Les étudiants en art se mobilisent après des dégradations sur leurs œuvres à la Maison de la culture d’Amiens

Les étudiants en art se mobilisent après des dégradations sur leurs œuvres à la Maison de la culture d’Amiens
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La semaine dernière, une dégradation et une tentative de dégradation ont visé une exposition à la Maison de la culture d’Amiens, dont les œuvres sont l’œuvre d’étudiants en arts de la ville. Face à ces actes, ces derniers se mobilisent pour défendre un art qui fait réagir.

L’exposition s’appelle Rassemblez les bruissements. Derrière ce murmure du titre, plusieurs mois de travail d’étudiants du secteur de recherche en arts plastiques de l’Université Picardie Jules-Verne (UPJV) autour d’un livre, La sagesse des lianes.

Chaque élève était invité à dessiner une œuvre d’art représentant son interprétation de l’œuvre. Un travail autour de l’identité et de sa construction, exposé jusqu’au vendredi 26 avril à la Maison de la culture d’Amiens (MCA).

Il s’agit avant tout du travail Djeddah qu’une détérioration a été constatée par son créateur lors de la deuxième semaine d’exposition. L’œuvre est une installation d’un voile et de bijoux, une vidéo est projetée à travers le voile, c’est une réflexion de l’artiste sur ses origines.

Le câble vidéo a été coupé et les fils des bijoux ont été coupés, les morceaux sont tombés au soldétaille Clara Bauchy, étudiante en master d’art à l’UPJV. C’était très minutieux, cela s’est fait pendant les heures de visite. Donnant le bénéfice du doute, l’artiste a reconnecté les bijoux, tout en prévenant d’éventuels dommages. Jeudi dernier (ndlr : 18 avril), une fois de plus, les bijoux furent posés au sol et le voile bougea. Cela renforce le fait qu’il ne s’agit pas d’un accident.

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Les camarades du créateur de cette œuvre, dégradée à deux reprises, ont placé de petits objets autour de celle-ci pour montrer leur soutien à leur camarade.

© Clara Bauchy

Il faut se rapprocher pour toucher l’œuvre, il y a donc une volonté délibérée de la dégraderacquiesce Eric Valette, directeur de l’UFR des arts à l’UPJV. C’est la première fois depuis dix ans que cela se produit.

En réaction à la seconde dégradation, les camarades du designer se sont mobilisés. “Nous avons décidé de faire une occupation politique de l’espace autour de cette œuvre, en venant physiquement ou en déposant des objets en soutien à l’artiste, à l’œuvre ou à l’exposition à part entière.» indique Clara Bauchy. Ils se sont donc retrouvés au MCA samedi 20 avril et ont assisté à une nouvelle tentative d’avarie, cette fois sur une autre œuvre.

Pendant qu’ils sont rassemblés autour de l’œuvre Djeddah, les élèves entendent des voix fortes. Une altercation a lieu dans un autre quartier du MCA entre l’un des gardiens et un homme qui a décroché une photo exposée dans le cadre de la même exposition. Elle fait partie d’un ensemble de quatre photos représentant un homme nu couvert de taches colorées dans un décor reprenant les mêmes motifs.

L’homme qui a pris la photo était accompagné d’un autre individu, il aurait insulté et tenté de frapper le gardien. Lui et son compagnon ont pris la fuite avant l’arrivée de la police.

Il s’agit d’une attaque claire, ciblée et politique.

Éric Valette

Directeur de l’UFR des arts – UPJV

Nous porterons plainte pour tentative de vol ou dégradation d’une œuvre d’art.indique Laurent Dréano, directeur de la Maison de la culture d’Amiens. Pour moi, ce qui est important, c’est de rappeler que, quelle que soit l’œuvre, la loi protège la liberté de création. Ils risquent deux ans d’emprisonnement et 30 000 € d’amende ; nous sommes dans un pays qui protège la création.» Laurent Dréano indique cependant que de tels actes sont rarissimes. Les individus en question auraient repéré la photo depuis la rue, puis seraient revenus spécialement pour la démonter.

C’était beaucoup plus impulsif que les premières dégradations, on pense que ce n’est pas liéprécise Clara Bauchy. L’individu a frappé l’agent de sécurité au visage, la police a été contactée, mais il était déjà parti, la police n’a été contactée que dans le cadre de cette attaque.

Le thème Connectez les bruissements fait travailler les élèves de manière fine et poétique, tellement on est touchéajoute Éric Valette. Il s’agit d’une agression caractérisée, ciblée et politique.» L’université envisagerait à son tour de porter plainte. Eric Valette a assuré son soutien aux étudiants, quelle que soit la forme de réaction qu’ils souhaitent mettre en place.

Au début, j’étais très en colère, révolté que ça nous arrivese souvient Clara Bauchy. Je suis à l’université depuis quatre ans et nous avons été encouragés à faire ce genre de travail. En discutant avec d’autres personnes, je me rends compte que je suis fier de ce qui se passe, car les œuvres font parler, réfléchir, réagir. Bien sûr, nous ne voyons que des réactions négatives, mais il y a peut-être aussi des réactions positives.

C’est la première fois qu’il y a des réactions de cet ordre, ces questions sociétales et coloniales sont donc au cœur de l’actualité, ce sont des thématiques nécessaires qu’il faut aborder.» conclut-elle. Les séances et dépôts d’objets autour des œuvres se poursuivent cette semaine, malgré les vacances et jusqu’à l’organisation d’une action symbolique pour marquer la fin de cette exposition mouvementée.

C’est d’autant plus choquant que les travaux visés sont ceux d’étudiants de première année, qui sont au tout début de leur formation. Que leur renvoie la société ? Bêtise, ignorance, comportement d’une autre époquedéplore Laurent Dréano. C’est le travail de formation des jeunes qui se destinent à une carrière artistique, qui sont d’autant plus vulnérables.“Il indique que lui et son équipe souhaitent soutenir ces jeunes créateurs face à ces événements qu’il trouve”un peu traumatisant« .

Les étudiants sont également commissaires de cette exposition, ils ont donc décidé de donner leur propre réaction aux événements pour la clôture de l’exposition. Une lecture collective sera organisée par les étudiants le vendredi 26 avril à 17h, pour inviter le public et les participants à réfléchir sur les rôles de l’art et son rapport à la société. L’exposition restera ouverte le week-end, avant d’être démontée le lundi 29 avril.

 
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