Disparition d’Hugues Gall, ancien directeur des opéras de Paris et de Genève

Disparition d’Hugues Gall, ancien directeur des opéras de Paris et de Genève
Disparition d’Hugues Gall, ancien directeur des opéras de Paris et de Genève

Formé aux côtés d’Edgar Faure, ce passionné de musique et de danse a passé l’essentiel de sa carrière à la tête d’institutions lyriques, dont la Grande Boutique de 1995 à 2004.

Hugues Randolph Gall est décédé à l’âge de 84 ans, a annoncé samedi l’Académie des Beaux-Arts, dont il était membre libre depuis 2002. Un seigneur disparaît. Un homme rare, un esprit vif, une élégance british, un humour teinté de tendresse, une intelligence brillante. Homme libre aussi, ne reconnaissant aucune chapelle, sauf celle qu’il a bâtie en son âme et en sa conscience. Ses muses natales ? Alphonse Allais et Erik Satie, des génies nés comme lui à Honfleur, dans le Calvados, qui lui ont donné le goût de la légèreté et de la perfection. A cela s’ajoute Baudelaire, pour le spleen et l’idéal.

Hugues R. Gall est né le 18 mars 1940, dans la maison de la veuve du général Aupic. ” Mon père était bavarois. Il s’était exilé en France, n’ayant pas apprécié la montée du nazisme. D’un autre côté, il avait une immense admiration pour Churchill, d’où mon deuxième prénom, Randolph.raconte Hugues Gall qui assiste aux funérailles du « Vieux Lion » en 1965. Gall a alors 25 ans et quitte les rivages d’un certain dilettantisme.

Sera-t-il artiste ? A Lausanne, où sa famille s’installe quand il a 7 ans, sa mère l’emmène à un concert : Furtwängler dirige Beethoven. Épuisé par une course sur les glaciers, l’enfant de 12 ans pensait dormir. Pourtant, la musique le captive. Il chante dans une chorale où il apprend les refrains de grands opéras, La flûte magique à Indes galantess’essaye au piano et au violon, mais entre en khâgne au lycée Lakanal de Sceaux, abandonne le grec pour l’allemand qu’il parle couramment, évite la Normale pour l’Institut d’économie politique.

Sous l’aile d’Edgar Faure

Sera-t-il fonctionnaire ? Edgar Faure, avocat des affaires de son père avant la guerre, mais également musicien et pianiste, le prend sous sa protection. Il était alors ministre de l’Agriculture. La première mission de Gall est d’humaniser l’abattage des animaux. La lenteur de l’administration à mettre en œuvre les textes l’exaspère. « J’ai dit au directeur du service vétérinaire du ministère : “Allons voir comment nous appliquons nos décrets.” Mon calcul a fonctionné : fatigué de me lever chaque semaine pour me retrouver à La Villette à 5 heures du matin, cela a accéléré la mise en place du pistolet à cartouches », dit-il en riant toujours de son subterfuge. Edgar Faure l’a emmené avec lui lorsqu’il a pris la direction du ministère de l’Éducation nationale. Hugues Gall est en charge du dossier baccalauréat option musique et des cours aux horaires flexibles. Il travaille le compositeur Marcel Landowski, délégué à la musique au ministère de la Culture.

Lorsqu’il s’agit de réformer l’Opéra de Paris, boudé des spectateurs et coincé dans son inaction, Hugues Gall est de la partie. Il faut renverser la table, fermer boutique, harmoniser les conventions collectives, dissoudre la chorale. Dans la troupe des chanteurs, les meilleurs se produisent à l’étranger, et il ne reste que les seconds engagés pour services rendus pour honorer les soirées parisiennes. Et trouver un capitaine pour mener à bien ces opérations souhaitées par Pompidou à l’Élysée, Chaban-Delmas à Matignon et Jacques Duhamel au ministère de la Culture. Hugues Gall évoque le nom du Suisse Rolf Liebermann. Un oiseau rare.

Liebermann dirige de main de maître l’Opéra de Hambourg depuis 1959. Il est également compositeur, chef d’orchestre et metteur en scène. Un étranger à la tête de l’Opéra de Paris ? Depuis Lully, on n’a jamais vu ça ! Liebermann demande également des garanties en matière de budget, d’autonomie et de personnel. Cette nomination a fait scandale. Il arrive cependant avec son équipe en 1973. Hugues Gall est son adjoint, plus particulièrement chargé du ballet, un art qu’il apprécie. Gall est proche des stars du moment, notamment Maurice Béjart et Rudolf Noureev.

La « Grande Boutique »

L’ère Liebermann s’ouvre avec une production historique : Les Noces de Figaro réalisé par Giorgio Strehler, réalisé par Georg Solti, avec Gundula Janowitz, Mirella Freni, Gabriel Bacquier, José Van Dam et Frederica von Stade. Le reste sera le suivant : Électre avec Birgit Nilssen et Christa Ludwig sous la direction de Karl Böhm, Lulu, donné pour la première fois avec son dernier acte, dans une mise en scène de Patrice Chéreau et sous la direction de Pierre Boulez. C’est maintenant « Niveau Opéra de Paris ». Côté ballet, le répertoire s’ouvre : Balanchine, Robbins, Carolyn Carlson et tournées en URSS puisque avec une seule scène – celle du Palais Garnier – et 150 danseurs, le ballet se retrouve à l’étroit.

Au départ de Rolf Liebermann en 1980, Hugues Gall part diriger l’Opéra de Genève. Quinze années de bonheur où il s’est reposé du dialogue social explosif caractéristique de l’Opéra de Paris et des lourdeurs administratives françaises. Qu’on lui propose d’y retourner ou qu’on le consulte sur l’opportunité de construire la Bastille, il répond par la négative. « On n’est heureux qu’à deux moments quand on dirige la Grande Boutique, explique-t-il. Le jour de votre rendez-vous et le jour de votre départ. » Lorsque Bastille et Garnier lui furent proposées, alors que les deux maisons peinaient à décoller, il savait qu’il devait céder. Mais nécessite un changement d’organisation qui concentre entre ses mains tout le pouvoir, moyen exceptionnel pour constituer un répertoire à Bastille, une indexation de la subvention sur la masse salariale et les frais fixes.

L’ère Gall a commencé en 1995, pendant neuf ans et 80 productions d’opéra et de ballet, dont des mémorables Indes galantes, Alcina, Rusalka, Les Boréades, Les Contes d’Hoffmann,Caprice dirigé par Robert Carsen et la fidélité de chanteurs comme Renée Fleming, Susan Graham, Natalie Dessay, Samuel Ramey, Neil Shicoff et Placido Domingo. Brigitte Lefèvre à ses côtés tient le Ballet. Son soutien pèsera lourd dans la nomination de chacun de ses successeurs

Élu à l’Académie des Beaux-Arts en 2002, Hugues Gall prend la direction de la maison de Monet à Giverny, succédant à Gérald Van der Kemp qu’il admirait. Le redoutable patron de l’Opéra de Paris se transforme en patriarche bon enfant. Il dialogue avec les jardiniers, se passionne pour l’histoire de la reconstitution du jardin, remeuble la maison telle que Monet l’avait laissée… Les débuts du Paradis.

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