Les autorités surveillent de près la montée de la grippe aviaire aux États-Unis.

(Montréal) La hausse des cas de grippe aviaire dans des fermes aux États-Unis, la contamination de troupeaux de vaches et des cas récemment transmis à des humains inquiètent les autorités québécoises et canadiennes, qui disent suivre la situation de très près.


Publié à 10h33



Catherine Desautels

La Presse Canadienne

L’influenza aviaire, plus précisément l’influenza aviaire de sous-types H5 et H7, est une maladie qui doit être déclarée au Québec puisqu’il s’agit d’une zoonose, c’est-à-dire qu’elle peut être transmise entre les animaux et les humains.

Les cas humains de grippe aviaire sont très rares, mais au printemps dernier, trois cas humains associés à des élevages de vaches laitières infectés ont été signalés aux États-Unis. Deux personnes infectées présentaient des symptômes oculaires et la troisième une infection respiratoire.

À l’échelle mondiale, 15 cas humains d’un clade spécifique du H5N1 ont été signalés depuis l’émergence de ce clade en 2022 : deux cas en Chine, deux cas en Espagne, cinq cas au Royaume-Uni, quatre cas aux États-Unis, un cas en Équateur et un cas au Chili.

La majorité des cas (11 sur 15) avaient des antécédents d’exposition à de la volaille, a indiqué le ministère de la Santé du Québec. « Étant donné le petit nombre de cas humains signalés à ce jour dans le monde, le virus semble avoir une capacité limitée à infecter les humains », a écrit le ministère de la Santé dans un courriel adressé à La Presse Canadienne.

« Nous savons que plusieurs humains ont présenté des signes cliniques. […] La bonne nouvelle est que cela ne se propage pas entre humains. Le jour où cela arrivera, c’est le jour où le COVID nous manquera », a commenté D.r Jean-Pierre Vaillancourt, professeur titulaire à la Faculté de médecine vétérinaire de l’Université de Montréal.

« Le H5N1, au Canada, on l’a depuis de nombreuses années, mais il est faiblement pathogène. Ce qui est généralement en augmentation dans le monde, ce sont les virus hautement pathogènes. […] « Pour donner une définition simple de hautement pathogène, c’est que pour quatre oiseaux infectés, au moins trois meurent », a résumé M. Vaillancourt.

Selon lui, il est peu probable que les choses se compliquent chez les humains, mais le risque n’est pas nul. « En général, le risque est très minime, alors qu’ici, il est faible voire très faible. Mais faible voire très faible, en tant que politicien ou consultant d’un politicien, je dirais : il vaut mieux ne pas négliger cela, surtout dans la période post-COVID », prévient-il.

Le spécialiste de l’épidémiologie des zoonoses a expliqué que la grippe aviaire est un virus qui se réplique et parfois sa mutation lui permet de devenir « un super virus ».

À ce jour, aucun cas de transmission de la maladie à l’humain n’a été observé au Québec ou au Canada.

Renforcer les mesures de protection

Nous avons une pandémie chez les oiseaux sauvages d’une série de variantes H5N1 qui sont hautement pathogènes, a déclaré Dr Vaillancourt. « Actuellement, la série de variants H5N1 qui nous préoccupent – ​​nous en avons au Québec et au Canada –, nous les avons identifiés chez au moins 489 espèces d’oiseaux et chez plus de 200 espèces de mammifères », a-t-il déclaré.

Aux États-Unis, le virus a été détecté chez des oiseaux sauvages dans tous les États, chez des vaches laitières dans 12 États et chez plus de 200 mammifères de plus de 20 espèces à travers le pays.

PHOTO AMANDA PEROBELLI, ARCHIVES REUTERS

Aucune vache laitière infectée n’a été détectée au Québec et au Canada, ni dans les produits laitiers.

À la suite de la détection du virus de la grippe aviaire hautement pathogène H5N1 chez des bovins et des chèvres aux États-Unis, l’Agence de la santé publique du Canada (ASPC) a procédé en avril à une évaluation des risques. Elle estime que pour l’ensemble de la population canadienne, la probabilité d’une infection humaine par le virus H5N1 contractée par le bétail au cours des trois prochains mois demeure « très faible ».

