La bête du sax Thomas de Pourquery se réinvente en enchanteur de la pop ! – .

Avec Thomas de Pourquery, nous avons retrouvé notre « Biggy Stardust » ! Récompensé en 2014 et 2017 aux Victoires du jazz, prix Django-Reinhardt en 2021, le saxophoniste se mue en chanteur space pop pour « Let the monster fall », superbe album sous l’influence de Bowie et Prince. Il est en concert samedi à Jazz en Pic Saint-Loup, avant Jazz à Sète le 17 juillet et le Rockstore le 12 décembre.

Après vingt ans d’ascension dans le jazz, qu’est-ce qui a motivé ce virage pop solo ?

J’écris des chansons depuis très, très longtemps. Dans mes différents projets jusque-là, j’ai toujours un peu chanté. Même si cela peut paraître surprenant, j’attendais qu’un jour la vie prenne un tournant concret. Cela a failli arriver avec VKNG, en 2015, mais je me suis fait « hacker » par un musicien (Maxime Delpierre NDLR) qui au lieu de simplement produire mon album, voulait qu’il devienne un groupe, et je l’ai suivi dans cette idée. Mais ça aurait dû être mon premier projet solo… Après, il y a eu le confinement, plusieurs reports, j’ai dû jeter un album de chansons à la poubelle, c’était très dur pour moi. Alors, je me suis lancé dans autre chose, avec d’autres personnes, et ça a abouti à cet album.

Un album qui est à la fois une rupture avec Supersonic, votre sextet de jazz, et sa suite…

En tout cas, je fais de la musique tous les jours, comme un menuisier travaillerait son bois. Bien sûr, pour moi, il y a une continuité absolue dans mon travail, et aucune rupture. D’ailleurs, sur scène, je joue peut-être plus du saxophone qu’avec Supersonic ! Ce qui m’excite, c’est d’être sur scène et ce nouveau projet me satisfait totalement de ce point de vue : il me propose en concert d’exploser ses formes, d’improviser, d’aller complètement ailleurs s’il le faut. Cela peut paraître étrange pour un projet pop mais le mot pop est aujourd’hui finalement aussi large que peut l’être le mot jazz, c’est ça qui est beau. Cela ne me dérange pas.

Dans les textes comme dans les ambiances des chansons de « Let the monster fall », il y a évidemment quelque chose de très intime, personnel…

C’est vrai que j’écris des chansons comme les autres, un journal personnel. Mais j’ai le sentiment que toutes les chansons prennent leur Source dans quelque chose de très intime, que plus elles sont personnelles, plus elles peuvent atteindre l’universel. En tout cas, cet album, mon premier recueil de chansons, dirons-nous, a traversé beaucoup de choses. J’en parle depuis peu, et plus facilement depuis sa sortie, mais ce disque s’inspire beaucoup de mon père qui était atteint d’une maladie neurodégénérative incurable qui lui donnait l’impression d’être possédé par un monstre (du moins c’est ce que c’était comme si). que nous avons vécu à ses côtés). Cela fait dix ans qu’il est parti, il est peut-être temps, comme je le dis dans la chanson Laisse tomber le monstre, de lâcher ce monstre qui avait fini par nous posséder tous un peu dans son entourage… Il y a comme ça, dans mes chansons , des sujets compliqués mais qui touchent tout le monde au fond. Ce n’est ni didactique, ni explicite, mais mon idée était d’en parler, et de le faire d’un point de vue lumineux. Avec l’envie de laisser entrer la vie, coûte que coûte !

On retrouve en effet dans votre pop ce qui nous a ravi dans votre jazz : ce caractère euphorique, riche en vitamines, déclenchant la dopamine !

J’aime l’idée. Oui, ça me touche même beaucoup que tu dises ça, parce que je crois vraiment à l’idée d’un ADN de la chanson. C’est la musique indienne qui m’a ouvert la première fois à ce concept ; puis je n’ai plus regardé la musique de la même façon. Puis, en fouillant dans le travail de Sun Ra, j’ai découvert que lui aussi pensait la même chose. Bon, je n’ai pas la prétention de créer avec mes chansons des êtres potentiellement vivants en eux-mêmes mais c’est mon intention lorsque je crée une pièce de donner naissance à des petites créatures pleines de vie….

Des petites créatures qui nous contaminent positivement !

