« Le fer de lance d’une guerre totale est l’islamisme radical et le judaïsme radical »

Le 22 novembre 2007, un homme marche le long du mur de séparation entre le camp de réfugiés palestiniens de Shuafat et le quartier juif de Pisgat Zeev à Jérusalem-Est. Cette barrière de sécurité, dont la construction a débuté en 2002 par Israël, est censée empêcher l’intrusion de terroristes palestiniens dans l’État juif. PRESSE ASSOCIÉE

Professeur de sciences politiques à l’Université ouverte d’Israël (Raanana), Denis Charbit concentre ses recherches, entre autres, sur le sionisme et Israël. Parmi ses publications en français : Sionismes : textes fondamentaux (Albin Michel, 1998), Qu’est-ce que le sionisme ? (Albin Michel, 2007), Retour à Altneuland ou le voyage à travers les utopies sionistes (Éditions de l’éclat, 2018), Israël et ses paradoxes (Le Cavalier Bleu, 2023).

L’impact du massacre du 7 octobre 2023 perpétré par le Hamas a été terrible en Israël et a donné lieu à une condamnation largement unanime. Pourtant, près de neuf mois plus tard, nous nous trouvons dans une sorte d’impasse stratégique et diplomatique. Vous êtes israélien, comment analysez-vous cette situation ?

Le massacre du 7 octobre marque un tournant dans la perception qu’ont les Israéliens du conflit israélo-palestinien. Jusqu’alors, ils n’étaient pas divisés sur ses causes profondes – le rejet arabe d’Israël – mais sur la solution à y apporter. Il y a toujours, d’un côté, les partisans d’une solution à deux États et, de l’autre, les partisans de l’annexion de la Cisjordanie. Les premiers, qui votent à gauche et au centre, s’opposent à tout prix à la colonisation de la Cisjordanie ; les seconds, qui votent à droite et à l’extrême droite religieuse, réclament une expansion sans entrave des colonies.

Cet article est tiré du « Le Monde Hors-série : 40 cartes pour comprendre le conflit israélo-palestinien »Juillet 2024, en vente en kiosque ou en ligne en visitant le site de notre boutique.

Le conflit s’est réduit à des tensions sporadiques avec le Hamas et à des soulèvements de courte durée en Cisjordanie, qui n’ont jamais atteint l’ampleur d’une Intifada. Finalement, un modus vivendi a été établi en vertu duquel Israël a permis au Qatar de subventionner le Hamas. Le Premier ministre, Benjamin Netanyahu, a déclaré avec assurance que le problème palestinien était devenu marginal, qu’il n’intéressait plus personne. Les accords d’Abraham, en 2020, ont confirmé que ce qui préoccupait les pays signataires était leur prospérité respective, et non le sort des Palestiniens qui, par leur refus et leur radicalisme, avaient fini par se lasser.

Par ailleurs, en l’absence de paix, la création cinématographique et littéraire au « nation des start-ups », de l’excellence scientifique aux bars gays de Tel-Aviv, la société fait preuve d’un dynamisme indéniable qui contraste avec le blocage côté palestinien. Le retrait de territoires prôné par la gauche ainsi que l’annexion réclamée par la droite étant invraisemblables, les notions de droite et de gauche prirent alors un autre sens, s’opposant à ceux qui souhaitaient placer sous tutelle l’indépendance de la justice. à ceux qui croyaient sincèrement que cela “réforme” mettait en péril la démocratie israélienne. L’avenir de la démocratie était au cœur des débats, à l’image de ce qui se passe en Europe : démocratie illibérale versus démocratie libérale (au sens politique du terme). Le réveil fut brutal.

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