La situation demeure préoccupante. Le ministère de la Santé a également mandaté l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) pour élaborer des recommandations de mesures de protection pour les travailleurs des industries ovine, bovine et porcine en cas d’éclosion.

«En effet, il est préoccupant qu’il soit entré dans le secteur des ruminants comme les bovins laitiers, les chevreaux et les alpagas», a déclaré Martin Pelletier, agronome et coordonnateur de l’Équipe québécoise de contrôle des maladies de la volaille (EQCMA).

« Cela signifie que le virus s’installe et cela représente une exposition supplémentaire pour le secteur avicole qui est plus touché par cette maladie que les autres types d’animaux. »

Dl Vaillancourt partage son inquiétude. « Avec les vaches, il y a de plus en plus de mammifères, de plus en plus d’occasions pour le virus de se répliquer. En première ligne, c’est une inquiétude pour les gens en contact direct avec ces animaux », explique-t-il.

Le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ) et ses partenaires de l’industrie invitent les éleveurs de bovins laitiers à accroître leur vigilance et leurs mesures de biosécurité.

L’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA) a également bonifié ses mesures de protection et de surveillance, notamment en exigeant que les vaches laitières en lactation importées des États-Unis au Canada obtiennent un résultat négatif à un test de détection de l’influenza aviaire hautement pathogène.

Des producteurs inquiets

En 2022, 23 sites de production avicole ont été touchés par la grippe aviaire au Québec et ce nombre est passé à 28 l’an dernier. Depuis le début de l’année, trois fermes avicoles ont déclaré la présence du virus H5N1, selon le ministère de la Santé.

« La source de contamination potentielle est constituée par les oiseaux sauvages qui en sont porteurs et qui peuvent la propager principalement par leurs excréments ou leurs sécrétions », explique M. Pelletier. L’enjeu est donc de créer une barrière entre l’extérieur des bâtiments et l’intérieur.

Benoît Fontaine, directeur général de l’Équipe de contrôle des maladies aviaires du Québec, s’inquiète lui aussi de la situation chez nos voisins du sud.

Selon lui, les producteurs sont inquiets et ont apporté des améliorations sanitaires, par exemple en détruisant les étangs qui attirent les oiseaux ou en ayant des tracteurs séparés pour les champs, installés à l’écart des bâtiments.

Il évoque des améliorations qui vont au-delà de la norme, comme avoir un banc de séparation à l’entrée du poulailler ou le lavage des mains. « Je crois que tout le monde a augmenté sa biosécurité et c’est peut-être une des raisons pour lesquelles les cas sont en baisse (cette année) », a déclaré M. Fontaine.

Le protocole pour un site contaminé par la grippe aviaire oblige les producteurs à exterminer tous leurs oiseaux et à désinfecter le bâtiment.

S’il y avait des cas chez les bovins, l’ACIA n’interviendrait pas comme elle le fait dans le secteur avicole, a précisé M. Pelletier. Il n’y aurait pas de dépeuplement du troupeau. « Ça n’a pas le même impact. Chez les bovins, ça se manifeste par certains signes cliniques, mais il n’y a pas de mortalité », explique-t-il.

« C’est pourquoi au Québec, le MAPAQ, avec l’industrie, élabore un plan d’action d’autoquarantaine volontaire et d’intervention de contrôle pour minimiser les risques de dissémination de la maladie », poursuit M. Pelletier.

En plus d’une période d’auto-quarantaine pour l’entrée et la sortie des animaux, le lait des animaux malades ou positifs serait jeté, précise le MAPAQ. Par mesure de précaution supplémentaire, le lait des animaux sains du troupeau sera envoyé dans une usine qui pasteurise exclusivement le lait, ce qui détruit le virus.

Le contenu santé de La Presse Canadienne est financé grâce à un partenariat avec l’Association médicale canadienne. La Presse Canadienne est seule responsable des choix éditoriaux.

 
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