L’hiver arrive et encore une fois nous avons le nez qui coule, des maux de tête, des maux de gorge, de la toux et de la fatigue. La baisse des températures s’accompagne de la réapparition ou de l’aggravation de nombreux troubles et pathologies, parmi lesquels les crises d’asthme, les maladies cardiovasculaires. (lire l’encadré) ou encore des troubles de la circulation sanguine au niveau des doigts (phénomène de Raynaud).
Mais ce qui pèse sur notre nez, ce sont surtout les maladies respiratoires, «qui sont les infections les plus fréquentes sous nos latitudes», précise la Dre Noémie Boillat Blanco, médecin assistante au Service des maladies infectieuses du Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV). ). On estime que pendant la saison froide, elles touchent environ 30 % de la population. Causées principalement par des virus et plus rarement par des bactéries, elles prennent des formes multiples, « et couvrent tout un spectre allant de la plus bénigne – le rhume – à la plus grave – la pneumonie –, en passant par la grippe, l’angine, la rhinopharyngite, le Covid-19 ou encore la grippe. voire des bronchiolites chez le nourrisson », note le spécialiste. L’adulte moyen attrape deux à trois rhumes par an et l’enfant encore plus.
Transmission accrue de virus
Le froid est mauvais pour le coeur
Notre cœur et nos artères souffrent également en hiver. Les basses températures entraînent en effet « une surcharge d’effort pour le cœur », souligne le professeur Pedro Marques-Vidal, spécialiste de recherche clinique au sein du service de médecine interne du CHUV. De plus, une exposition prolongée au froid provoque la contraction des vaisseaux sanguins et augmente légèrement la tension artérielle, comme le montre une étude réalisée par le spécialiste du CHUV et ses collègues. Ils ont également constaté que les basses températures accentuaient d’autres facteurs de risque cardiovasculaire. “En décembre, dans l’hémisphère Nord, on observe un pic de cholestérol lié à la tendance des gens à manger un peu plus de gras”, explique le professeur Marques-Vidal. Il n’est donc pas surprenant qu’en hiver, la mortalité due aux maladies cardiovasculaires augmente.
Comment l’expliquer ? Le froid favorise la résurgence de ces maladies car il affaiblit le système immunitaire (lire l’encadré). Il provoque également la contraction des vaisseaux sanguins, notamment ceux du système respiratoire. Mais surtout, « l’hiver favorise la promiscuité et les rassemblements de personnes dans des lieux clos et mal aérés », rappelle le Dr Boillat Blanco. Rien de tel pour faciliter la propagation des virus respiratoires. « Nous en avons eu la preuve lors de la crise du Covid-19 : grâce aux mesures de protection, pendant deux ans, il n’y a pas eu d’épidémie de grippe saisonnière », rappelle l’infectiologue.
La meilleure prévention contre les maladies hivernales reste la vaccination, lorsqu’elle est disponible. On peut désormais se protéger contre la grippe, le Covid-19, mais aussi depuis peu contre le virus respiratoire syncytial (VRS), « responsable de bronchiolites chez les nouveau-nés et de pneumonies chez les personnes âgées », souligne le Dr Boillat White.
Mais il est aussi possible de se préparer à l’arrivée des maladies hivernales en prenant soin de sa bonne hygiène de vie. A commencer par son alimentation.
Ne mangez pas plus de gras
« Les humains doivent maintenir leur température corporelle. Quand il fait plus froid, il doit dépenser plus d’énergie pour cela», note le professeur Pedro Marques-Vidal, spécialiste en recherche clinique au sein du service de médecine interne du CHUV. On a donc tendance à manger plus, et plus gras, en hiver qu’en été, car les aliments concernés sont ceux qui apportent le plus de calories. Mais «ce n’est pas nécessaire», souligne le professeur, «sauf pour les personnes qui travaillent à l’extérieur ou qui doivent affronter un froid extrême. Ils peuvent manger un peu plus, sans mettre l’accent sur le gras. Le spécialiste recommande également de consommer des fruits et légumes variés. Mais cela ne sert à rien, selon lui, de recourir à des compléments alimentaires : « Nous avons montré qu’il n’y avait pas d’association entre la consommation de suppléments vitaminiques et le statut immunitaire. Ceux qui en prennent n’ont pas plus d’anticorps contre les bactéries et les virus que les autres.
Le mieux, conclut-il, est de manger « pratiquement comme en été », sans oublier, comme pendant la saison chaude, de boire régulièrement. Il ajoute : « Les pièces chauffées sont aussi le plus souvent sèches, nous avons donc tendance à nous déshydrater. »
Bougez et dormez bien
Tout au long de l’année, il est essentiel de pratiquer une activité physique pour rester en bonne santé. Mais le froid n’incite pas à l’exercice. “Cela n’incite pas les gens à sortir de chez eux pour marcher ou aller dans une salle de sport”, reconnaît le spécialiste en médecine interne. Toutefois, souligne le Dr Boillat Blanco, “ce n’est pas parce qu’on se promène qu’on va attraper un virus”.
Le sommeil joue également un grand rôle. Un corps fatigué est fragilisé et se défend moins bien contre les maladies. Le professeur Marques-Vidal conseille donc de conserver un horaire de sommeil régulier.
De plus, on aurait tout à gagner à retrouver les bons réflexes acquis lors de l’émergence du Covid-19 : porter un masque dans les lieux très fréquentés, adopter les fameux « gestes barrière », se laver régulièrement les mains, mais aussi aérer régulièrement son logement. Avis aux chanceux : une autre stratégie peut aussi être de passer l’hiver dans un pays chaud !
Défenses immunitaires affaiblies
«Nous ne sommes pas porteurs des virus responsables des infections respiratoires, nous les attrapons de l’extérieur», rappelle le Dr Noémie Boillat Blanco, médecin assistante au service des maladies infectieuses du CHUV. C’est alors à notre système immunitaire de combattre les intrus. Ceux-ci entrant par le nez, ils sont d’abord confrontés aux muqueuses et aux cils nasaux « qui constituent notre première ligne de défense », poursuit le spécialiste. Cependant, à mesure que l’air chauffé assèche les muqueuses et que le froid les irrite, cette barrière s’affaiblit. Le nez dispose d’une autre arme : les vésicules extracellulaires présentes dans les cellules de ses muqueuses. Ces petites particules, que nous émettons lorsque nous sommes exposés à des virus respiratoires, reconnaissent les microbes, les inhibent et les empêchent de se multiplier dans notre organisme. Or, selon une étude américaine publiée en décembre 2023 dans Le Journal d’allergie et d’immunologie cliniquelorsque les températures baissent, la muqueuse nasale sécrète moins de ces vésicules ; l’effet antiviral est donc réduit. Selon le Dr Boillat Blanco : « Il s’agit de la première étude scientifique prouvant que le froid affecte notre système immunitaire et nos défenses contre les infections respiratoires. »
________
Published in Le Matin Dimanche on 10/11/2024