Écoutez, tant mieux ! Cela me rend heureux car même lorsque la mélancolie me frappe, j’aime l’idée de répandre la lumière et la joie…

Ce disque vous place dans la famille de Ziggy Stardust et des Araignées de Mars, Prince and the Revolution et autres Flaming Lips…

Oh? En tout cas, ce sont des idoles absolues, des artistes dont j’aimerais être un grand faussaire ! (rires) Mais comme tous les musiciens : on essaie toujours de copier complètement nos idoles sans jamais y parvenir et parfois, à force, on a les prémices de quelque chose à nous. Cela dit, je ne cherche pas à avoir mon propre style, c’est une approche qui aurait plutôt tendance à me faire fuir. Personnellement, je suis très heureux de me placer humblement dans la lignée des artistes qui m’inspirent le plus.

Ce qui est bien, c’est d’être classé parmi… les inclassables !

Exactement, et je le prétends. C’est peut-être aussi un point commun à tous mes projets : le goût des playlists. J’ai toujours écouté des choses très différentes, et quand j’étais plus jeune, j’adorais faire des compilations de cassettes avec plein de séquences improbables, mais uniquement des morceaux qui m’époustouflaient et surtout mon cœur. J’écoutais rarement les albums dans leur intégralité mais je les faisais à ma manière. Quand je fais des disques aujourd’hui, c’est pareil : j’aime voyager, passer d’un décor à un autre.

Un voyage pas forcément terrestre, mais spatial, mais cosmique !

Il faut croire que Sun Ra est passée par là ! (rires) Il a dû libérer des choses en moi. Aujourd’hui, je ne m’interdis rien. L’art, l’artisanat, la vie, peu importe, n’ont pas de limites, sauf la sienne propre. Il faut être un peu honnête là-dessus : nous sommes là pour aller le plus loin possible dans nos actions ! Je ne souhaite rien d’autre que la musique pour sauver l’univers, et je crois que c’est ce qu’elle a déjà fait jusqu’à aujourd’hui : répandre sa lumière, partout, sur tout le monde !

Et ça ne décolle jamais plus que sur scène, non ?

Nous n’en sommes qu’au début de la tournée mais oui, c’est un grand bonheur, comme je le disais plus tôt, de faire exploser les formes sur scène. Peut-être encore plus qu’avec Supersonic, on est paradoxalement plus punk, plus jazz ! Ces moments d’improvisation totale, quel plaisir ! Aucune limite, toujours. Dans la musique classique, le rock’n’roll, la musique électronique, le jazz, l’improvisation a toujours eu sa place même si je me rends compte que c’est quelque chose qu’on pratique de moins en moins en concert… Alors, les gens sont aux anges quand ils nous voient improviser, lancer nous-mêmes dans le vide, pour les faire danser !

Mais pour ce genre de noble entreprise, il faut bien choisir ses compagnons !

À coup sûr ! Il y a Sylvain Daniel à la basse et David Aknin à la batterie, avec qui j’ai toujours travaillé, frères dans la musique, et il y a les nouveaux dans ma vie, que je chéris tout autant : Akemi Fujimori, claviériste et chanteur, et Etienne Jaumet. , qu’on ne présente plus (Zombie Zombie, The Married Monk NDLR), qui est un grand chaman du synthé modulaire et du sax qui psychédélise notre son en live. Ce sont des êtres de lumière et des musiciens que j’adore !

Au festival Jazz en Pic Saint-Loup, vous jouez au lendemain de Laurent Bardainne, votre ami, votre complice dans Supersonic !

Nous ne nous quittons pas. Je pense aussi que Laurent et moi ne nous quitterons jamais ! C’est un musicien que j’ai toujours admiré. Ce son de ténor, merveilleux ! La musique qui est en lui, extraordinaire ! Et quel compositeur ! Il est très différent de moi dans la façon dont il crée sa musique, il conceptualise beaucoup, je l’aime. Sa musique me rend ravie ! Je ne compte pas arrêter Supersonic : on a toujours fait des albums, puis des breaks, pour se nourrir ailleurs, avant de se retrouver. Nous nous reverrons donc.

Reviendrez-vous ensuite dans la région pour Jazz à Sète, où vous aurez un invité de marque ?

Il y aura Camélia Jordana, qui viendra chanter quelques chansons avec nous. C’est une chanteuse incroyable, que je connais depuis très longtemps, de mon point de vue une des plus grandes interprètes que nous ayons en France. Cela fait longtemps que je n’ai pas joué avec elle, je suis donc très heureux de la revoir pour cette soirée qui sera, forcément, particulière au Théâtre de la Mer !

Thomas de Pourquery est attendu ce samedi au festival Jazz en Pic Saint-Loup, qui se tient les 7 et 8 juin au Triadou (Hérault). On le retrouvera ensuite au Jazz à Sète qui se déroule du 15 au 21 juillet. Enfin, il est également attendu au Rockstore le 12 décembre !
 
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