En France, le nombre de cas de rougeole déclarés a été multiplié par huit en 2023, soit 117 cas contre 15 en 2022 (1). Rien n’est comparable aux taux élevés de la maladie dans le reste du monde, notamment dans certains pays d’Afrique, du Moyen-Orient et d’Asie où l’accès à la vaccination est plus difficile. Toujours. La rougeole revient sur le devant de la scène.
« Grâce à la vaccination, la rougeole avait quasiment disparu en Europe jusque dans les années 2000indique le Professeur Yves Gillet, chef des urgences pédiatriques à l’hôpital femme-mère-enfant et chef de l’équipe mobile infectiologie pédiatrique au sein des Hospices Civils de Lyon. Son retour en force en Europe, et notamment en France, n’est pas surprenant compte tenu de la baisse des taux de vaccination observée ces dernières années. Certes, les chiffres sont faibles, mais tous ces cas sont évitables, et il est inacceptable de voir encore des gens mourir d’une maladie facilement évitable sous nos latitudes ! »
La rougeole, une maladie très contagieuse aux symptômes non spécifiques
Fatigue extrême, toux, forte fièvre, nez qui coule, yeux rouges et larmoyants… Tels sont les symptômes de la rougeole. Ils apparaissent généralement 10 à 14 jours après l’exposition au virus. ” Mais ces symptômes d’une grippe peuvent également être ceux d’une multitude d’autres maladiesexplique le professeur Gillet. Le problème de la rougeole, c’est qu’une fois contractée, elle débute le plus souvent par un gros rhume durant lequel on est très contagieux, même si on ne sait pas encore qu’il s’agit de la rougeole. ! « .
En fait, l’éruption cutanée apparaît seulement quelques jours après les premiers symptômes de la maladie. Il se manifeste par petites taches très rouges qui apparaissent d’abord sur le visage puis s’étend progressivement sur tout le corps. Contrairement à la varicelle, les boutons de rougeole ne démangent pas. Cette éruption dure environ une semaine.
« Le diagnostic de rougeole doit être confirmé par un test PCR (comme pour le Covid ou la coqueluche) », insiste le professeur Yves Gillet.
Une maladie non bénigne qui ne touche pas que les enfants
La maladie est causée par un virus très résistant (paramyxovirus du genre morbillivirus) qui circule entre les humains. Contrairement à la croyance populaire, la rougeole n’est pas une maladie bénigne. Il est vrai que, dans la majorité des cas, elle guérit spontanément en quelques jours. “Mais il reste très difficile de prédire son évolution”, souligne le professeur Yves Gillet. Elle peut également entraîner, à tout âge, des complications graves telles que lésions pulmonaires (pneumonie), oculaires, neurologiques (encéphalite) ».
Les personnes les plus à risque sont bien entendu les nourrissons de moins d’un an (avant vaccination) et les personnes immunodéprimées. Chez la femme enceinte, elle peut provoquer des fausses couches, des anomalies fœtales, la rougeole néonatale, etc. Mais cela peut aussi avoir des conséquences sur des personnes qui apparaissent fortes, sportives et en parfaite santé sans qu’on sache vraiment pourquoi.
« En France, près de 30 000 cas de rougeole ont été enregistrés entre 2009 et 2020 », explique le professeur Yves Gillet. On n’en parle pas beaucoup, mais 26 personnes sont encore mortes. Dans 1 cas sur 1 000, la rougeole provoque des lésions cérébrales pouvant être mortelles. »
Comment se transmet la rougeole ? ?
“La rougeole est l’une des maladies infectieuses les plus contagieuses”, explique le professeur Yves Gillet. En l’absence de protection vaccinale, il existe un risque extrêmement élevé de l’attraper par contact avec une personne qui en est atteinte, sachant queune personne malade peut contaminer jusqu’à 18 à 20 personnes. Elle se transmet principalement par voie respiratoire avec des petites et grosses gouttelettes de salive contaminée qui restent très longtemps en aérosol et en suspension dans l’air. »
Cette contamination peut se produire en toussant, en éternuant, en se mouchant, mais aussi par des mains, des objets ou des jouets souillés transmission d’enfant à enfant, câlins ou relations avec des personnes infectées. Le patient est contagieux 5 jours avant le début de l’éruption cutanée (phase maximale de contagion) puis jusqu’à cinq jours après le début de l’éruption cutanée. Plus ennuyeux encore pour son entourage, il est aussi contagieux même lorsqu’il se sent bien (avant les premiers symptômes de la grippe). D’où le risque important d’entrer en contact avec une personne contagieuse sans même le savoir…
Soulager les symptômes s’ils ne sont pas traités
Il n’existe pas de traitement spécifique contre la rougeole. Une fois le diagnostic établi, la prise en charge consiste à soulager les symptômes, notamment la fièvre, et à prévenir les complications. Parce que la rougeole provoque aussi fatigue générale durable, favorisant les infections dans les mois qui suivent la maladie en raison d’une baisse temporaire de l’immunité.
« La seule façon de se protéger, c’est l’immunité », insiste le professeur Gillet. Soit parce que vous avez déjà contracté la rougeole, soit grâce au vaccin. » En effet, tout comme la varicelle, une personne qui l’a contractée en est alors immunisée à vie.
La vaccination pour éviter de l’attraper et éviter de la transmettre
La vaccination est meilleure protection contre la rougeole. Efficace et bien toléré, il présente peu de contre-indications, sauf en cas de grossesse, de médicaments affaiblissant le système immunitaire ou en présence d’une allergie à l’un des composants du vaccin.
Depuis le 1er janvier 2018, la vaccination est devenue obligatoire pour les enfants de moins de 2 ans. Le vaccin trivalent ROR (rougeole, oreillons, rubéole) est remboursé à 100 % pour les enfants jusqu’à 17 ans. La première dose de vaccin est recommandée à l’âge de 12 mois. La deuxième dose doit être administrée entre 16 et 18 mois. Dans un avis rendu le 24 mai 2024, la Haute Autorité de Santé (HAS) a émis une nouvelle recommandation. Elle recommande deux doses de vaccin, au lieu d’une dose unique, pour toute personne non vaccinée née après 1980.
“Il faut s’inspirer des pays d’Europe du Nord qui ne connaissent plus pratiquement aucun cas de rougeole et continuer à étendre la couverture vaccinale”, conclut le professeur Gillet. D’autant que de nombreuses études démontrent également que les effets du vaccin contre la rougeole permettent une diminution de toutes les infections respiratoires chez les enfants et une diminution de la mortalité infectieuse liée à d’autres maladies. »
(1) Santé publique France.