Le Québec ne vous a pas oublié

Le Québec ne vous a pas oublié
Le Québec ne vous a pas oublié

Chère Ti-Lilly,

Aujourd’hui, le Québec commémore les cinq ans de votre décès, survenu le 30 avril 2019. Nous nous souvenons de vous, décédé beaucoup trop tôt. Nous nous souvenons de la souffrance que vous avez vécue et des mauvais traitements que vous avez subis. À l’époque, vous n’aviez que sept ans et vous aviez toute la vie devant vous.

Depuis ce jour, votre mort suscite en nous colère, honte et douleur. Cela a laissé une cicatrice dans nos cœurs, celle de notre échec collectif à faire respecter les droits des enfants et la protection des jeunes, à accompagner et soutenir les familles pour prévenir les abus.

Depuis ce jour, nous avons pris conscience de cet échec. Nous avons été indignés, puis nous avons agi.

De l’indignation à l’action

Avec la création de la Commission spéciale sur les droits des enfants et la protection de la jeunesse par le gouvernement du Québec, nous avons voulu comprendre ce qui ne fonctionnait pas dans nos services à l’enfance et apporter les correctifs nécessaires. Nous voulions apprendre de nos erreurs, Ti-Lilly, pour que ta mort ne soit pas vaine.

En tant que président de cette commission, mon objectif était donc clair : faire en sorte qu’aucun autre enfant et aucun autre jeune ne vive le même drame que vous ou toute autre forme de maltraitance.

Il y a près de trois ans, nous avons soumis le rapport final de la Commission et nos recommandations au gouvernement. Le travail accompli en deux ans est colossal : 65 recommandationsACTIONS formulées, 4 072 témoignages recueillis, 233 mémoires déposés, 42 forums régionaux organisés et 1 590 appels et emails reçus.

À la fin de la Commission, nous avons constaté qu’il fallait opérer un virage majeur axé sur la prévention et rendre le Québec plus attentif à nos enfants et à nos jeunes.

Pour y parvenir, plusieurs changements législatifs et structurels ont été recommandés au gouvernement afin de mettre l’intérêt de l’enfant au cœur des décisions. La mise en place d’un commissaire au bien-être et aux droits des enfants, qui serait chargé de veiller aux droits de tous les enfants du Québec et de porter leur voix dans l’espace public, en est un exemple. Le ministre a également présenté un projet de loi à l’Assemblée nationale visant à créer le poste de commissaire à la protection de l’enfance. Il est actuellement étudié par les parlementaires.

Mais comme tout projet social impliquant un changement culturel, cela prend du temps. Et dans ce cas, Ti-Lilly, nous parlons d’au moins dix ans.

Sur la bonne voie

Malgré tout, grâce à la détermination du ministre responsable des Services sociaux, M. Lionel Carmant, 32 des 65 recommandationsACTIONS du rapport sont mises en œuvre et 11 autres ont déjà été réalisées. Le poste de Directeur National de la Protection de la Jeunesse a été créé et comblé, il doit asseoir son leadership. La réforme de la protection de la jeunesse a été adoptée et le principe de l’intérêt de l’enfant a été inscrit dans la loi. La majorité des travailleurs ont complété leur formation sur cette nouvelle loi et ont obtenu des primes de rétention dans leur nouvelle convention collective.

Les travaux ne sont pas terminés, loin de là. Mais je peux t’assurer, ma belle Ti-Lilly : j’ai confiance que notre société est sur la bonne voie. Le travail continue et le grand virage est bien engagé, nous ne reviendrons pas en arrière. Notre destination reste la même, celle d’un Québec soucieux de ses enfants et de ses jeunes.

Le Québec ne t’oublie pas, ma chère Ti-Lilly, et tout comme moi, il ne t’oubliera jamais.

Régine Laurent, ancienne présidente de la Commission spéciale sur les droits de l’enfance et la protection de la jeunesse

 
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