La « lettre de divorce » des libéraux
Si le désaccord au sein du gouvernement n’est pas nouveau, il s’est intensifié la semaine dernière, avec la publication d’un document de 18 pages du ministre libéral (FDP) Christian Lindner visant à redresser l’économie allemande. Cela va effectivement au pire. L’Allemagne devrait connaître une deuxième année consécutive de récession, voit le chômage augmenter et croule sous les mauvaises nouvelles industrielles, entre les plans de restructuration de Volkswagen et le gel de mégaprojets industriels comme l’implantation d’Intel à Magdebourg. Christian Lindner propose donc une série de mesures basées sur trois principes : une baisse des impôts, une nouvelle politique environnementale et davantage d’incitations au travail. Cela inclut par exemple un report des objectifs de neutralité climatique de 2045 à 2050, la suppression du fonds climat ou encore la suspension de la loi sur les conventions collectives…
Si ces mesures ont été bien accueillies par les représentants des milieux économiques, cela « un tournant économique » est diamétralement opposée à la politique menée depuis trois ans par le gouvernement et aux positions des deux autres partenaires, écologistes et sociaux-démocrates. “Ce document s’apparente à une lettre de divorce”écrivait le quotidien berlinois ce week-end Miroir quotidien. «Il n’y a quasiment aucun point sur lequel un accord entre les membres de la coalition serait possible. Pour le dire poliment, c’est une bonne boule puante politique pour tout le monde. »juge ce journal.
Avec ce document, Christian Lindner tente d’amener le gouvernement à entreprendre un (impossible) revirement à 180 degrés de la politique économique du pays. Ou, si elle n’est pas suivie, autoriser une sortie du gouvernement, ouvrant ainsi la voie à des élections anticipées ? Ou se lance-t-il simplement dans une campagne électorale, à onze mois des élections législatives, en misant tout pour convaincre ses électeurs ? Les intentions de vote sont en effet désespérées pour les libéraux du FDP, crédités de seulement 4% des voix, et qui pourraient échouer à entrer au Bundestag.
De plus en plus affaibli, le chancelier allemand Olaf Scholz obtient un répit lors d’élections régionales face à l’extrême droite
Scholz tente de sauver les meubles
C’est dans ce contexte ultra tendu que le chancelier Scholz a ordonné une série de rencontres en face-à-face avec Christian Lindner et le ministre des Verts Robert Habeck dimanche et jusqu’à mercredi pour tenter de mettre fin à cette cacophonie. L’objectif affiché est avant tout de passer l’épreuve décisive du budget fédéral 2025. Les trois partenaires de la coalition doivent encore trouver 2,5 milliards d’euros d’ici le 14 novembre pour remplir le budget. Un échec marquerait la fin assurée du gouvernement.
Des élections anticipées ? Certains à droite n’espèrent que cela, comme le quotidien conservateur Le monde qui a appelé Olaf Scholz dimanche, «pour mettre fin à sa coalition». « Ce gouvernement est devenu un facteur d’insécurité. Les trois partis qui gouvernent ensemble parlent désormais plus mal les uns des autres et du gouvernement commun que ne le font l’opposition et les observateurs politiques. »observe le journal. Envie ou réalité, la droite conservatrice CDU/CSU, en tête des intentions de vote, s’apprête en tout cas déjà à prendre la tête du pays… tôt ou pas.