« Les patrons des chaînes de télévision étaient réticents à l’idée d’avoir une petite héroïne noire »

« Les patrons des chaînes de télévision étaient réticents à l’idée d’avoir une petite héroïne noire »
Descriptive text here

La petite fille, il est vrai, rassemble tous les codes pour s’imposer aujourd’hui dans la littérature jeunesse. Africaine, plus intrépide que jamais, élément perturbateur mais choyé de la famille, elle raconte, à travers ses aventures, le quotidien de la Côte d’Ivoire, loin des clichés occidentaux. Impertinente comme trois mecs, elle n’hésite pas à prendre sa place et la dépense sur le terrain de foot, après avoir enfilé sans vergogne le maillot de son frère. Il n’en faut pas beaucoup pour qu’une bagarre éclate et se termine à la maison après une course-poursuite sauvage et quelques noms mignons.

Mardi Gras et le déguisement ad hoc feront l’objet d’autres discussions. Pas question pour Akissi, comme vous l’aurez deviné, de se déguiser en princesse. Les quiproquos, quant à eux, véritables ressorts narratifs, alimenteront de délicieux quiproquos pour d’incroyables aventures d’une belle nervosité sous le crayon généreux de Mathieu Sapin.

La mère étouffante de Mathieu Sapin

Pourtant, rien ne prédestinait cette jeune Ivoirienne à être aussi actuelle, comme nous l’explique Marguerite Abouet. “Quand je suis arrivé à Paris, en 1983, pour entrer au collège, les autres élèves m’ont beaucoup posé des questions sur la vie en Afrique. Ils se demandaient même si nous allions à l’école, si nous avions des maisons ou des voitures ! Je n’y croyais pas parce que nous, dans le pays, savions comment se passait la vie en Europe, notamment grâce à la télévision. Un jour, j’ai décidé d’écrire mon histoire dans un journal car j’avais quitté mon pays contre mon gré et j’avais peur d’oublier d’où je venais. Mon adolescence est passée et puis, pendant mes études, j’ai lu des livres jeunesse aux enfants et j’ai commencé à leur raconter mon enfance. Ils ont regretté qu’il n’existe pas de livres sur l’enfance africaine. »

Marguerite Abouet rencontre alors le dessinateur Clément Oubrerie et lui fait lire ses histoires, ce qui lui inspire la création d’une bande dessinée. Elle présente son projet à Gallimard, histoire d’avoir un avis, sans grand espoir, ignorant que la maison d’édition vient de créer une nouvelle collection de bandes dessinées. Gallimard demande alors à l’auteur de “vieillir” un peu son personnage, pour qu’il soit une adolescente. C’est ainsi que sa première bande dessinée, Aya de Yopougon, imaginé avec Clément Oubrerie, voit le jour. Saluée par le public et la critique, la série donne lieu à un long métrage.

Aya et ses sœurs

L’univers de Mathieu Sapin

Akissi, quant à lui, attendait son tour. Toujours inspiré par l’univers graphique de Clément Oubrerie, il est lancé en 2010 et connaît un succès immédiat. Clément Oubrerie, trop occupé par la série Aya, a passé le crayon à Mathieu Sapin. Arprolix tist, qui a multiplié les succès et les brillants, entre autres grâce à La campagne présidentielle, ce qui lui vaut une accréditation à l’Élysée pour dessiner les coulisses du palais, Mathieu Sapin a également suivi Depardieu pour une bande dessinée déjà édifiante, Gérard, cinq ans aux mains de Depardieu. “Akissi a été dessiné à partir de photos de moi étant enfant. En fait, j’avais des petites tresses et des perles comme elle. J’aime beaucoup l’univers de Mathieu Sapin car il est à hauteur d’enfant. Souvent, les artistes sont mal à l’aise à l’idée de dessiner des personnages noirs, comme si nous avions tous des caractéristiques identiques.

Série à succès, recommandée par l’Éducation nationale, Akissi sera donc adaptée en dessin animé pour une série télévisée, disponible sans doute en 2025. Un épisode pilote de 26 minutes, co-réalisé par Alexandre Coste et Marguerite Abouet, existe déjà et a convaincu le les jeunes téléspectateurs beaucoup plus facilement que les patrons des chaînes de télévision et autres distributeurs »,réticent à avoir une petite héroïne noire»!

Akissi | Bande dessinée | Marguerite Abouet et Mathieu Sapin | Gallimard, , 48 pp., 11,50 €. A partir de 4 ans.

 
For Latest Updates Follow us on Google News
 

PREV Ce champion du monde de la mémoire livre son redoutable tour à ceux qui oublient tout
NEXT plongez dans le monde mystérieux des livres anciens ce week-end