français comme langue commune et enfin mettre en œuvre son principe d’interculturalité à travers des orientations et des pratiques concrètes.
Pour assurer une réelle prise en compte du français par Montréal, trois recommandations du comité se démarquent.
Premièrement, la conclusion d’une entente-cadre avec le ministère de la Langue française du Québec assurerait un financement global à la Ville, alors que l’aide gouvernementale actuelle est destinée à des projets précis et de portée limitée. temps.
Le comité propose également la création d’un Office de la langue française et de la francophonie pour structurer les actions de la Ville dans ces domaines. Actuellement, alors que le commissaire à la lutte contre le racisme et la discrimination systémique à Montréal dispose d’une équipe, le commissaire à la langue française travaille presque seul. Cette situation est incompatible avec un réel engagement envers le français.
Finalement, le comité recommande de revoir la planification stratégique Montréal 2030 afin d’ajouter le français comme priorité. Si l’administration Plante souhaite être cohérente, elle doit intégrer cette vision dans le document qui guide l’ensemble de ses actions. Des indicateurs et des cibles doivent également être mis en place pour assurer le suivi.
Ces trois mesures sont essentielles pour améliorer concrètement la situation des français à Montréal. Mais est-ce à la métropole d’assumer ce rôle ?
Rôle des élus locaux
Le principal obstacle à l’engagement de Montréal envers le français est l’idée que cette question relève de la responsabilité exclusive du gouvernement provincial. Cependant, cette lecture ignore les profondes transformations du milieu municipal au cours des 20 dernières années.
Dans son essai Libérez les villes (2023), l’ancien maire de Gatineau Maxime Pedneaud-Jobin illustre bien ce changement lorsqu’il décrit le nouveau rôle des élus locaux. Selon lui, nous sommes en passe de dépasser le concept étroit selon lequel les municipalités doivent se cantonner à leurs mandats traditionnels, comme la collecte des déchets. Il est désormais légitime pour nos collectivités locales d’intervenir au-delà de leurs compétences, notamment pour assurer une meilleure cohésion sociale sur leur territoire.
Depuis 2020, un large consensus existe tant au niveau provincial que fédéral : des actions doivent être menées à tous les niveaux pour renforcer la place du français. Le niveau municipal ne fait pas exception, car soutenir notre langue commune permet à chacun de participer à la société québécoise, sans laisser personne de côté.
Le rapport du comité fait de l’interculturalisme l’un de ses principes directeurs. « Montréal, en tant que métropole plurielle et francophone, est un point d’ancrage majeur de la société d’accueil québécoise », lit-on. La langue française occupe une place centrale, essentielle à ce modèle d’inclusion et de vivre-ensemble que la Ville prétend soutenir depuis plus de 30 ans.
En 1991, le maire Jean Doré a reconnu l’interculturalisme comme l’approche officielle de Montréal. Plus récemment, l’administration Plante a réaffirmé son adhésion à ce principe dans son Plan d’action pour la promotion de la langue française. Elle exprime son souhait « de créer des liens entre les différentes communautés culturelles autour de la langue française », dans le but de créer « un attachement et un sentiment d’appartenance à la société francophone québécoise ».
Cependant, malgré ces déclarations, Montréal n’a jamais véritablement traduit cet engagement en orientations et actions concrètes. La municipalité semble plutôt adopter une approche ambiguë qui minimise le rôle de la société d’accueil du Québec et de sa majorité francophone. La cohérence de l’intervention de la Ville en faveur du français nécessite la mise en œuvre d’une interculturalité qui se fait encore attendre.
Le rapport déposé cette semaine pourrait marquer un tournant historique. Montréal est-elle prête à passer des paroles aux actes pour promouvoir le français ?