La scène était trop belle. Dépêchée à Damas, tout juste libérée du joug de Bachar Al Assad, pour retrouver son ami américain Austin Tice, incarcéré dans une prison secrète syrienne depuis son arrestation en 2012, la journaliste Clarissa Ward s’engouffre dans l’un de ces instituts pénitentiaires où la torture et la répression étaient légions. . Le « correspondant international en chef » de la chaîne CNN, accompagné d’un groupe d’individus armés, y a découvert une forme suspecte, enfouie sous des couvertures, au fond d’une cellule. Un homme s’approche, tire le tas de morceaux de tissu et découvre ce qui semble être un détenu. Le tout filmé par la caméra de CNN et sous les yeux d’une Clarissa Ward étonnée.
S’en suivent plusieurs séquences, où le journaliste le fait sortir de prison, lui apprend que le régime est tombé, lui apporte de l’eau et l’interroge sur son parcours. L’individu affirme avoir été arrêté par le Mukhabarat, le service de renseignement militaire syrien, et interrogé pour donner les noms de terroristes. Le sort de « Adel Gharbal », ce prisonnier syrien de « ville de Homs »dans l’ouest du pays, et en cellule “pendant trois mois”au centre d’un reportage diffusé jeudi 12 décembre, devenu ensuite viral.
« Vol, extorsion et coercition contre les habitants »
Or, ce n’est pas le cas, selon le média syrien de vérification des faits Verify-sy. Le site d’enquête révèle, dans une contre-enquête publiée dimanche 15 décembre, que « Adel Gharbal » a menti sur son identité et ses conditions de détention. Il s’agit en réalité de Salama Mohammad Salama, premier lieutenant des services de renseignement de l’armée de l’air syrienne.
Connu sous le nom d’Abou Hamza, il dirigeait plusieurs postes de contrôle de sécurité dans la ville de Homs et était « impliqué dans des vols, des extorsions et la contrainte de résidents à devenir des informateurs »résume Verify-sy. Selon les habitants du quartier d’Al-Bayada interrogés par les médias d’investigation, son incarcération – “qui a duré moins d’un mois” – est dû à un différend avec un officier supérieur, sur fond de partage des bénéfices des fonds extorqués.
Dès la diffusion du reportage de CNN, le hasard de cette rencontre, tout comme l’état physique d’« Adel Gharbal » (propre, sans blessure apparente et en bonne santé physique), ont interpellé plusieurs spectateurs. Clarissa Ward ne semble pas surprise que cette dernière soit la dernière détenue à rester captive dans la prison, plusieurs jours après la chute du régime, dimanche 8 décembre. “L’homme, caché sous une couverture malgré les coups de feu tirés pour forcer la serrure de sa cellule, a affirmé qu’il n’avait pas vu la lumière du soleil depuis trois mois.fustige les médias syriens. Cependant, sa réaction ne correspondait pas à cette déclaration : il n’a pas bronché ni cligné des yeux, même en levant les yeux vers le ciel, apparemment ravi de sa nouvelle « liberté ». »
Surtout, « malgré son attitude apparemment innocente et calme dans le reportage de CNN »Verify-sy révèle qu’Abou Salama a participé à des opérations militaires sur plusieurs fronts à Homs en 2014. Des opérations au cours desquelles il a tué des civils et a été responsable de la détention et de la torture de nombreux jeunes hommes, sans raison ou sur la base d’accusations fabriquées de toutes pièces.
« Beaucoup ont été ciblés simplement parce qu’ils refusaient de verser des pots-de-vin ou de coopérer, ou même pour des raisons arbitraires telles que leur apparence.annonce le site de vérification des faits. Ces détails ont été corroborés par les familles des victimes et les anciens détenus qui ont parlé avec Verify-Sy. » Le site d’enquête a par la suite mis la main sur une photo montrant Abou Salama, vêtu d’un uniforme militaire, dans son bureau.
Ces révélations soulèvent de nouvelles questions : Clarissa Ward et son équipe de tournage étaient-elles au courant ? Jusqu’où Abou Hamza est-il allé pour apparaître comme un détenu civil, sans lien avec le régime autoritaire de Bachar Al Assad ? Interrogée par ses confrères de CNN sur son ressenti lors du tournage de ce reportage, Clarissa Ward a expliqué : « Être témoin d’un moment aussi surréaliste, voir une personne dans un état de joie absolue d’un côté et complètement traumatisée de l’autre, est quelque chose qu’aucun de nous ne pourra oublier. » De futures clarifications à ce sujet pourraient remettre en cause cette « Moment tellement surréaliste ».
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