De technicien aéronautique à sans-abri

En 2013, dans un rapport de La presseSerge Nadon a parlé avec fierté de son métier de technicien en avionique. Après une série de coups durs – séparation, passage en prison, traumatisme crânien –, l’homme de 53 ans vit désormais dans la rue.

«La plus grande passion de ma vie maintenant, c’est de récolter 10 dollars de canettes pour acheter un morceau de crack», confie-t-il, pas très fier de sa situation. « Je suis tellement accro que je n’ai même pas la patience d’attendre pour en acheter un à 15 $, même si je sais que cela me donnerait un meilleur buzz. »

Il nous a lui-même informé qu’il avait déjà figuré dans nos pages, dans des jours meilleurs, lorsque nous l’avons rencontré mardi soir à la halte thermique de la Mission St-Michael.

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE ARCHIVES

Serge Nadon, en 2013

Titulaire d’un DEC en mécanique aéronautique et d’un autre DEC en avionique, il a travaillé plusieurs années pour des compagnies aéronautiques, notamment à Québec et à Mirabel. Il était passionné par son travail, dit-il.

Très lucide, il reconnaît avoir fait plusieurs « mauvais choix » qui l’ont fait sombrer dans la toxicomanie et le sans-abrisme. Mais il a aussi eu de la malchance : un traumatisme crânien en 2018, qui a entraîné des problèmes de mémoire et d’organisation, puis la mort de son père, avec qui il vivait, en 2020.

PHOTO SARAH MONGEAU-BIRKETT, LA PRESSE

Serge Nadon

Malgré une thérapie depuis 2011 à la Maison Jean-Lapointe, il n’arrive pas à se libérer de l’emprise des drogues. Et sa vie semble désormais tourner autour de son habitude de crack.

Une réalité des plus éprouvantes

Il est passé par quelques refuges pour sans-abri, comme l’Abri de Villeray et l’Étape, au CAP Saint-Barnabé. Mais à cause de sa dépendance au crack, il a été expulsé à plusieurs reprises.

Vous ne devez pas manquer les contrôles des lits, sinon vous perdez votre place. Mais comme je devais récupérer des canettes pour payer ma boisson, puis récupérer 10 $ de canettes, c’est sacrément long, je revenais souvent trop tard.

Serge Nadon

L’itinérance n’est pas facile, témoigne Serge Nadon. Il perdait souvent ses biens parce que les refuges les jetaient en son absence ou parce que les cachettes qu’il trouvait étaient découvertes par d’autres.

Il n’est pas non plus facile de prendre soin de son hygiène personnelle lorsqu’on n’a nulle part où se reposer. Lorsque nous l’avons rencontré, M. Nadon ne s’était pas douché ni changé de vêtements depuis deux semaines, a-t-il admis. “Sauf les bas!” », précise-t-il. « La dernière fois que j’ai voulu prendre une douche ici, quand mon tour est arrivé, on m’a dit que la personne avant moi était restée trop longtemps sous la douche et que c’était fini. »

Il reconnaît qu’il aurait sans doute besoin d’un suivi psychologique, mais n’a jamais entrepris de démarches en ce sens, ni d’adhérer à un programme d’hébergement supervisé. « Une intervenante de rue m’avait déjà proposé d’aller rencontrer quelqu’un de son organisation, mais je n’y suis pas allée. Il est difficile d’aider quelqu’un qui ne s’aide pas lui-même », dit-il.

« Quand je me retrouve à dormir dehors comme hier, devant la porte du métro, je trouve ça tellement difficile, je me dis que ça va me donner la motivation pour m’en sortir. Mais je n’ai toujours pas agi. C’est sûrement parce que je ne suis pas encore tombé assez loin. »

 
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