L’ESSENTIEL
- Fin 2023, la couverture vaccinale contre le VPH est de 54 % chez les jeunes filles pour une dose et de 25 % chez les garçons.
- Les médecins de la SFCPCV rappellent que l’efficacité de ce vaccin contre les cancers induits par le virus HPV est établie, démontrée et incontestable.
- Plus la vaccination est effectuée tôt, plus le risque de cancer du col de l’utérus ou de lésions précancéreuses est faible.
Cancer du col de l’utérus, mais aussi ORL, de l’anus, du pénis ou encore de la vulve et du vagin… Toutes ces pathologies sont induites par les papillomavirus humains. Pour les femmes comme pour les hommes, la vaccination – de préférence avant l’âge de 14 ans – est l’un des moyens les plus efficaces de prévenir ces maladies.
Si ce message a été largement entendu dans de nombreux pays européens comme le Royaume-Uni, l’Espagne ou l’Italie, il reste encore assez diffus en France compte tenu de sa couverture vaccinale. La Société Française de Colposcopie et de Pathologie Cervico-Vaginale (SFCPCV) a profité de son 48e congrès national organisé du 9 au 11 janvier 2025 à Montrouge pour rappeler l’importance du vaccin anti-HPV et son efficacité.
Cancer du col de l’utérus : plus on vaccine tôt, plus le vaccin est efficace
Presque toutes les personnes sexuellement actives seront infectées par le virus du papillome humain à un moment de leur vie. « Depuis le premier rapport sexuel jusqu’à 30 ans, 30 % des femmes d’une tranche d’âge peuvent être porteuses d’un virus. Le virus s’attrape donc généralement entre 17 et 25 ans. Et pendant cette période, chaque année, 20 % des femmes sont infectées par un nouveau HPV. »confirme le Dr Jean-Luc Mergui, membre du bureau de la SFCPCV lors d’une conférence de presse. Ainsi, en moyenne à 44 ans, 80,9 % des patients ont contracté le virus HPV. Observation similaire chez les hommes. De leur côté, ils sont 89%. « En revanche, quand on regarde la probabilité de contracter le virus après 45 ans, elle est très faible. Elle est de l’ordre de 1%. Le virus se contracte réellement au début de la vie sexuelle”précise le spécialiste.
De plus, si les risques d’être en contact avec le VPH augmentent avec le nombre de partenaires, un seul peut suffire. La probabilité pour une femme n’ayant eu qu’un seul partenaire d’être infectée par le virus du papillome humain est de 49 % jusqu’à 44 ans. Elle passe à 74 % avec deux partenaires et à 88 % entre 3 et 6 partenaires. Ce sont ces observations qui ont conduit la Haute Autorité de Santé à recommander la vaccination contre le papillomavirus humain à l’adolescence. Pour mémoire, les recommandations prévoient un schéma vaccinal à deux doses si la personne a entre 11 et 14 ans, et trois doses si elle a entre 15 et 19 ans. Et cela vaut aussi bien pour les filles que pour les garçons.
« L’efficacité de la vaccination sur la pathologie cervicale est extrêmement importante »rappelle le professeur Xavier Carcopino, président de la SFCPCV. « Il s’agit d’un vaccin basé sur une protéine qui ressemble à une protéine virale et qui crée une immunogénicité très efficace. Sa première grande efficacité est de prévenir l’infection chronique par les HPV, facteur de risque du cancer du col de l’utérus et des cancers induits par les HPV (ORL, pénis, anus… NDLR).» Une étude réalisée au Royaume-Uni, où la vaccination contre les papillomavirus a été largement adoptée, montre que le risque de cancer du col de l’utérus est réduit de 87 % pour les jeunes filles vaccinées entre 12 et 13 ans, et de 62 % entre 14 et 16 ans. et 34% pour les 16-18 ans. Les scientifiques estiment que cela représente 448 cancers évités.
« Quand on parle au grand public du cancer du col de l’utérus, c’est une maladie un peu oubliée, car devenue rare grâce au dépistage. En revanche, les lésions précancéreuses du col de l’utérus sont extrêmement fréquentes. 30 000 femmes sont soignées chaque année et pour toutes ces femmes, c’est un calvaire, car le traitement affecte la sexualité et la fertilité.souligne le professeur Carcopino. Cependant, le vaccin réduit également ce risque.
Des travaux britanniques ont révélé que les adolescentes vaccinées entre 12 et 13 ans étaient 97 % moins susceptibles de présenter des lésions précancéreuses au niveau du col de l’utérus. Le taux était de 75 % pour les vaccinés entre 14 et 16 ans et de 39 % chez les 16-18 ans. « Ainsi, plus on vaccine tôt, plus le vaccin est efficace. De plus, cette efficacité est établie, démontrée, non contestable dans la littérature scientifique avec de nombreux essais, méta-analyses et études qui valident tous le même résultat. »ajoute l’expert.
« Il faut désexualiser le vaccin anti-HPV »
Malgré ces données rassurantes, la France reste en retard sur la question de la vaccination anti-HPV par rapport à ses voisins européens. Fin 2023, la couverture vaccinale est de 54 % chez les jeunes filles pour une dose et de 44 % pour un schéma complet (2 ou 3 doses). Chez les garçons – pour qui la vaccination n’est recommandée que depuis 2021 – les taux sont de 25 % pour une dose et de 15 % pour un schéma complet. Ces chiffres sont bien en deçà des objectifs gouvernementaux qui visent 65% de filles vaccinées avec une dose d’HPV1 et 47,7% pour les garçons. Et plus encore, l’objectif de 80 % de personnes vaccinées d’ici 2030. Cela représente un retard cumulé de 2 millions de personnes non vaccinées âgées de 20-26 ans.
La campagne de vaccination dans les collèges pour les élèves de 5ee, lancé à la rentrée 2023, devrait gommer ce retard. Mais le soutien des parents et adolescents est très limité et s’explique en partie par un manque de communication et de pédagogie au sein des établissements. « Cependant, nous devons être optimistes. Depuis la mise en place de la vaccination dans les écoles, il y a vraiment eu une nette progression entre 2022 et 2023. »note le docteur Julia Maruani, vice-présidente de la SFCPCV. « Cette campagne a le mérite de faire reparler de la vaccination. J’ai beaucoup de patients qui en consultation m’ont posé des questions sur le vaccin de leur enfant”ajoute le médecin.
Cette ouverture de dialogue vient rappeler que la vaccination ne se limite pas aux murs du collège. Cela peut être fait par un médecin, une infirmière ou une sage-femme, mais également en pharmacie. En effet, les pharmaciens et infirmiers sont également autorisés à prescrire et administrer le vaccin contre le VPH à partir de 11 ans. « Cela a été mis en œuvre en parallèle de la campagne dans les collèges et c’est une vraie avancée. Cela simplifie le processus pour les parents »ajoute le Dr Julia Maruani.
Au-delà de l’éducation et de la facilitation de l’accès au vaccin, un autre point semble essentiel aux médecins du SFCPCV pour favoriser l’augmentation de la couverture vaccinale et prévenir les pathologies induites par les papillomavirus humains : « Il faut désexualiser le vaccin anti-HPV. Ce n’est pas un vaccin contre un virus sexuellement transmissible, mais contre le cancer”conclut le Professeur Geoffroy Canlorbe, Secrétaire Général de la SFCPCV.